Pierre-Yves Collombat et l’évasion fiscale

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Après le Panama Papers, vous avez peut être entendu parler du procès d’Antoine Deltour actuellement jugé au tribunal correctionnel de Luxembourg dans le cadre de l’affaire LuxLeaks.

LuxLeaks, c’est quoi ?
LuxLeaks, c’est la révélation en Novembre 2014 de centaines d’accords fiscaux entre le fisc luxembourgeois et des multinationales, confirmant un système d’optimisation fiscale à grande échelle. C’est aussi le nom de l’enquête journalistique menée par l’International Consortium of Investigative Journalism (ICIJ), à partir de ces documents. 548 accords fiscaux montrent l’organisation d’une optimisation fiscale de 343 entreprises avec l’approbation de l’administration luxembourgeoise des impôts. Au moment des faits, rappelons que Jean-Claude Juncker actuel Président de la commission Européenne, était premier ministre du Grand-Duché de Luxembourg (1995 à 2013).

Le volet judiciaire de ce scandale concerne, actuellement et jusqu’au 10 mai 2016, les personnes poursuivies par la justice luxembourgeoise pour avoir fait fuiter les documents ayant permis ces révélations.
Antoine Deltour, ancien salarié du cabinet PricewaterhouseCoopers, est inculpé depuis le 12 décembre 2014 par la justice luxembourgeoise. Il encourt une peine de prison de 10 ans et une amende élevée. L’inculpation est prononcée dans le cadre d’une plainte de PricewaterhouseCoopers à la suite de la diffusion en mai 2012 d’un numéro de l’émission de télévision Cash investigation dédié à l’évasion fiscale des entreprises.
Raphaël Halet également un ancien collaborateur du cabinet PricewaterhouseCoopers avait fait fuiter 16 dossiers concernant des entreprises américaines.
Le journaliste français Édouard Perrin est inculpé à son tour, le 23 avril 2015. Journaliste ayant réalisé plusieurs reportages pour l’émission Cash investigation sur l’évasion fiscale des entreprises, il est accusé d’être le co-auteur des infractions commises par Raphaël Halet.

Bien sûr, aucune compagnie multinationale n’est poursuivie par une juridiction pour évasion fiscale, du fait du caractère légal des dispositifs employés. Cette légalité est cependant questionnée du fait des distorsions de concurrence qu’entrainent ces dispositifs d’optimisation fiscale. Car dans cette affaire, ce qui a été gagné par le Luxembourg, l’a été au détriment des autres membres de l’Union Européenne.

Les faits démontrent que Jean-Claude Juncker était informé de la pratique particulièrement avantageuse de l’administration fiscale luxembourgeoise des tax rulings : cette pratique est exposée dans un rapport de 1997 (rapport Krecké) qui lui était destiné et qui pointait les risques encourus par le Luxembourg en termes de réputation. Jean-Claude Juncker a nié avoir eu connaissance de ces informations dans un premier temps, puis a ensuite dû l’admettre.
Dans le même temps, la directive européenne sur la protection du secret des affaires a été adoptée à une large majorité, jeudi 14 avril 2016, par le Parlement européen, au grand dam de certains citoyens, peu nombreux. Ce texte avait déjà reçu le feu vert du Conseil européen – les vingt-huit pays membres de l’Union européenne. Il devra désormais être traduit dans les législations nationales dans les deux prochaines années.

« Si les journalistes ne peuvent être condamnés pour avoir fait leur travail, alors il faudrait que cela soit expressément écrit dans le texte, or cela ne l’est pas, souligne l’eurodéputé écologiste français Pascal Durand. En France, cela ira peut-être, mais pensez aux médias en Hongrie, en Pologne. » Les Verts réclament désormais une directive spécifique, afin de définir un statut juridique et une vraie protection des vigies citoyennes, au niveau européen.

Dans le Var le Sénateur Pierre-Yves Collombat vient de faire une sortie remarquée au Sénat, n’hésitant pas à rappeler le bon mot de Jean Artuis au sujet de Jean-Claude Juncker quand il présidait l’Eurogroupe : « Il nous fait des leçons de rigueur le matin, puis nous fait les poches l’après-midi avec ses accords fiscaux » c’est pourquoi nous sommes allés à la rencontre du Sénateur du Var pour avec lui, évoquer ce sujet.

Si le Tax justice Network et le mouvement pour l’équité fiscale prennent de l’ampleur à travers le monde c’est que ce système tel qu’on le connait depuis 40 ans arrive en bout de course. Il y a un risque si on n’est pas capables de recréer des règles du jeu, de les faire respecter, de rétablir la transparence et la confiance des citoyens, il y a un risque qu’un jour les citoyens disent puisque ça ne marche pas, puisque la Démocratie ne marche pas, et bien on va choisir autre chose.

En Europe, on peut parler d’Etat-entrepreneur ça porte un autre nom : Le Fascisme. Le fascisme rôde partout en Europe. On le voit en ce moment dans des pays qui ne s’en sortent pas. Parce que les gouvernements, comme en Grèce, n’ont pas su imposer un système fiscal efficace. Dans un marché mondial des capitaux, la souveraineté nationale exige une coopération internationale. Le droit doit changer !
Ces sociétés doivent rendre des comptes sur l’évasion fiscale quel que soit le pays. Comme pour les violations des droits humains, les normes du travail, tout ça doit être international. C’est stupide de penser que ces pays répondront de leurs actes devant la juridiction fiscale d’un seul pays. Il faut vraiment évoluer vers une action planétaire.
La mondialisation sans réelle coopération et coordination fiscale entre les pays est une erreur de parcours qui va être jugée importante avec le temps. Quoi qu’on fasse, il faut toujours protéger le principe de la juste part d’impôt aussi durement acquis au fil des siècles parce que lorsqu’on s’en éloigne c’est la démocratie qu’on met en péril.
En ce qui concerne le pouvoir politique, il y a une énorme concentration de richesses qui échappent à l’impôt accompagnée d’une sur-représentation politique non-imposable de leurs positions. Ils gagnent donc sur tous les fronts. Ils sont citoyens de nulle part pour des raisons fiscales, sur-représentés et non imposés. Nous ne pouvons plus vivre avec cette solution là. En fin de compte le système Offshore, d’optimisation fiscale, d’évasion fiscale quelque soit le nom qu’on lui donne, ce système est un projet des plus riches et des plus puissants du monde, rien de plus.  A n’en pas douter, ils vont toujours soutenir l’existence de ce système.

Le défi est d’amener les populations à résister, à comprendre ce qui se passe et à pouvoir proposer d’autres solutions.

LdG

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