Cohn-Bendit au secours de Macron

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Le trublion de 68 reconverti dans l’écologie, ancien député européen d’EELV qui fut à sa création, n’avait pas hésité à rallier Macron dès le premier jour. Il vient de se fendre d’une tribune dans le JDD du 28 avril, en compagnie d’un autre ancien député européen, Jean-Paul Besset sous la même bannière, pour nous dire tout le bien qu’ils pensent de la liste « Renaissance de la république en marche » que conduit Nathalie Loiseau.

L’urgence environnementale nécessitant, à leurs yeux, « l’abandon du confort de toutes les  certitudes. » Ils préconisent de construire « un pôle central écologique… » après les européennes. Sans doute pour mieux faire oublier qu’ici, en France, la transition écologique n’est pas vraiment au centre des préoccupations du gouvernement cher à la cause qu’ils prétendent défendre.

On vient encore d’en prendre la mesure lors des conclusions du « grand » débat tirées par Macron lui-même qui n’a pas jugé la situation alarmante…sans doute ?

Cohn-Bendit vient combler les manques : tout le monde est devenu écolo, nous dit-il, tellement la gravité de la situation est évidente. Il y a huit mois il disait qu’elle était minoritaire dans la société ! (1) L’heure n’est pas aux querelles de chapelles mais au rassemblement des bonnes volontés : idéologies, droite-gauche, conservateurs-progressistes, religieux-laïques…tout cela est dépassé. Air connu.

« Si la société tout entière ne s’empare pas de l’enjeu, le changement espéré n’aura aucune chance de se produire ». À l’évidence. Mais pourquoi donc les décisions prises par les décideurs de réduire l’utilisation et l’extraction des énergies carbonées, notamment, parmi tant d’autres causes des pollutions qui nous pourrissent l’air, l’eau, la terre, les océans, les espèces vivantes…ne se concrétisent pas ? Mieux, elles compromettent les objectifs, selon l’opinion des scientifiques ?

« Jamais on a autant pollué la planète que depuis l’accord de Paris… » a rappelé Nicolas Hulot ce 28 avril au 20 h de France2. Et pourquoi donc a-t-il quitté ce gouvernement si efficace, selon l’ami Dany qui était mieux inspiré dans sa tribune collective dans le même JDD du 1er septembre 2018 ? « Hulot s’est brisé sur l’iceberg du conservatisme et du court-termisme »(2). C’était au lendemain de son départ.

Comment Hulot a-t-il pu croire que « le modèle économique dominant -comme il l’appelle-pourrait changer sa finalité, sa nature et ses objectifs ? Trump en fournit l’exemple le plus lourd de conséquences en décidant de sortir de l’accord de Paris sur le climat de 2015, pourtant peu contraignant. Alors que les États-Unis sont l’un des deux plus gros émetteurs de G.E.S avec la Chine (le premier, par habitant). Ces deux pays totalisent à eux deux 40% des émissions mondiales !

Et aujourd’hui Cohn-Bendit, conseiller spécial de Macron, nous vante « le dynamisme et le réalisme » de sa politique écologique plombée par la première puissance devant laquelle la France et l’Europe du fric s’inclinent, tellement les économies sont imbriquées, les intérêts privés aussi qui n’investissent pas dans le long terme ! Et qu’on subventionne de nos deniers.

Il balaie les critiques d’une de ses phrases aux accents populistes : « pas de place pour les polémiques qui entretiennent les clivages chez les nostalgiques du monde ancien« . L’écho de Macron, la voix de son maître qui, comme chacun sait, est censé défendre l’intérêt général en toutes circonstances, n’a pas de parti-pris idéologique, n’appartient à aucun courant de pensée ???

Bref, il serait au-dessus des classes sociales dont il nie la réalité mais, en revanche, les riches -c’est donc une classe- il faut les ménager car ce sont eux paraît-il, qui investissent, accumulent, spéculent (surtout) et feraient ruisseler les richesses : tel est le discours complètement démagogique que nous sert, en creux, Cohn-Bendit qui croit encore donner le change de l’impertinence et du bon sens réunis.

Qui d’autres que les tenants du productivisme à tout va, à la recherche des profits privés maximum dans le moins de temps possible, gèrent cette société inégalitaire autant qu’autodestructrice ? Elle répond au doux nom de « libérale », elle est directement et fondamentalement responsable des errements écologiques, de choix qui se poursuivent au grand jour, comme aux États-Unis, locomotive du capitalisme dans le monde, ou, dans d’autres pays qui tiennent des discours dilatoires tout en restant alignés sur le plus fort qui les tient par le dollar et l’OTAN. Ils dissimulent des réalités dont ils minimisent ou feignent d’ignorer les conséquences quotidiennes et à court terme.

Il est vrai qu’il n’y a pas de solutions miracles, surtout si les peuples restent sous l’emprise des marchands et des financiers qui verrouillent les pouvoirs économiques et monétaires, les normes sociales et environnementales par gouvernements interposés. Et à tous les niveaux.

C’est justement l’un des enjeux majeurs des Européennes, le 26 mai, de mobiliser les peuples pour qu’ils se donnent des élus qui associent les urgences écologiques et les urgences sociales. Il n’y a aucun consensus possible entre les politiques libérales et les aspirations populaires. Encore faut-il l’exprimer, faire le bon diagnostic et faire payer les pollueurs et les très riches, il y a largement de quoi redresser la barre. Déjà les citoyens se mobilisent, agissent au plan local. Heureusement.

Ce qui est en jeu, c’est une autre répartition des richesses produites par le monde du travail -et pour cela de nouveaux droits à conquérir- une autre vision de la société que le consumérisme et la surproduction de ce qui rapporte le plus, tandis que persistent le sous-développement, la précarité, la mal-vie et la misère trop souvent, y compris en Europe.

En même temps qu’une autre manière de produire mieux qui soit enfin compatible avec le respect de notre environnement. La prise de conscience d’aujourd’hui est prête à se concrétiser en prise de décisions. C’est ce que réclament notamment les jeunes générations qui s’investissent dès maintenant au plan local tout en jetant les bases du monde qui succédera à l’ancien qui se délite sous nos yeux.

René Fredon

Crédit photo Le parisien.fr

(1) https://www.europe1.fr/politique/cohn-bendit-hulot-sest-decourage-un-peu-vite-3742256

(2) https://www.lejdd.fr/Politique/pour-cohn-bendit-orphelin-durand-et-besset-hulot-sest-brise-sur-liceberg-du-conservatisme-3745208

(3) https://www.sudradio.fr/politique/ian-brossat-meme-quand-nattend-rien-de-macron-est-decu

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