L’ancien collaborateur de Chirac et de Raffarin investi dans la réforme-Fillon des retraites de 2003 avant de devenir PDG de GDF et en 2006, président de la branche française du leader mondial américain des fonds de pension, BlackRock… a été élevé au rang d’officier de la légion d’honneur le 1er janvier !
Voilà qui déclenche un tollé aussi large que celui qui a conduit JP Delevoye à la démission. Ce dernier avait omis de rappeler quelques liens avec les assureurs, grands pourvoyeurs des fonds de pension très intéressés par l’épargne-retraite et son développement comme retraite par capitalisation.
Jean-François Cirelli est fier d’avoir crée le PERP, plan d’épargne et de retraite populaire, né avec la réforme Fillon qui portait à 62 ans l’âge d’une retraite pleine. Ce plan d’épargne et de retraite bloque les sommes que l’épargnant verse…jusqu’à l’âge de la retraite. Il faut avoir épargné beaucoup et longtemps pour une rente difficilement calculable et des intérêts annuels très bas placés en obligations. Vous avez dit « populaire » ?
Cette « innovation » va s’éteindre en octobre 2020 et sera remplacée par le PER qui n’est plus »populaire » mais qui se veut plus performant. Déjà en vente depuis octobre 2019 et présenté comme « un produit de préparation à la retraite » qui se dit plus souple, crée par la loi PACTE, plan d’action pour la croissance et la transformation de l’entreprise que pilote Bruno Lemaire. Loi destinée à renforcer les systèmes de retraites par capitalisation.
D’où la proximité du PDG de la branche française du géant américain qui gère 7 000 milliards de $ de fonds de pension, près de trois fois le PIB français (2 400 Mds d’euros) ! D’autant que Cirelli a des relations étroites avec le pouvoir et les milieux d’affaires. Tous des amis de longue date. Le PDG américain Larry Fink a été reçu par Macron en juillet, en même temps que la branche française faisait parvenir au gouvernement une note très explicite sur l’intérêt qu’elle porte à la réforme des retraites…et à la loi Pacte.
Une note de 15 pages qui n’est pas passé inaperçue. Elle expliquait, en préambule, « pourquoi il était si important de répondre aux comportements et aux préoccupations des épargnants français. Le gouvernement devrait, en relation avec des acteurs privés, mettre en place différents outils unifiant les différents volets de la réforme des retraites. Le gouvernement a donc besoin de sanctuariser ces règles associées au dispositif sur le long terme. »(1) (2)
Au moins ça a le mérite de la clarté. Qu’on ne nous dise pas qu’un tel groupe de pression qui a ses entrées permanentes à l’Élysée comme à Matignon et au MEDEF ne serait d’aucune influence sur des dirigeants issus du même sérail et partageant exactement les mêmes idées libérales qu’ils camouflent derrière des formules qui se veulent rassurantes : « mais voyons c’est pour sauver notre système par répartition… » disaient aussi Balladur, Chirac, Raffarin, Juppé, Sarkozy, Hollande avant Macron !
Aussi crédible que le loup de la fable déguisé en grand’mère pour attirer le petit chaperon rouge.
Mettre en valeur un tel dirigeant d’entreprise privée leader mondial, donnant dans le démarchage des assureurs et des banquiers pour spéculer avec les fonds bloqués des épargnants, c’est tout un symbole ! Et c’est organiser la concurrence en faveur de la capitalisation.
En plein conflit social d’ampleur historique contre un projet gouvernemental qui prétend « être plus juste et de progrès social »! en même temps qu’il légifère pour renforcer la collecte de l’épargne dédiée à la capitalisation , c’est de la provocation.
René Fredon
