Le département très sévèrement épinglé par la CRC

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La préférence familiale et les passe-droits n’en sont qu’un des nombreux aspects. Le rapport définitif de la chambre régionale des comptes sur la gestion du département à partir de 2009 ne va pas faire que des heureux.

Pour l’ancien président, Horace Lanfranchi, une pleine page de VM, pour dire « qu’il n’y avait rien d’extraordinaire dans ce rapport qui n’est qu’une inspection comme il y en a tant. Seulement des appréciations… » Les lecteurs -car chacun y a accès- apprécieront. (file:///C:/Users/Ren%C3%A9/Downloads/PAR2016-942%20(2).pdf)

Le même jour où la Cour des Comptes rendait son rapport sur la gestion des comptes de l’Etat, très critique à l’égard du gouvernement, tv83 publiait la synthèse du rapport d’observations définitives de la Chambre régionale des comptes sur la gestion du département de 2009 à 2014. L’intégralité de ce rapport avait été communiquée au président Marc Giraud, nouvel ordonnateur le 9 février 2016 ainsi qu’à son prédécesseur .

Comment qualifier un tel rapport si ce n’est d’ACCABLANT ?
Quatre vingt dix pages d’observations -le mot est faible- mais la CRC n’est pas un tribunal bien qu’elle puisse, comme le préfet et le procureur, saisir la justice si ses observations et recommandations, après réponses et dialogues avec les ordonnateurs, lui paraissent par trop restées lettres mortes et susceptibles de sanctions administratives, voire pénales.

La synthèse publiée ne donne qu’une faible idée d’une situation financière qualifiée de « préoccupante » du département, ce qui est le lot de tous les départements de France, où les transferts de compétence de l’Etat vers les collectivités territoriales amorcés depuis fort longtemps, se sont accélérés au point de mettre en péril la gestion de toutes les collectivités. Car les transferts de recettes de l’Etat ne couvraient pas le coût des compétences transférées.

Ce qui est propre au Var, géré depuis trente ans par la même majorité de droite, c’est qu’après avoir bénéficié d’un accroissement spectaculaire de sa population (1 030 355 habitants), donc du nombre de ses contribuables, les ressources du département lui donnaient une grande aisance financière, une capacité très large d’auto-financement qui limitait d’autant le recours à l’emprunt.

Mais ce qui est propre à la droite, d’Arreckx à Giraud en passant par Falco et Lanfranchi, c’est qu’elle a organisé ces transferts de compétences et de charges (Loi de 2004, acte II de la décentralisation) destinée à réduire les déficits publics, les dépenses de l’Etat, accélérant la privatisation des services publics. Et elle persiste dans cette orientation. Par idéologie.

Ce n’est pas ce que lui reproche la CRC qui n’a pas vocation à porter de jugement politique. Elle se détermine par rapport à la légalité des décisions et à leur conformité avec les décisions prises au niveau de l’Etat après le vote des parlementaires, censés agir dans l’intérêt des citoyens.

Ainsi, par exemple, lorsque la CRC recommande d' »établir des  pièces justificatives…conformes à la nomenclature comptable… »et contrôlables, c’est que tel n’est pas le cas et que cela peut induire des pratiques…contestables, pour le moins.

Ou encore (recommandation 4) : »supprimer les emplois inadaptés aux besoins et les rémunérations sans fondement juridique… » cela veut dire que la gestion des ressources humaines cache quelques anomalies pour ne pas dire beaucoup sur lesquelles l’institution de contrôle ne saurait fermer les yeux. Les « homonymies », pour ne pas dire la préférence familiale, ont fortement attiré l’attention.

Nous nous proposons de nous arrêter sur un seul exemple qui fait l’objet de 4 pages (23, 24, 25, 26) du rapport complet : l’exemple du contrat de partenariat sur les collèges.

Nous gardons en mémoire la réaction de Christian Barlo, au nom du groupe communiste de La Seyne, le 25 mars dernier, qui dénonçait ce contrat de partenariat public-privé choisi par le conseil départemental pour la reconstruction, la rénovation de trois collèges à Carcès, Saint-Raphaël et La Seyne. (TV83 Tribune libre du 27 mars 2016 : http://www.tv83.info/2016/03/27/conseil-departemental-finances-publiques-mises-a-mal/ )

Il montrait que ce choix, prétendûment pour ne pas alourdir la colonne Emprunts, se traduirait, au terme du contrat de 27 ans, par un triplement du coût initial Pour 60/70 millions d’investissement, 174 millions au bas mot, de remboursement ! Beaucoup plus cher qu’un emprunt à taux fixe pour les contribuables. Bonne affaire pour les banques. Cela ressemble même à du détournement d’argent public.

Coïncidence, c’est pour ce même chef d’accusation que Marc Giraud avait été placé en garde à vue, il y a un an, le 22 juillet 2015, puis en examen, peu après son élection comme président de l’assemblée départementale, mais pour des faits se rapportant à son mandat de maire de Carqueiranne. Le dossier est toujours pendant.

Il a cru bon de justifier la décision prise par son prédécesseur concernant le contrat PPP (partenariat public-privé). Voilà ce qu’en dit la CRC : « il ressort des débats du 27 juin 2014, que l’assemblée délibérante n’a pas été informée que la passation d’un marché (MOP : maîtrise d’ouvrage publique) aurait, en réalité été moins onéreuse de 10,5 millions d’euros que le recours à un contrat de partenariat. » (Ceci en caractères gras dans le rapport)

Il est également souligné que l’argument du moindre risque d’un contrat sans concurrence (le financier choisi censé prendre les risques ?) n’est ni étayé ni convaincant :  « la meilleure compétence des entreprises en contrat n’est pas démontré » écrit la CRC qui s’appuie sur la Cour des comptes qui relève que « les hypothèses à priori favorables au contrat de partenariat, biaisent les évaluations préalables. »

Elle mettait en exergue la situation financière « dégradée » et invitait les élus à l’assainir pour s’assurer de pouvoir réaliser un tel projet? Mais ce n’est pas tout : « une étude sur la soutenabilité du projet…n’a pas été transmise aux élus.  » Le chef a toujours raison. Vive la transparence ! Quant aux contribuables, « ils nous ont élus pour six ans…on a leur confiance…qu’on nous laisse travailler. » Air très connu dans le Var.

« En adoptant le principe du recours à ce partenariat le 7 juillet 2014, les élus ne disposaient pas d’une analyse de son impact sur la situation financière »  note la Chambre régionale des comptes qui conteste les motivations du recours à ce PPP.

Il n’y avait aucune urgence, montre-t-elle, à rénover ou reconstruire ces collèges vieux de 40 ans, « dont les travaux étaient prévisibles… » la réponse du nouveau président prête à sourire : « la hausse des effectifs et leur vétusté (des collèges, pas des effecifs !) justifiaient l’urgence ??

La CRC écrit que « la collectivité a été conduite à invoquer ses propres défaillances pour justifier l’urgence…comme elle est à l’origine de la complexité qu’elle invoque. » (p.26)

Conlusion de ce chapitre : « Le choix du contrat de partenariat, le plus coûteux, apparaît comme étant incohérent  au regard de la situation financière du département. »

Sans commentaire… mais avec des suites compte tenu de la…richesse d’un tel rapport.

René Fredon
Journaliste e.r

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