Droit au logement opposable (DALO) : Il régresse alors que les besoins explosent

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Selon le rapport (1) remis le mardi 13-12-16 à la ministre du Logement, le droit au logement opposable ( DALO) est limité par l’offre insuffisante de logements sociaux disponibles.

Ainsi, alors que la crise du logement s’aggrave, le nombre de ménages reconnus au titre du droit au logement opposable (Dalo) diminue sur l’ensemble du territoire et particulièrement dans les 14 départements visités, dont le Var, les Alpes Maritimes et les Bouches-du-Rhône !
Marie-Arlette Carlotti, présidente du Haut comité pour le logement des personnes défavorisées et du Comité de suivi de la loi Dalo en fait le constat à l’issue de sa mission d’évaluation dans ces 14 départements.
Le nombre des ménages qui ont fait l’objet d’une décision favorable est passé de 32.473 en 2013 à 25.593 en 2015. Soit un taux national  tombant de 44,9% en 2008, à 28,63% l’année dernière.
Le rapport met en cause « une interprétation de plus en plus restrictive des critères de la loi par les commissions de médiation (2) chargées d’étudier les dossiers». Le droit au logement opposable a de plus en plus tendance à être accordé au regard de l’offre de logements disponibles et non en fonction de la situation des ménages.
Rien d’étonnant, cela découle directement de l’explosion du chômage, de la précarité qui se généralise ainsi que du manque de logements sociaux aux loyers accessibles. Car même dans le parc public, l’augmentation des loyers et des charges ne permet pas d’accueillir ces populations. A plus forte raison dans le parc privé.
Ce déficit de logements sociaux traduit un manque évident de volonté politique et de moyens budgétaires de la part de l’Etat mais aussi des collectivités territoriales, du moins de celles qui freinent des quatre fers pour sélectionner les populations les plus aisées au détriment de celles qu’elles ne souhaitent pas accueillir, socialement défavorisées.
Il n’y a qu’à voir les chantiers ouverts à Toulon pour se faire une idée de la destination des logements qui se construisent dans de nombreux quartiers. La part des logements sociaux y est très minoritaire. Plus encore celle des logements très sociaux, les programmes locatifs aidés  d’intégration (PLAI), ceux justement qui manquent aux destinataires du dispositif Dalo.  Cette loi de 2007 est, en soi, une avancée tendant à reconnaître le droit à un logement pour chacun comme fondamental.
Les naufragés du DALO
A l’appui du zèle des commissions de médiation -qui ne sont pas à l’origine de la pénurie de logements sociaux- une lettre d’un récent préfet du Var a été citée, dans laquelle il félicite les membres de la commission de médiation d’avoir «su respecter les instructions préfectorales données», faisant baisser le taux de décisions favorables à 22% contre 50% sur les années précédentes ! Un record national.
La ministre du logement a promis d’alerter les préfets pour que cela s’arrête et qu’on puisse « atteindre en 2017 plus de 120.000 ménages Dalo relogés » Plus tôt aurait été beaucoup mieux. Comme de penser aux associations sous-représentées dans les commissions de médiation, pour mieux défendre les intérêts des plus modestes. Il n’est jamais trop tard.
Le Dalo a été instauré par la loi du même nom, votée en mars 2007, qui stipule que toute personne menacée d’expulsion et n’étant pas en situation de se reloger par elle-même peut être reconnue prioritaire pour l’accès à un logement social. Si la loi Dalo «a permis de faire accéder plus de 103.000 ménages à un logement», la commission souligne qu’il existe toujours 57.000 ménages «naufragés du Dalo» en attente d’une proposition de logement depuis un à sept ans. Dans le Var, la moyenne d’attente est de 30 mois.
Les taux de décisions favorables qui étaient ici de 58,2% en 2012, n’étaient plus que 42,2% en 2013 pour atteindre 24,3% en 2014 et 22% en 2015 (moyenne nationale 28,63%). Belle performance en effet, encore un effort et  il n’y aura plus de demande, plus de problème, tout le monde sera supposé au chaud !
Même « performance » pour les ménages éligibles au Dalo : 1639 en 2013, il n’y en avait plus que  722 en 2014 et 658 en 2015. On est efficaces dans le Var. Le stock diminue sans que celui des logements sociaux augmente ! Où sont-ils donc passés ? Ils on dû gagner le gros lot. Quel est ce phénomène qui a brusquement permis un tel miracle : assécher la demande des plus mal logés ?
Vite la recette ! Hélas, un préfet qui vous dit en substance : « n’en retenez pas trop, soyez plus sévères, on ne saurait pas où les loger, le Var est à la traîne avec la loi SRU, beaucoup de maires préfèrent  payer les pénalités, d’autant qu’on n’est pas très exigeants ! » On l’est plus avec les pauvres, c’est vrai.
Et quand on sait que nombre de ménages ne savent pas ou ne font pas la démarche pour exercer ce droit, on a de quoi s’interroger sur l’ampleur de ce problème social tout à fait prioritaire…sauf dans la pratique.
D’autant que les préjugés ne manquent pas sur ces populations en grandes difficultés dont on laisse facilement à d’autres le soin de s’en occuper, notamment aux associations caritatives éminemment précieuses mais qui ne peuvent résoudre tous les problèmes, sanitaires, matériels, humains. Pas plus que les services sociaux trop souvent débordés.
Du coup la sévérité des commission de médiation se traduit par des recours par dizaines de milliers, avec souvent des pénalités à la charge de l’Etat qui n’a pas tenu ses engagements. Et même des recours devant la Cour de justice européenne !
Et il en est qui veulent encore tailler dans les dépenses sociales, de santé, d’éducation, de protections, d’habitat, de transport, de sécurité…, bref de services publics qu’ils veulent livrer à la gestion privée à visée lucrative ! Mais où va-t-on, sinon vers plus d’inégalités, d’injustices et de fracture de la société  ?
Ce n’est pas une raison pour être dupe des bonnes résolutions du pouvoir actuel, très tardives, qui ne masqueront pas ses propres carences en la matière et que révèle la situation décrite par ce rapport.
Malgré le caractère positif de la loi DALO, le déficit de logements sociaux ne se résorbe pas. Il s’aggrave. Ce qui n’exonère pas les autres acteurs : élus territoriaux notamment, non pas dans leur globalité mais concernant celles et ceux qui sont aux responsabilités depuis des décennies dans nos 3 départements qui se trouvent dans le peloton de tête des plus mauvais bâtisseurs sociaux.
René Fredon

1http://www.logement.gouv.fr/IMG/pdf/l_effectivite_du_droit_au_logement_opposable_rapport.pdf

2. Commissions de médiation : composition
.Trois représentants de l’Etat nommés par le préfet
.Un du département désigné par le président du CD
.Un des EPCI (établissements publics de coopération intercommunale
.Un des communes
.Un des organismes HLMs
.Un des organismes intervenant en faveur des personnes défavorisées
.Un des organismes gestionnaire d’hébergements transitoires
.Un représentant des associations de locataires
.Deux d’associations d’insertion par le logement
.Une personne qualifiée qui assure la présidence
avec voix prépondérant en cas d’égalité

Tous sont nommés par le préfet pour 3 ans ainsi que leurs suppléants (es)

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