« Trier les malades !» par le Docteur Vincent Carret

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Dr Vincent carret

« Trier les malades !»
IL faut absolument l’éviter et ne pas arriver à ce stade  …

« Trier les malades » est une situation de médecine de guerre et de médecine de catastrophe, exceptionnelle.

Au vu de la gravité des situations et des détresses vitales il est décidé dans ces situations de privilégier le malade qui aura le plus de chance de survivre et de pouvoir bénéficier d’une logique de chaine de secours et de soins.

Le terme de « Triage » est en lui même terrible, d’une violence certaine, sa réalité de terrain encore plus.

On recule cette échéance « terminale » jusqu’au bout du bout, quelque part par déni, par échec, par colère, par refus, surtout quand il s’agit d’une situation dite « exceptionnelle » jamais rencontrée, jamais vécue, hors scène de catastrophe,  c’est à dire en dehors de nos systèmes de soins,  à la porte même ou au sein même de nos hôpitaux.

« Trier » « Choisir » et « Sélectionner » un malade plus qu’un autre sur des critères de gravité clinique est difficile et un moment terrible, le voir imposé pour des conditions économiques et de moyens insuffisants et par défaut, qui ne permettent plus cette égalité des soins pour tous, n’est pas accepté par les femmes et les hommes en blanc.

Nos professions nous habituent souvent au quotidien à un sentiment de profonde solitude, seuls avec nous mêmes. Jamais ce sentiment de solitude et d’abandon qui bousculent les consciences, nos consciences,  n’auront été à ce point violent et refusé au sein de nos équipes à l’approche de ce temps que nous voyons arriver

L’infirmiè(r)e, ou le médecin de ville et d’Ephad qui se verra refuser un transfert vers un service de Réanimation, le médecin régulateur du SAMU qui n’aura plus de place ni d’orientation à proposer à ses médecins Urgentistes de terrain, plus de place à proposer à l’échelle Régionale à un hôpital en demande de transfert vers un service de pointe,  des malades en attente sur les parkings des Urgences et des Hôpitaux par défaut de place, des malades intubés dans les salles de décrochages sans place de Réanimation d’Aval, des malades en attente de décision d’intubation ou pas , des décisions collégiales avec les familles de procédure de LATA ( Limitation et arrêt de thérapeutiques actives / . Loi Léonetti ) , des malades devant faire demi tour faute de places en milieu hospitalier … Vont être les pires situations dans les vies des soignants de France dans les circonstances que nous allons vivre.

Être confrontés, car obligés et sans autre choix, à ces décisions gouvernementales à un niveau de contraintes et de fermeté inédites et jamais vécues, échappent encore à la compréhension et l’insouciance de la gravité de la situation non perçue par nos populations.

Alors redisons le ! «  Il n’y aura pas assez de place en Réanimation, aux Urgences et à l’Hôpital » pour devoir faire face à une vague de 400 000 morts, sans ces mesures gouvernementales strictes ! Sans ces mesures gouvernementales de responsabilités collectives !

«  Nous sommes en guerre » avait répété à six reprises notre Président de la République, E. MACRON , lors de la première vague du Covid, il n’est donc plus étonnant pour personne que cette terminologie de guerre à travers le « Triage » des malades soit au devant de la scène, periode de guerres qui oblige les équipes soignantes de France à devoir assumer plusieurs front en même temps.

Parce que les soignants de France n’ont pas que le front de la Covid à assumer !

N’oubliez pas que derrière la Covid qui polarise toutes les attentions, il y aussi les malades non Covid,  c’est à dire les malades d’urgences habituelles, les maladies chroniques en arrêt de suivi qui se sont aggravées, mais aussi d’autres situations de guerres comme le terrorisme  et les attentats tels que nous le rappellent ces jours les drames et les réalités.

Il n’y a pas que la Covid ! Tous les autres fronts sont ouverts …

Pourrons nous assumer tous ces flux au vu de l’état de désarmement et de sacrifices auxquels nos hôpitaux ont été confrontés et contraints depuis tant d’années ?
L’état de « RUPTURE » atteint par nos hôpitaux et dénoncé par le Sénat dans son rapport de 2017 risque de rappeler dans la douleur ce triste constat à ceux qui en refusaient d’en accepter le principe de réalité.

Là est la question qui hante nos équipes et qui conditionnera la nécessité de devoir « Trier » faute de toute autre solution.

Le confinement et ses contraintes , aussi dures et pénibles soient ils, justifient que l’on ne puisse pas accepter les 400 000 morts annoncés.

Seule la diminution rapide de la pression sur notre système de santé nous permettra d’éviter ce drame, ces drames.

Dr Vincent CARRET
AMUF

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