Campagne mobilier anti-sdf « La pauvreté n’est pas un crime »

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Campagne mobilier anti-sdf « La pauvreté n’est pas un crime »

Au-delà des discours sécuritaires développés à travers l’Europe, nous observons trois tendances particulièrement inquiétantes au regard des droits humains :

  • la criminalisation des activités quotidiennes des sans-abri dans l’espace public, affectant directement leurs stratégies de survie,
  • les obstacles administratifs ou juridiques à l’accès aux services sociaux de base, qui les privent de leurs droits fondamentaux,
  • une volonté, à peine cachée, de les rendre invisibles (exclusion spatiale, emprisonnement,…).

L’abrogation des délits de mendicité et de vagabondage en 1992 aurait dû contribuer à la lutte contre l’exclusion sociale et la stigmatisation de la pauvreté en France. Toutefois, l’on voit que de plus en plus de maires usent de leur pouvoir de police pour prendre des arrêtés « anti-mendicité », « anti-glanage », « anti-bivouac »… et pénaliser ainsi une catégorie spécifique de la population qui se retrouve dans ces situations par nécessité.

Après avoir retiré les bancs des rues, on s’assure maintenant d’empêcher les SDF de dormir/s’allonger dans les stations de métro…

Les comportements visés : le maintien prolongé, en position assise ou allongée, de personnes ou d’animaux ; les quêtes et interpellation des passants dans le but de solliciter leur générosité sur les voies et lieux publics (places, marchés, parcs, jardins publics, aux abords des terrasses, des feux tricolores, des cathédrales) ; le bivouac ….

Derrière ces phrases types, sont visées les personnes SDF, jeunes en errance, personnes n’ayant pas suffisamment de ressources pour satisfaire leurs besoins fondamentaux (nourriture, logement, hygiène).

Les arrêtés permettent d’établir une contravention et une amende allant jusqu’à 38 €. Ils orientent l’activité policière vers des contrôles réguliers et systématisent l’évacuation des personnes de certaines zones de la ville. Il s’agit de leur interdire certains quartiers, les plus fréquentés, touristiques et/ou commerciaux, durant la période estivale ou des fêtes de Noël, notamment. Les transports n’y échappent pas : le stationnement et la mendicité y sont également illicites .

Les procédés « anti-sdf » : le design et le mobilier urbain, privé et public, participent à cette exclusion. Usant de moyens divers et variés, leur fonction est tout autant répulsive : clôture d’espaces propices à l’installation et dans lesquels les SDF peuvent s’abriter (renfoncements couverts ou non, porches aux pieds des immeubles, arcades…) ; retrait des bancs, installation de banquettes en quinconce, penchées en avant, pour empêcher de s’allonger ou de s’installer trop longtemps ; grands pots de fleurs, galets et pierres à l’entrée des immeubles sur les trottoirs, plots et pics le long des magasins et banques ; grillage sous le métro, demandes de réaménagement de grilles de chauffage urbain, fermeture et réaménagement des squares, parcs et jardins…

On notera que ces dispositifs ont aussi pour conséquences de ne pas être utilisables par le citoyen « lambda » , voulant se reposer ou s’arrêter quelques instants !

Sanctionner, arrêter, expulser les sans abris ne résout rien
La collectivité a le devoir de respecter et de permettre la dignité de la personne humaine. Il ne s’agit pas d’exclure mais d’inclure, non plus de punir mais de soutenir et d’aider nos concitoyens les plus fragiles à recouvrer une dignité. La criminalisation des actes basiques de la vie quotidienne des sans-abris violent leurs droits humains et atteignent à leur dignité. Elles accentuent l’exclusion de personnes, déjà très fragilisées.

Elle est inacceptable et inefficace : elle rend les sans-abri invisibles en les cachant du grand public, sans offrir de solution réelle pour régler le problème de la pauvreté. Elle est inapplicable : comment demander à un sans-abri de payer une amende parce qu’il dort dans la rue ? Pire, elle ne fait que déplacer le problème et reporte les solutions structurelles que la puissance publique se doit de mettre en place pour mettre fin au sans-abrisme.

Pour les associations, il importe d’aller à la rencontre de personnes en difficulté, à la rue, sans qu’elles se sentent menacées, sans entraver le lien que cherchent à établir les maraudes, les accueils de jour, les centres d’hébergement, les associations d’aide au logement et leurs équipes qui travaillent quotidiennement à trouver une réponse digne à chaque situation rencontrée.

Les structures d’accueil ne doivent toutefois pas devenir d’autres lieux de relégation, en n’offrant aucune perspective aux personnes accueillies, mais être le moyen de sortir de la spirale de la rue.

Mesdames et Messieurs les élus, en facilitant l’intervention et le travail social, en favorisant l’implantation de structures d’accueil et d’accès aux droits dans vos communes, en investissant dans le logement… vous participez à la mobilisation de solutions adaptées, non violentes, sécurisantes, humaines et dignes.

Jean-Paul JAMBON
Correspondant Départemental VAR Fondation Abbé Pierre

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