La gestion de l’ancien Conseil général à la loupe

0

Après les rapports sur le SITTOMAT, sur le SMIDDEV, sur la ville de Carqueiranne,  la Chambre régionale des comptes publie aujourd’hui son rapport définitif sur l’ancien Conseil Général du Var sous la présidence d’Horace Lanfranchi.
On est en droit de se demander à quoi servent ces rapports dans la mesure où si des faits délictueux sont constatés, comme par exemple dans le cas du SITTOMAT, aucune suite n’est donnée ni par la Chambre Régionale des comptes, ni par le Procureur de la République, ni par le Préfet. A moins que cette absence de suite ne soit un encouragement pour une délinquance en col blanc ?
Laurent di Gennaro

Département du Var (Toulon) – Rapport d’observations définitives – No 2016-942

Communiqué de la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d’Azur sur son rapport d’observations définitives concernant la gestion
 pour les exercices 2009 et suivant du département du Var

Seul fait foi le texte du rapport de la chambre

La chambre régionale des comptes (CRC) de Provence-Alpes-Côte d’Azur rend public un rapport d’observations définitives sur la gestion pour les exercices 2009 et suivants du département du Var, plus particulièrement ciblé sur la situation financière, le suivi des subventions et la gestion des ressources humaines de cette collectivité.

Le département du Var est confronté à une situation financière préoccupante. Ses recettes augmentent moins fortement que ses dépenses (+ 0,6 % contre + 3,1 % par an en moyenne sur la période examinée). L’effet de ciseaux qui en résulte a entraîné une diminution de sa capacité d’autofinancement de 18 % par an. L’encours de la dette atteignait 752 M€ au 31 décembre 2014. Son montant par habitant est largement supérieur au montant moyen par habitant de la dette des départements de la même strate (départements de plus d’un million d’habitants), malgré les notables efforts que la collectivité a réalisés pour réduire ses investissements.

Dans ce contexte tendu, le département du Var dispose de plusieurs leviers pour mieux maîtriser ses dépenses :

– Les subventions (39 M€ en 2014) représentent un enjeu, notamment parce que certaines, relevant de la commande publique, sont irrégulières ;

– Le contrôle de certaines dépenses de fonctionnement, concernant notamment les ateliers automobiles ou les frais de cérémonie, s’avère insuffisant.

D’un montant de 207 M€ en 2014, les dépenses de personnel constituent le principal de ces leviers d’économie. Souvent considérées comme incompressibles, elles pourraient en l’espèce être diminuées par la simple application de la réglementation ou par une meilleure allocation des moyens. En effet :

. 1) Les agents du département disposent d’au minimum neuf jours de congés supplémentaires, représentant un total de 284 000 heures non travaillées chaque année ou 180équivalents temps-plein. Le respect de la durée annuelle légale de travail (1 607 heures au lieu de 1 544 heures) permettrait notamment de supprimer des heures supplémentaires, en réalité indues, et d’économiser chaque année 0,5 M€.

  • 2)  Le compte épargne-temps a été mis en place neuf ans après sa création par le législateur, laissant perdurer un système irrégulier. Le département a conservé les 75 000 jours de congés comptabilisés dans le dispositif antérieur, en dépit du déficit de contrôle qui l’affectait. Toutes choses égales par ailleurs, le coût de ce reliquat est estimé à 14,6 M€. L’ancien directeur des relations publiques a ainsi été rémunéré durant une période d’une année précédant son départ à la retraite, sans aucun service fait, au titre du reliquat de congés cumulés, de manière irrégulière.
  • 3)  Certains cycles de travail, notamment celui des chauffeurs, des chargés d’opérations de communication et des agents du service des fêtes et cérémonies, sont construits pour générer des heures supplémentaires. Le gain annuel net pour un agent peut atteindre plus de 10 000 €.
  • 4)  Le déficit de mutualisation entre les directions est onéreux. Ainsi, la volonté de créer un service de communication interne a entraîné plusieurs doublons, pour une activité réduite. Quatre agents, dont l’actuel directeur des relations publiques, l’ancien directeur des relations publiques nommé sur un emploi de « conseiller technique du protocole », le fils de ce dernier, ainsi qu’un responsable de « l’agenda institutionnel et du protocole », pilotent le protocole.
  • 5)  Le régime indemnitaire (34,3 M€ en 2014) est généreux et la collectivité n’utilise pas les modulations possibles pour l’adapter en fonction de la manière de servir des agents ou pour favoriser les évolutions de carrière. Ainsi, presque tous les attachés bénéficient de la nouvelle bonification indiciaire (NBI), par « coutume », alors que celle-ci est réservée aux agents dont les missions nécessitent des responsabilités ou de la technicité.

Cependant les « passe-droits » dont bénéficient certains agents altèrent l’acceptabilité des économies à réaliser par l’ensemble des acteurs de la collectivité.

1) Certains agents ont bénéficié d’évolutions de carrière contestables. L’absence du rapport de titularisation et l’inexistence des fiches de notation pendant la presque totalité de la période sous contrôle, ne permettent pas de s’assurer de la régularité de la titularisation dont a bénéficié une chargée de communication, également conseillère municipale. En bénéficiant de six avancements de grade en dix ans, dont un sans remplir les conditions réglementaires, et alors que le taux de promotion n’est que d’environ 40 % dans la collectivité, une directrice adjointe a indubitablement vu sa carrière favorisée.

2) D’autres agents, exerçant leurs fonctions au sein des directions des relations publiques et de la communication, bénéficient d’avantages indus, du fait d’un contrôle déficient des absences, notamment par les managers de proximité. Un directeur général adjoint bénéficie d’un logement de fonction de 160 m2 avec une piscine, sans réelle existence d’une nécessité de service. D’autres logements de fonction pour nécessité de service sont accordés de manière irrégulière ou sont attribués à des gardiens rémunérés sans réelles activités formalisées.

3) La situation de certains agents présente des irrégularités dont l’originalité témoigne de la créativité de la collectivité. Ainsi, un ancien agent retraité a assuré pendant douze ans plus d’une vacation par jour ouvré en moyenne, alors que les vacations sont censées répondre à des besoins discontinus.

4) Les logiques familiales sont prégnantes. Ainsi, l’ancien directeur des relations publiques a été le supérieur hiérarchique, directement ou non, de plusieurs membres de sa famille, et des enfants des présidents du conseil départemental successivement en fonctions de 1985 à 2015 figurent parmi les agents du département, parfois en toute irrégularité. La gestion de leur carrière au cours de la période sous revue a également présenté des anomalies. Ainsi, grâce à l’obtention antérieure d’un contrat à durée indéterminée, du fait de l’application irrégulière d’une directive européenne pourtant transposée en droit français quelques jours plus tard, l’un d’entre eux a été nommé, sans aucune publicité, directeur du patrimoine et des affaires immobilières. Un autre occupe un emploi fonctionnel de directeur général adjoint et bénéficie d’une des plus importantes rémunérations, alors qu’il ne gère qu’un agent et que son activité est très réduite depuis 2013, du fait d’un portage hiérarchique insuffisant.

En réponse aux observations provisoires de la chambre concernant ces pratiques, l’ordonnateur s’est « [interrogé] sur le risque de discrédit [qu’elles feraient porter] sur l’ensemble de l’institution ». La chambre souligne que ses observations ne préjugent pas des compétences des agents concernés et invite fermement le département à mettre un terme aux nombreuses pratiques irrégulières relevées et aux interférences familiales ou interpersonnelles constatées dans la gestion des ressources humaines de la collectivité.

Seul fait foi le texte du rapport de la chambre

Il est possible de lire ce rapport définitif dans son intégralité ici : http://www.ccomptes.fr/Publications/Publications/Departement-du-Var-Toulon-Rapport-d-observations-definitives-No-2016-942

LEAVE A REPLY

Please enter your comment!
Please enter your name here

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.