Yves Riesel couacs et contre couacs !

0
Yves Riesel le fondateur de Quobuz

J’avais  pris l’habitude de lire dans l’excellente revue musicale Classica, une sympathique rubrique  appelée Couacs signée Yves Riesel. Dans l’univers feutré et consensuel de la musique classique elle apportait un ton neuf, impertinent, libre, un tantinet provocateur…Elle recensait avec humour et malice les petites manies et manigances du milieu du classique, apparemment un monde de bisounours, en réalité un univers  semé d’embuches, de trahisons, de veuleries, de copinages, de réseaux, de lutte de pouvoir  etc.etc.

Mais voila que soudainement la rubrique a disparu, juste après le confinement. Plus de « couacs ». Le virus ? une plainte ? un soudain revirement éditorial ? des menaces ?

En fait un couac malicieux s’en était pris à une hyper-vedette, le violoniste Renaud Capuçon. Sacrilège de lèse violon !

N’étant jamais aussi bien renseigné qu’en remontant à la source, j’ai contacté Riesel sur les réseaux dits sociaux. Voila une partie de sa réponse  qu’il m’autorise à publier ici.

Il dit : « On peut se faire virer de Classica pour s’être embrouillé avec Diapason ! Surtout quand Renaud Capuçon et ses amis s’en mêlent.

Voici comment :
Il y a une dizaine de jours j’ai publié un post relatif à l’interview-tribune que le site de Diapason avait offert à qui vous avez compris.

Cette personnalité éblouissante du violon français a, chacun l’a constaté, admirablement saisi l’opportunité du confinement et du silence imposé à tant d’artistes et de salles pour travailler à fond ses réseaux promotionnels de toutes espèces : faire vanter son livre, l’inauguration de sa statue au musée Grévin, sa nomination à la tête d’un orchestre de chambre au pays des coffre-fort, ses prestations quotidiennes de « Violin Bonbons » sur Internet, la promotion de l’application NomadPlay dont il est investisseur, sa spiritualité chrétienne d’abord en peau de cosmonaute à Notre-Dame de Paris puis en uniforme Le Quesnoy cool, jeans-baskets en couverture du magazine La Vie (Catholique)…

J’en oublie beaucoup. Au demeurant, il fallait aussi, question de standing, cerise sur le gâteau de ce printemps spécial, que Capuçon soit d’une manière ou d’une autre au menu du Diapason spécial été. »

Résultat ; pour ce texte  Yves Riesel est viré de Classica. Fin de Couac !

Il dit :
« Avec cette chronique Couacs j’avais rêvé un moment : à-côté des chroniques du sérail, que la presse bourgeoise pourrait donc publier les propos d’un type libre, qui connait vraiment ce qui se passe dans les cuisines pour y avoir exercé à peu près tous les métiers du classique. sauf… celui de la connivence… qui y est le plus couru.

Pendant 25 ans j’ai vendu des disques et ensuite pendant 10 ans de Qobuz* j’ai eu cette chance de tout voir des deux côtés dans un confort assez remarquable, sans que ma subsistance en dépende directement : je m’occupais d’apporter à un public intéressé des disques que le milieu français, les Harmonia Mundi, Erato et consorts auraient volontiers tenus confinés à l’étranger.

…Quant à la presse musicale, je l’ai beaucoup arrosée en publicité quand je faisais fortune (!) en vendant Raff, Lyatoshynsky, Louis Aubert, Sergio Fiorentino ou Ida Haendel. Ce n’est pas une question passionnante de savoir si la presse musicale est bonne ou mauvaise : elle est nécessaire, et il faut la soutenir, et j’y ai cotisé. Ce serait à refaire, je le referais.

Mais les magazines musicaux spécialisés ont toujours eu du mal, c’est peu dire, à faire du vrai journalisme . Ils confondent et comprennent le mot « spécialisé » comme « professionnel » à la manière de « Libre-service Actualités », (LSA) cette revue pour les supermarchés qui expose semaine après semaine les dernières trouvailles de l’industrie agro-alimentaire, ne manquant pas de souligner que le packaging de la Vache qui rit a changé le 1er juillet de logo, et se décline désormais en nouvelle version familiale 36 parts de 12,5 grammes chacune. »

« …Les vedettes du classique intouchables ne sont pas la solution magique à la « démocratisation de la musique classique » qui est une mauvaise réponse à une question mal posée. Tout comme les orchestres demos ne sont certainement pas en mesure de remplacer ce que devraient être des écoles de musique bien conçues pour faire aimer la musique à des gamins de toutes sortes, aux destins musicaux les plus variés. » Et vlan recouacs !

En attendant un retour de couac, souhaitons à Yves Riesel**, cet homme libre, de retrouver un espace d’expression à la hauteur de son talent.

* Qobuz est un service de streaming et de téléchargement musical français, fondé en 2007 par Yves Riesel. Qobuz a la particularité de proposer des abonnements d’écoute de musique illimitée en Hi-Res Audio, de l’achat de musique, des articles exclusifs et des playlists. C’est une des plus belles réussites françaises de diffusion de la musique

** https://fr.wikipedia.org/wiki/Yves_Riesel

Jean-François Principiano

LEAVE A REPLY

Please enter your comment!
Please enter your name here

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.