Logements effondrés : Après le drame, des responsabilités à établir

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À Marseille, deux immeubles effondrés lundi, rue d’Aubagne, les corps de 6 personnes retrouvés deux jours plus tard, deux immeubles contigus démolis mercredi, qui menaçaient de s’effondrer…le bilan est lourd et la population logée dans des logements anciens, insalubres et indignes, se demande si elle ne court pas d’énormes risques…

Curieusement absent jusque là, le maire Jean-Claude Gaudin est sorti de son silence pour tenter de reprendre la main et de dégager sa responsabilité, celle de la ville concernant l’état des immeubles et la menace que certains pourraient présenter pour leurs occupants, que ces logements soient publics ou privés.

Il a rappelé « les efforts de la ville pour démolir, reconstruire, réhabiliter et réduire l’habitat indigne et reloger des milliers de Marseillais depuis les vingt dernières années… » ce qui n’était pas vraiment le sujet même si les élections approchent. Pas plus que « la complexité, le coût et la longueur des procédures ».

La question que posent de tels drames ne concerne pas que Marseille. Le lendemain, à Charleville-Mézières que venait de quitter le président de la République, un immeuble du centre-ville s’effondrait, ne faisant aucune victime. 19 occupants des immeubles voisins ont dû être évacués par précaution. A Toulon, dans le quartier St Roch, le plafond du 108, rue Coulmiers s’est écroulé mardi soir. 18 occupants ont été pris en charge par la ville et conduits au gymnase du Port-Marchand.

Foncia, le syndic de l’immeuble, après visite sur place concluait à « l’absence de risques à court terme » pour les occupants des deux appartement du 4èmè sous les plafonds. Ils ne l’entendent pas de la même oreille faisant état d’une récente expertise d’il y a 15 jours qui assurait que le bâtiment ne présentait aucun risque !!!

Après ces quelques exemples, le gouvernement s’empressait de désigner 14 immeubles prioritaires en France (?) qui seraient en situation d’insalubrité. Seulement 14, cela prête à sourire. Il ne s’agit pas seulement d’insalubrité, d’habitat indigne que ne cessent de signaler la fondation Abbé Pierre, le DAL, la CNL et de nombreuses autres associations…mais d’immeubles en état de péril et encore habités, dans les quartiers pauvres, ce qui n’est pas une coïncidence mais un fait établi et pas depuis hier, lourd de signification.

Pour le chargé d’études de la fondation Abbé Pierre « à Marseille, c’est l’incurie générale. Depuis des années les rapports s’accumulent, les drames se succèdent et rien n’évolue…c’est toute la question de l’habitat qui pose question : comment fait-on pour répartir les logements sociaux et très sociaux ? Où investit-on ? La métropole d’Aix-Marseille dont la création récente a été imposée par l’Etat, est connue comme celle qui fonctionne le plus mal, avec des phénomènes de clientélisme, d’égoïsme municipal, de concurrence larvéd entre les communes. Le résultat est l’abandon à leur sort de populations entières dans ces quartiers d’habitat privé qu’on appelle du logement social mais qui sont en fait de quasi-taudis. »

De récents rapports font état d’un nombre d’immeubles marseillais de l’ordre de 42 000 qualifiés « d’indignes » soit 13% des résidences principales, c’est énorme.

« Vivre dans un immeuble insalubre, c’est risquer sa vie, ne pas être en sécurité, se dire que l’immeuble peut prendre feu au moindre court-circuit ou fuite de gaz ou qu’un plafond peut s’effondrer. C’est une angoisse quotidienne. Au delà de la sécurité il y a l’humiditié et les moisissures qui attaquent les systèmes respiratoires et la peau, surtout chez les enfants…et puis il y a le froid et toute la question de la précarité énergétique.Tout cela contribue à l’isolement social, à la honte, à un sentiment de saleté dans ces logements impossibles à bien nettoyer, on y dort mal, y vivre c’est épuisant au quotidien. »

Cela ne fait-il pas penser, quand on n’est Toulonnais, à une co-propriété particulièrement dégradée, à Poncarral dont la dangerosité et la dégradation sautent aux yeux ?

De son côté le fondateur du DAL, JB Eyraud a tenu à rappeler que « c’est au maire de surveiller le bon état des immeubles, à Marseille aussi et que sa responsabilité pénale est engagée car il y a eu défaillance et quand il y a nécessité, le maire peut et doit se substituer aux propriétaires… »

En même temps que la solidarité s’organise à Marseille, la colère et l’inquiétude gagnent les occupants de logements en mauvais, voire très mauvais état, au seuil de l’hiver, à commencer par les familles qui ne retrouveront plus leur logement et qui se demandent combien de temps elles devront attendre pour être relogées…dignement.

Les fortes pluies de ces derniers jours ne sauraient servir d’explication à la pénurie de logements sociaux accessibles à tous et d’atténuation de la responsabilité de la ville en matière de vigilance sur l’état des immeubles et sur la sécurité des personnes qui les habitent.

René Fredon

 

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