Les Restaurants du cœur : Dépasser le chacun pour soi

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En ces premiers jours d’août, l’air du temps est aux vacances, au farniente, à la gaudriole… Pourtant dans le var nous sommes allés à la rencontre des bénévoles des Restaurants du cœur qui ne baissent pas les bras et ne prennent pas de vacances … depuis 37 ans !

Créés en France par Coluche en 1985 Les Restaurants du cœur ont pour but d’aider et d’apporter une assistance bénévole aux personnes démunies, notamment dans le domaine alimentaire par l’accès à des repas gratuits, et par la participation à leur insertion sociale et économique, ainsi qu’à toute action contre la pauvreté sous toutes ses formes.
Ça fait donc 37 ans que l’État se défausse sur des bénévoles. 37 ans que l’État n’a pas trouvé le moyen d’endiguer ce phénomène dans la 7è puissance économique mondiale.
Comparaison n’est pas raison mais en 2008 quand il a fallu sauver une dizaine de banques, en une semaine … le pouvoir politique a trouvé 40 milliards. Comprenne qui pourra.

Explosion du nombre de pauvres en France
Sans surprise, avec la crise économique engendrée par la crise sanitaire, le nombre de pauvres explose en France. Sur ce phénomène national vient se greffer la crise migratoire d’Afrique, du Moyen Orient et maintenant de l’Ukraine.
Pas de statistiques officielles, l’INSEE publie ses chiffres avec près de deux années de décalage. Les chiffres officiels du nombre de pauvres en France en 2022 seront donc publiés en 2024 !
Selon France transaction le nombre de Français sous le seuil de pauvreté*1 en 2022 est estimé à près de 12 millions, soit 18.46% de la population française.
Il va sans dire que Les Restaurants du cœur sont en première ligne et c’est pour mieux comprendre ce qui se passe actuellement sur le terrain que nous sommes allés à la rencontre des bénévoles.

21 centres varois
Dans le Var comme ailleurs, les bénévoles sont des gens qui ont une bonne dose d’altruisme pour prendre l’engagement de venir à heure fixe pour être à l’écoute de ceux qui ont poussé la porte du centre. Dans un centre varois qui ne souhaite pas être nommé ni localisé, ils sont une vingtaine de bénévoles au service d’environ 400 personnes. Pour eux, il faut assurer une logistique qui ne laisse rien au hasard. Le lundi et le mardi il faut assurer la réception des dons qui proviennent du fonds européen et des grandes surfaces des environs pour assurer une distribution le mardi après-midi et le jeudi après-midi. Depuis le début 2022 se sont plus de 6 000 repas mensuels qui ont été distribués pour ce seul centre.
Ceux qui en bénéficient sont des gens qui sont en dessous d’un barème calculé par les Restaurants du Cœur. Barème qui prend en compte les ressources du bénéficiaire moins les dettes, moins les charges fixes. Il n’y a donc pas un profil type et cette situation peut concerner n’importe qui d’entre-nous, personne n’étant à l’abri d’un accident de la vie. Autant dire que tous ceux qui pourraient y avoir droit n’en sont pas bénéficiaires. Nombreux sont ceux qui n’ont pas trouvé le courage de pousser la porte. La honte, la perte d’une sociabilité convenue sont autant de freins pour ces gens qui ne sont pourtant coupables de rien.
S’il y a un domaine où le discours dérange plus que tout autre, c’est probablement celui de la misère, où la société reste souvent confinée au registre de l’assistance et de la charité, sans véritablement s’attaquer au fond du problème.

Misère sans frontières
Lors de notre visite dans un des centres, nous avons rencontré Kiki une bénévole de Ceuta ville autonome espagnole sur la côte nord de l’Afrique, où elle vient en aide (à Ceuta) à ceux qui ont traversé le continent dans l’espoir d’une vie meilleure, ailleurs.
Pour Kiki la situation ne peut se lire qu’à l’international. La crise migratoire ne peut se comprendre sans le prisme de la démographie pour ce qui concerne l’Afrique subsaharienne et le Maghreb.
Exemples : le Nigéria pays africain du golfe de Guinée, malgré une production de pétrole importante et une économie diversifiée, le pays demeure relativement pauvre, notamment en raison d’une forte corruption. Le Nigéria comptait 45 millions d’habitants en 1960, 206 millions en 2020 et 211 400 704 en 2022.
L’Érythrée dirigée par Isaias Afwerki, adopte une attitude répressive et autoritaire, notamment via le service militaire à durée indéterminée (6,5 ans en moyenne), qui provoque un mouvement d’émigration important et aboutit à plusieurs descriptions du pays comme une « prison à ciel ouvert. L’Érythrée en 1960 comptait 1 million d’habitants et en 2019 : 3 700 000.
Selon les prévisions du Fonds monétaire international (FMI), le taux de chômage devrait continuer à augmenter en Algérie (44 616 700 habitants) dans les prochaines années. Ainsi, le pourcentage de la population sans emploi passera de 14,86 % en 2022 à environ 17 % en 2024 pour atteindre 19 % en 2026.

Dans de telles conditions comment ne pas comprendre ceux qui partent dans l’espoir d’une vie meilleure, pour échapper à un conflit armé, à une catastrophe naturelle ou à des persécutions. Pour ces personnes, la migration est douloureuse car elle représente un arrachement à leur pays, à leur langue, à leurs proches.
Comment ne pas le comprendre ? Pourquoi se borner à raconter qu’ils viennent uniquement pour bénéficier de nos aides sociales ?
Ces chiffres à eux seuls nous font comprendre que renvoyer chez eux les migrants par charters est irréalisable, s’il n’est pas simplement indigne de ceux qui en font un objectif.

Laurent di Gennaro

 

*1 Le seuil de pauvreté est fixé par convention à 60 % du niveau de vie médian de la population. Il correspond à un revenu disponible de 1 102 euros par mois pour une personne vivant seule et de 2 314 euros pour un couple avec deux enfants âgés de moins de 14 ans.

2 COMMENTS

  1. et si l’on évoquait la situation dramatique des SdF en cette période de canicules
    Combien de fois faudra t-il rappeler que l’été est pour eux…et elles plus dur que l’hiver et que plusieurs SdF sont déjà décédés ces derniers jours dans l’aire toulonnaise, sans bruit et sans medias!!
    on héberge l’hiver au thermomètre négatif, mais rien pour ces situations climatiques extrêmes chaudes

  2. Je suis bien d’accord sur ce constat, au restos du cœur il y a une maraude sur Toulon hiver comme été.
    Malheureusement nous ne sommes pas nombreux. Il y a aussi le SPF la Croix rouge…

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