Après le 13 novembre, la peine est immense devant les souffrances des victimes, de leurs familles et de leurs amis. Le devoir de tous les citoyens est maintenant de veiller à ce que de tels actes odieux ne puissent se reproduire. Mais la fin justifie-t-elle les moyens?
La France est maintenant soumise à un état d’urgence qui pourrait durer au moins jusque fin Février et compte tenu du climat actuel et de la surenchère politicienne, il est fort à parier que certains élus pousseront pour que cet état d’urgence s’inscrive dans la durée.
Parmi d‘autres mesures, les Préfets peuvent par exemple :
-restreindre la liberté d’aller et venir (…) ;
-interdire le séjour dans certaines parties du territoire à toute personne susceptible de créer un trouble à l’ordre public ;
-réquisitionner des personnes ou des biens privés ;
-interdire certaines réunions publiques ou fermer provisoirement certains lieux de réunion ;
-autoriser des perquisitions administratives en présence d’un officier de police judiciaire ;
Ainsi, pour les motifs les plus divers et sans contrôle préalable de la justice, plusieurs dizaines de millions de personnes pourront :
- voir la police entrer chez elles de jour et de nuit afin de perquisitionner leur lieu de travail ou leur domicile et prendre une copie du contenu de leur ordinateur ou de leur téléphone mobile ;
- être assignées à résidence si leur comportement constitue « une menace pour la sécurité et l’ordre public » et se voir interdire d’être en contact avec d’autres personnes présentant la même menace ;
Il est regrettable que la douleur et la colère puissent faire le lit d’un climat de surenchère sécuritaire inquiétant. Il paraît nécessaire de rappeler en cette période le danger de mettre à mal nos libertés fondamentales qui devraient être garanties par l’État de droit.
Craignons l’engrenage que nous avons connu en France lors de la guerre d’Algérie (17 Octobre 1961, Charonne…) et constatons que la loi Prism aux USA n’a malheureusement pas empêché les attentats à Boston.
C’est pourquoi nous devons bien réfléchir à l’instauration de l’état d’urgence et ses conséquences. Demandons que l’indispensable lutte contre le terrorisme ne laisse pas la porte ouverte à une extension des pouvoirs de l’État sans aucune garantie judiciaire. Comment comprendre 24 assignations à résidence pendant la COP21, opposants au Grand Paris, opposants à l’aéroport de Notre Dame des Landes, opposants au barrage de Sivens, opposants à la LGV Lyon Turin, opposants à la LGV Paca sont devenus de fait des cibles sous le prétexte qu’ils pourraient être une menace pour la sécurité et l’ordre public ? Où va-t-on ?
Laurent di Gennaro
