Professions règlementées. Les varois en colère.

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de gauche à droite : Maitre François Coutelier, Bâtonnier du Barreau de Toulon, Bernard Babau, Président des Huissiers du Var, Maitre Remi Claudot, Vice Président de la Chambre des notaires du var, Maitre Michel Bain, Président de la Chambre des notaires du Var, Maitre Lionel Escoffier, Bâtonnier du Barreau de Draguignan, Maitre Sylvain Palenc, notaire.

PROJET DE LOI MACRON : le vote doit commencer le 26 janvier 2015.
Le projet de loi que présente Emmanuel Macron n’est pas seulement une loi pour le travail des dimanches mais également sur l’activité des 37 professions réglementées (Notaires, Huissiers, Pharmaciens, Avocats…). Les Notaires travaillent du lundi au samedi et parfois le dimanche. La déréglementation du notariat aura des conséquences lourdes pour tous les français.

Suite à la première manifestation des Notaires en France du 17 septembre dernier, cette mobilisation a permis de sauver dans le projet de Loi le maintien des actes authentiques (ventes immobilières, contrats de mariage, successions…). Pour rappel, d’après l’ordonnance du 2 novembre 1945, les Notaires sont « Officier Public », missionnés par l’État pour recevoir tous les actes et contrats auxquels les parties doivent ou veulent faire donner le caractère d’authenticité. Ils représentent ainsi l’autorité publique pour en assurer la date, en conserver le dépôt, en délivrer des copies exécutoires.

Les Notaires ont manifesté une deuxième fois avec les autres professions juridiques le 10 décembre 2014, du jamais vu en France. Comme c’est l’usage, le Conseil d’Etat avait examiné le projet de Loi Macron avant qu’il soit présenté en conseil des ministres le 10 décembre dernier.

En ce début d’année, le vote de la loi Macron doit commencer le 26 janvier prochain. Les sages du Conseil constitutionnel s’apprêtent donc à étudier la constitutionnalité de la loi Macron, aussitôt qu’elle sera votée par le Parlement.

Pour rappel, les Notaires sont les garants des principes fondamentaux d’équilibre des contrats, de prévention des conflits et de preuve des droits de chacun d’entre nous lors de l’acquisition d’une propriété ou de sa transmission. La pratique apaisée du droit mise en œuvre quotidiennement par les Notaires se traduit par un très faible taux de contentieux (1 pour 1000 en France contre 1 pour 3 en droit anglo-saxon) et participe à la maitrise du budget de la justice (0,6% du PIB en France contre 2,6% aux USA).

Les Notaires sont bien dans le collimateur de la loi Macron. Elle remet en cause le mode de fonctionnement de ces officiers publics ministériels. Le Conseil supérieur du notariat a pris connaissance, sans surprise, du rapport de l’Autorité de la concurrence. Commandé par Arnaud Montebourg qui entendait rendre 6 milliards d’euros aux français, prétention aussitôt abandonnée par son successeur Emmanuel Macron, ce rapport examine les professions réglementées du droit, dont le notariat, sous le seul prisme du droit de la concurrence et sous une influence ultra libérale qui heurte le caractère social du tarif des Notaires.

Or, le droit n’est pas une marchandise. Le service public de l’authenticité assuré par les Notaires de France ne se résume pas à des considérations tarifaires.

En l’état la Loi Macron, c’est la mise en place de nouveau tarif des actes : Les actes dits les plus onéreux financent les actes rédigés à perte. Les frais de Notaire comportent en réalité plus de 85% de taxes, taxes que l’état a augmentées au mois de mars 2014 et pérennisées par la Loi de finances rectificative de 2014. La rémunération représente moins de 1% du prix d’achat du logement. Les Notaires sont tarifés par décret pour la quasi-totalité des taches qu’ils accomplissent et s’engagent auprès des clients en signant avec eux tous les actes. La libéralisation des tarifs des actes, d’autres ont essayé et ils ont eu des problèmes notamment les Pays-Bas – résultat : les tarifs ont augmenté pour les actes les plus faibles et les clients les moins aisés, à l’inverse de l’intention du gouvernement de redonner du pouvoir d’achat à la population ce qui est pure démagogie et illusion.

Si ces tarifs sont modifiés, cela aura un impact sur la santé financière des études mises à mal avec la crise économique (baisse de 40% des ventes immobilières dans le Var en 2013) et donc le maintien des emplois dans celles-ci. Une rémunération moindre, c’est le risque d’entreprises notariales fragilisées avec pour conséquence immédiate des licenciements de près de 25 % des effectifs et une mise à mal de la trésorerie des caisses de retraites et mutuelles.

Cette déréglementation entraînerait une suppression de 10 000 à 12 000 emplois en France.

C’est aussi faire passer au second plan les « petits » actes, « choisir » ces dossiers, rendre payant le conseil jusqu’alors gratuit… et rendre plus difficile l’accès au droit des plus modestes.

En l’état la Loi Macron, c’est la liberté d’installation contrôlée qui est prônée

pour permettre un accès louable plus grand à la profession. Cependant le risque est de voir poindre des installations dans des zones géographiques les plus porteuses économiquement et voir s’installer une désaffection des zones qui le sont moins. On parlera alors de désert juridique. L’exemple de la médecine est frappant à cet égard. Où sera l’égalité de chacun pour l’accès à l’information, l’accès au droit… ? Les collectivités territoriales auront beaucoup à perdre, car pour beaucoup d’entre elles, les Notaires sont un « sachant », un accompagnateur dans leurs projets d’aménagement, d’urbanisation… le droit privé, le droit du contrat est de plus en plus présent pour ces collectivités et leurs interlocuteurs naturels sont les Notaires.

Par le maillage territorial, les Notaires assurent un service juridique et la possibilité de dresser des actes pour tous les citoyens et collectivités territoriales.

En l’état la Loi Macron, c’est permettre l’exercice de la profession sous forme de société dont le capital serait détenu par d’autres que le ou les notaires en exercice et notamment par des banques et des fonds d’investissements étrangers ; où seront l’indépendance et l’impartialité véritable « ADN » du notaire ? Ne doit-il pas dans l’exercice de sa profession l’impartialité et le conseil désintéressé ? La délégation de service public dont il est porteur est-elle compatible avec une gestion comptable et capitalistique de son outil de travail ? C’est rendre marchandise cette délégation et c’est affaiblir la puissance publique. Le consommateur pourra-t-il être certain alors que le conseil qui lui a été donné sera le plus juste et le plus approprié à sa situation ?

L’ouverture aux capitaux extérieurs du capital social des études : c’est la marchandisation du droit et surtout de la justice que les Notaires rendent tous les jours dans les offices et elle est contraire à la volonté que prône le gouvernement qui nous ment une fois encore.

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