VIH : un deuxième cas de rémission dans le monde

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L’information a fait la « Une » des journaux et chaînes de télévision : un deuxième cas de rémission d’un patient atteint du VIH a été officiellement annoncé ce mardi, lors de la Conférence annuelle sur les rétrovirus et les infections opportunistes, à Seattle. Une rémission qui intervient plus de dix ans après un premier cas confirmé, celui du « patient de Berlin ».

Il s’agit cette fois du « patient de Londres », qui n’a plus de virus détectable depuis 19 mois. Mais pour en arriver là, les deux patients ont subi des transplantations de moelle osseuse, pour traiter des cancers du sang. Ce patient, comme le premier, a reçu des cellules souches d’un donneur porteur d’une mutation du gène du CCR5, qui n’est présente que chez 1% de la population mondiale… et qui empêche le virus de pénétrer dans les cellules hôtes.

Pour comprendre l’importante de cette information, nous avons interrogé un spécialiste, le Dr Alain Lafeuillade, chef du service d’infectiologie au Centre Hospitalier Intercommunal de Toulon-La Seyne et auteur d’un ouvrage sur le SIDA, « Un médecin ne devrait jamais dire ça »

TV83.info : Cette annonce remet-elle en cause les thérapies actuelles ?
Dr Alain Lafeuillade : « Il s’agit d’une avancée dans la compréhension des facteurs déterminants qui ont permis, il y a 10 ans, d’obtenir la guérison du « patient de Berlin », mais cela reste une deuxième exception qui ne remet pas en cause les trithérapies actuelles. Car réaliser une greffe de moelle osseuse est un exercice périlleux qui ne peut s’envisager qu’en présence d’une affection maligne : une leucémie aiguë pour le patient de Berlin, une maladie de Hodgkin disséminée pour ce dernier patient anglais. Il n’est déjà pas facile de trouver un donneur de moelle compatible (les pré-requis sont les mêmes que pour une greffe d’organe), et il est exceptionnel de trouver un donneur compatible qui, en plus, n’exprime pas le co-récepteur CCR5 . Ce deuxième cas de « guérison », avec plusieurs mois de recul sans rebond de la charge virale, avec un virus indétectable dans les cellules  et une séropositivité qui s’amoindrit, met en lumière le rôle important du co-récepteur CCR5. »

TV83.info : Quel rôle joue le gène du CCR5 ?
Dr Alain Lafeuillade : « Pour infecter et tuer les cellules orchestres de la réponse immunitaire, ce qui entraîne l’immunodépression, le VIH a besoin du récepteur CD4 sur ces cellules ET d’un co-récepteur, soit CXCR4, soit CCR5. Sans quoi, il ne peut pas pénétrer la cellule et la tuer. Ce récepteur est donc une « clé » pour les recherches à venir. »

TV83.info : La procédure utilisée pour ces deux patients peut-elle être étendue à d’autres patients infectés par le VIH-1 ?
Dr Alain Lafeuillade : « La procédure de transplantation de moelle osseuse est lourde et ne peut s’appliquer qu’à des patients qui ont une maladie cancéreuse. Elle est aussi aléatoire car les donneurs compatibles qui n’expriment pas le co-récepteur CCR5, du fait d’une mutation dans leurs gènes, sont exceptionnels, comme nous l’avons dit. Néanmoins, ce deuxième cas nous apprend qu’une seule greffe de moelle suffit et qu’une irradiation corporelle totale n’est pas indispensable.
En pratique, ce second cas démontre le rôle prépondérant du co-récepteur CCR5, et devrait relancer des études chez les patients VIH utilisant des enzymes capables de stopper l’expression du CCR5 sur les cellules CD4. »

Nicole Fau

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