Macron : loin des exigences populaires

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« Je veux qu’en France on puisse travailler et être encouragé dans le travail… » a-t-il dit face à deux journalistes peu complaisants qu’il avait choisi d’affronter. Il n’allait pas dire le contraire. Le problème c’est qu’il encourage surtout la spéculation et les riches en réduisant leurs impôts ( 5 Mds sur l’ISF), en laissant filer l’évasion fiscale -Macron préfère le mot « optimisation »- en transférant les cotisations sociales sur la CSG augmentée de 1,7% et payée par de très nombreux retraités modestes (au-dessus de 1200 euros/personne) qui voient leur pouvoir d’achat sérieusement écorné. Merci leur a-t-il dit, sans complexe !

Il entend les colères mais il ne les approuve pas et n’en tient aucun compte, à moins que les mobilisations qu’il suscite ne deviennent incontournables. Il demande aux impatients qui protestent et agissent, d’attendre qu’il ait mis ses « réformes » en place.

Il a été élu pour ça rappelle-t-il. Pas vraiment. Il a été élu parce qu’une majorité de Français (es) a fait barrage au FN. Il n’a aucune majorité sur son programme présidentiel. Mais son élection est légitime, donc c’est son programme qu’il applique…mais sans majorité sauf à l’assemblée nationale ce qui lui permet d’imposer ses choix et de limiter la contestation. Pas de la museler.

Ce qui explique qu’il n’y ait pas de consensus sur des contre-réformes qui nous font reculer de plus d’un demi siècle et qu’il qualifie de modernes !

Moderne, la réduction de 5 mds de l’impôt sur la fortune (alors que les grandes fortunes flambent) et, en même temps, de réduire les APL des plus pauvres ? Au moment où les 40 plus grandes sociétés du CAC 40 ont fait 93,6 Mds de profits en 1917 (+26,5%) ?

Moderne..de contraindre les Offices d’HLM à prendre les APL à leur charge, à se regrouper, à ne plus pouvoir faire face à l’entretien des immeubles, à vendre des logements, à réduire leurs programmes de construction et de rénovation ?

Moderne…de prélever 10 Mds sur les collectivités territoriales et de les pénaliser si elles augmentent leurs budgets de fonctionnement de plus de 1,2% ? Comment maintenir les services publics locaux ?

Moderne de vendre le patrimoine public de l’État et de privatiser ce qui peut rapporter gros, en supprimant ce qui rapporte moins ou ne peut rapporter parce que relevant d’un service public qui n’a pas forcément vocation à être bénéficiaire (écoles, hôpitaux…) mais relève de l’accès à tous et de l’égalité entre les territoires ?

Moderne de s’en prendre au statut des cheminots, puis demain à celui de la fonction publique, puis à la sécurité sociale, puis à notre système de retraites ? Ces statuts, c’est à tous les salariés (es) qu’il faudrait les étendre si l’on voulait faire oeuvre progressiste ? Plutôt que de vider le code du travail de ses avancées sociales et précariser l’emploi.

Mais Macron n’est pas là pour ça. Il est là pour enfermer notre économie dans la mondialisation capitaliste. Donc, comme ses prédécesseurs, pour effacer de notre histoire sociale toutes les avancées qui ont fait de la France un modèle social en Europe et dans le monde. Il en reste encore quelques traces.

Une autre vision de la société
Sa feuille de route c’est de poursuivre le processus engagé il y a plus de trente ans avec une pause de 1981 à 1983, par tous les gouvernements de gauche en France dominés par les forces politiques de droite et de gauche acquise au libéralisme et à l’idée qu’il n’y pas d’alternative. Les mêmes qui nous ont entraînés dans la construction européenne qui a « oublié » les peuples pour satisfaire les exigences de profits des multinationales.

Résultat : les inégalités se sont creusées, les très riches sont encore plus riches, les pauvres les précaires et les chômeurs encore plus nombreux sous l’effet des politiques d’austérité. D’où le rejet légitime des citoyens à l’égard des gouvernements de droite et de gauche social-libérale et la montée d’une extrême-droite partout en Europe, récupérant une partie des mécontents et promettant le repli nationaliste et identitaire comme réponse à la crise profonde du capitalisme qu’elle ne conteste pas !

Depuis le traité de Rome en 1957 on peut dire merci à tous nos présidents, partisans du traité de Maastricht et de celui de Lisbonne, entr’autre. Macron ne voit toujours de salut que dans une Europe fédérale où les Etats seraient contraints d’accepter encore plus de transferts de pouvoirs sous prétexte, comme il l’a évoqué, d’harmoniser les fiscalités et les lignes rouges à ne pas dépasser. C’est pour ça qu’il protège le secret des affaires !

Mais qui donc a inventé les paradis fiscaux et « l’optimisation fiscale » ? Le système capitaliste pour fuir la transparence sur l’origine des fonds et des patrimoines. Ils ne sont pas prêts de l’abolir.

Le programme de Macron est en parfaite harmonie avec les exigences du capital qui ne peuvent pas coïncider avec les intérêts du travail. Il veut nous faire croire le contraire et nie la lutte des classes, bien entendu, au moment où, dans son propre camp, certains alertent sur les excès de profits, de hauts salaires et de privilèges qui alimentent les saines colères populaires admettant de moins en moins d’être mises à contribution alors que s’étalent autant de masses d’argent entre quelques milliers de mains !

Macron ne considère le travail que sous l’angle de son utilité à créer du profit pour les actionnaires qu’il veut attirer par le dynamisme retrouvé. La crise serait-elle finie ?

Outre que le travail existe en dehors des circuits marchands -c’est le cas des service publics- mais pas seulement, du travail associatif bénévole…Dans le privé, les salariés(es) ne sont pas propriétaires de leur outil de travail. Ni co-propriétaires. Il est question de leur donner quelques strapontins dans des conseils d’administration. En aucun cas le pouvoir de décision sur les finalités de la production, sur la gestion, sur la destination des profits bruts (rcherche, investissement, distribution aux actionnaires). Seraient-ils inaptes ?

Ce sont toujours les actionnaires qui décident, y compris de leurs dirigeants, de leurs salaires, en fonction de ce qu’ils retirent eux-mêmes ou pas. Les salariés n’étant qu’une variable d’ajustement. Les primes, parfois importantes mais aléatoires, n’étant qu’un moyen pour qu’ils ne revendiquent pas trop, alors que ce sont eux qui produisent les richesses.

On peut même les jeter, comme à Carrefour, tout en faisant du profit, selon la stratégie de l’entreprise. C’est même assez courant.

Le besoin de changer de cap
Quant aux banques, toutes privées, même les banques centrales sont indépendantes du pouvoir politique…mais très proches. Elles gèrent sans le moindre contrôle…que leurs conseils d’administration dûment choisis. Pourtant elles vivent des dépôts des citoyens et des entreprises.

Maîtriser la finance, le crédit, la monnaie, ce n’est pas au programme de l’ex-directeur de la banque Rothschild, devenu président de la République. Il connaît le système et il y tient..

Toujours avec le sourire aux lèvres, proche de l’arrogance de celui qui a réponse à tout, il a compati à la grande misère des hôpitaux pour promettre…qu’il ne baissera pas les dotations ! Mais c’est qu’il faut revoir très à la hausse les budgets de nos hôpitaux, il ne va pas rassurer les personnels, soignants et non-soignants ! Ni les dissuader d’agir.

Il a concédé qu’il fallait revoir la tarification à l’acte (de Mme Bachelot), la limiter dans un premier temps. Concernant les EHPAD il a promis des investissements et la création d’un 5ème risque de protection sociale en plus de la maladie, de l’accident, de la famille, de la vieillesse. Attendons pour voir. Pas pour agir contre toutes les régressions en cours.

Il n’aura sûrement pas fait tomber les colères qui s’expriment, de toutes celles et ceux qui sont engagés dans la défense de leurs intérêts, de leurs acquis, d’une certaine conception de la société, des services publics qu’il faut développer et moderniser, de l’université qu’il faut rendre accessible à tous, du logement social à privilégier tant il y a de demandes, de quartiers sensibles à désenclaver, de solidarités à construire autour de nous et par l’accueil des migrants.

Mettre en échec les projets de Macron, c’est indispensable. Pour penser plus loin la société dont nous avons besoin et que nous pouvons construire, pas seulement en rêver.

René Fredon

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