Le malaise est tel que l’été 2022 sera l’été de tous les risques et de toutes les craintes pour les Urgentistes et les Hospitaliers de France partout sur nos territoires !
Sans aucune surprise , au vu et au su de tous, le système des Urgences en France est à la Rupture.
Personne ne doit être surpris ni même scandalisé tant les messages d’alertes et de mise en garde depuis trop longtemps avertissaient l’opinion publique et inondaient les médias.
Tout le monde savait !
120 Services d’Urgences / SAMU et SMUR partout sur nos territoires ne sont plus en capacité de fonctionner « normalement » pour cet été 2022 . Ils ferment , se mettent en procédures dégradées, de Tri et de sélection des malades , ou s’y préparent.
On n’écrit pas dans une démarche « Ultime » et de « dernier recours » au Procureur de la République de sa ville par insouciance, par hasard ou par dépit, par renoncement et abandon mais par devoir de responsabilité et d’inquiétude et d’espoir d’un sursaut général!
Les Services d’Urgences Adultes et Pédiatriques, Centre 15 de Régulation, et SAMU-SMUR font régulièrement la « Une » des médias. Poussés à la limite sans cesse reculée pour devoir assumer seuls les renoncements, les démissions, et les transferts de responsabilité que plus personne ne veut assumer, ils sont poussés régulièrement à la faute.
Alors qu’ils sont de plus en plus dans le « ROUGE » et débordés dans les limites du raisonnable et la maîtrise des flux, on continue à les pousser dans le « ROUGE » et encore plus à la faute.
« Méfiez-vous nos métiers de passion sont destructeurs, ils usent et finissent par anéantir chacun d’entre nous. Prenez garde ! » telles étaient les paroles de nos Anciens patrons et Chefs de Services charismatiques et « vieux sages » des plus expérimentés !
Pour ne pas avoir voulu voir ou refuser d’assumer 30 ans de politiques de Santé abandonnées aux lois du Marché qui était une « folie », par lâchetés, par cynisme, par mépris et pourrissement des alertes de terrain et donc par irresponsabilité collective, nous en sommes arrivés à la rupture d’un système.
Cette rupture aujourd’hui atteinte impose un devoir de vérité pour tous et d’arrêter de mentir et de nous mentir.
Non ! les Services d’Urgences ne peuvent plus continuer à être la « soupape de sécurité sanitaire et sociale » et le point de renoncement et de démissions de notre société. Ils ne peuvent plus être la variable d’ajustement des dysfonctionnements tant vis à vis de l’Amont que de l’Aval hospitalier.
De cet état de rupture atteint et annoncé de longue date et des enjeux humains qui en découlent , il appartient aujourd’hui à ceux qui « Responsables de rien et protégés de tout » et qui se cachaient derrière nos équipes d’Urgences de prendre leur responsabilité pour devoir enfin définir devant la Nation les missions efficientes et prioritaires recentrées sur le coeur de métier qu’il appartient de décider pour les Services d’Urgences de France.
Le législateur et la loi doivent sortir les Services d’Urgences de ce « non limite de flux » qui leurs sont imposés et définir clairement le contenu de leurs missions. Le flou actuel voulu mais non assumé par personne ne le permet pas ! Pire il en valide de fait toutes les dérives, l’usure des équipes et la perte de sens du monde Soignant.
Cet état de rupture qui est atteint en cette veille d’été 2022 des plus critiques et jamais vécus , annonce et préfigure dès à présent un profond changement des comportements de société à venir qui devra être décidé eu égard les habitudes et les dérives d’un système de Santé parvenu à bout de souffle ….
Au-delà des services d’Urgences SAMU SMUR , et Centre 15, c’est l’ensemble de notre société, les pouvoirs législatif et exécutif en première instance, les élus, les citoyens et acteurs de Santé qui vont devoir, tous ensemble, repenser et reconstruire.
Pour ne pas avoir su et voulu relever les défis, par défaut de pensées politiques et de capacité de projection, notre système est parti dans le mur, les malades et leurs soignants avec !
Tout le monde savait ! Tout le monde fermait les yeux.
D’un cri d’alerte qui se voulait préventif et de raison : « Il faut arrêter de faire n’importe quoi avec les services d’Urgences de France » non entendu et ignoré , nous sommes parvenus en cette veille d’été 2022 à ce qui constitue un début de « Crash » sanitaire jamais vécu. Partout les équipes sont en équilibre précaire et instable et bien plus fragiles que ce que l’on imaginait.
Pour maintenir le plus possible « la tête hors de l’eau » à la plupart des équipes des organisations dégradées de TRI et de sélection des malades voient jour, ailleurs les services ferment ou disparaissent parce qu’ils n’arrivent plus à assumer ni gérer le « sans limites » et l’indifférence de tous.
De ces défis oubliés et refusés il appartiendra au pouvoir législatif de vite repenser et de réorganiser en extrême urgence la Santé d’Amont mais aussi celle de l’Aval des Urgences pour garantir aux patients « le bon soin au bon moment, au bon endroit ». Aujourd’hui, ce n’est plus le cas !
La Santé est annoncée bien tardivement dans une prise de conscience obligée comme étant devenue un chantier prioritaire pour le quinquennat à venir.
Pourquoi ne l’a-t-il pas été avant est la question que tout le monde se pose ?
Parce que ce défi s’inscrit en toute logique dans le domaine de la responsabilité collective , il appartient aux pouvoirs législatif et exécutif d’en prendre enfin toute la dimension et la hauteur des enjeux et des conséquences
Marcel GAUCHET face à Natacha POLONY dans Marianne interroge comme toutes et tous parmi nous : « On se demande si ceux qui nous gouvernent savent ce qu’ils font ? »
Dr Vincent CARRET
AMUF