Brexit : Pour aller où ?

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Le vote majoritaire des britanniques pour sortir de l’Europe traduit une condamnation de l’UE, de sa politique d’austérité comme de son fonctionnement technocratique, de sa surdité à entendre les peuples, leurs souffrances, leurs aspirations. Comme en France avec la loi-Khomri qui répond aux orientations européennes dictées par la finance et le patronat réunis.

Mais ce vote traduit aussi une montée des peurs devant la question des migrants comme si c’était eux la cause des choix politiques économiques et sociaux dévastateurs qu’infligent ses dirigeants très libéraux majoritairement à droite depuis des decennies, rejoints en Allemagne et en France, notamment, par les socio-démocrates assumant leur virage libéral. Quitte à se saborder.

Il est assez évident que le Brexit exprime cette peur alimentée depuis des mois, des années par ses propres dirigeants, sa presse bien-pensante comme le grand quotidien britannique « Daily Mail » tirant à plus d’un million d’exemplaires, propriété d’un fonds alimenté par les 100 plus grandes entreprises anglaises ?

Le correspondant du « Monde », Philippe Bernard, constatait, une semaine avant le référendum que ce tabloïd et beaucoup d’autres tentaient d’en faire un référendum pour l’arrêt de l’immigration comme condition de la remise en ordre de l’économie, « une obsession martelée depuis des décennies par la presse populaire tabloïd et qui paraît s’être enkystée chez les électeurs britanniques ».

Lundi 13 juin, le Daily Mail a fait sa manchette sur « le complot destiné à faire entrer 1,5 million de Turcs en Grande-Bretagne », quatre jours après avoir mis à la « une » : « Le double meurtrier albanais qui a vécu 18 ans dans ce Royaume-Uni aux frontières ouvertes. »Pour le correspondant du Monde, rares sont les interviews de rue sur le référendum où ne surgit pas une expression telle qu’« “ils” sont trop nombreux », presque toujours introduite par une excuse de type « J’adore l’Europe, mais… ».
L’ancien maire de Londres, Boris Johnson, qui a conduit la campagne du « out », manie la même rhétorique : « Comment pouvons-nous contrôler l’immigration…? »

En aucun cas, ces forces les plus rétrogrades n’ont considéré que l’impopularité de l’Europe qui est un phénomène évident partout, on l’a vu, en France en 2005, aux Pays-Bas, en Irlande et ça n’a fait que s’aggraver, ce rejet de l’UE découle de ses politiques d’austérité, de son mépris des peuples, de ses objectifs au service de la finance, contre les peuples : déréglementations, délocalisations, dumping social, concurrence déloyale, salariés déplacés, TAFTA, privatisations, précarité, droits des salariés revus à la baisse, comme leurs salaires et leurs retraites…

Mais ces forces ultralibérales, rejointes par l’extême-droite, oublient de préciser que ce sont elles, à travers les partis conservateurs qui les mettent en oeuvre et qui voudraient récupérer le mécontentement populaire qu’elles ont elles-mêmes crée !

Ce faisant elles ouvrent un boulevard aux extrêmes-droites européennes qui brandissent ces mêmes « arguments » au nom du « patriotisme identitaire » fondé sur le rejet des étrangers fuyant la guerre et les dictatures !

En réalité cette montée des populismes en Europe n’est qu’une version encore plus autoritaire, plus anti-sociale, xénophobe que le capitalisme ne craint pas de promouvoir pour dévoyer les aspirations légitimes derrière des slogans identitaires de repli nationaliste qui prennent le pas sur les questions sociales et démocratiques.

A commencer par Cameron qui avait brandi le premier la menace d’un référendum pour sortir de l’Europe, devant ses pairs de Bruxelles qui l’en avait dissuadé.

Il devait se présenter ensuite en « vainqueur » avant de devenir un partisan du maintien. Il voulait encore plus d’austérité et d’autorité de l’Europe dans le sens de favoriser le business, pas d’améliorer le sort des plus pauvres et de réduire les inégalités entre pays.

Ni lui, ni Johnson, ni les ténors de l’extrême-droite n’ont parlé -et pour cause- de ces réalités sociales qui les accusent comme elles accusent le libéralisme à l’oeuvre en Europe, dans tous les pays, et dans le monde en pleine effervescence. Car, cela commence à se savoir : les profits des multinationales ont battu des records ces dernières années, la fraude fiscale aussi, comme les scandales en tous genres (Panama papers et paradis fiscaux).

Leur crise, qu’ils nous font supporter, vient de ce que leurs actionnaires exigent toujours plus alors que la masse des capitaux qui circulent ne trouve plus autant de débouchés, vu que notre  pouvoir d’achat se réduit. Ils se battent aussi entre eux. Mais c’est toujours nous qui payons.

Autrement dit sortir de l’Europe si c’est pour ne pas sortir des politiques d’austérité et les voir s’aggraver, n’est pas LA réponse magique qui va la faire changer de nature et répondre aux aspirations populaires.

Priorité aux questions sociales et environnementales, pas à la finance mondialisée !

Pour le PCF, Il faut changer d’Europe par la gauche, la vraie, pas celle qui a trahi les espoirs de ses électeurs en enfilant les bottes de la droite.

Nous pouvons ouvrir une perspective sociale, démocratique, écologique, de solidarité entre les peuples, de coopérations respectueuses de la souveraineté de chaque nation, animée d’une volonté de paix en Europe et dans le monde.

Il faut pour cela en finir avec la dictature de la finance et reconstruire une Europe qui soit une union de peuples libres, de nations souveraines et associées pour un développement durable et partagé, ouverte sur le monde, faisant de l’éducation, de la formation et de la culture la clé de notre développement et de notre épanouissement individuel et collectif.

Les forces existent. Ils ont les milliards, nous sommes des millions à pouvoir construire cette Europe des peuples. Par notre rassemblement, nos luttes sociales et politiques avec en France une étape d’importance : 2017.

René Fredon

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