Marivaux au Liberté : le triomphe du bon théâtre.

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Dans une ville qui n’a pas toujours été un grand lieu de culture et dont l’histoire artistique reste objectivement très moyenne, le renouveau, on pourrait dire le réveil ou mieux l’éveil culturel de qualité est un phénomène à souligner.

Certes l’Opéra qui assura et continue d’assurer le socle culturel de base, Châteauvallon qui est né d’une volonté, quelques expériences théâtrales qui ont été courageuses, un Conservatoire actif, un cinéma d’Art et d’Essai , un Festival de musique (et son concours d’instruments) qui fut en son temps si précieux, un Musée qui eut son époque de gloire, mais bien relayé de nos jours avec l’Hôtel départemental des Arts, tous ces efforts et d’autres encore méritent la reconnaissance et s’inscrivent dans l’esprit du progrès.

Cependant, la vie culturelle d’une cité se nourrit aussi de quelques soirées-événements, qui marquent des jalons, des points d’appui dont l’unanimité fédère les forces de l’avenir. Tel est  le cas avec cette représentation du chef-d’œuvre de Marivaux  vue samedi soir au Liberté, Le jeu de l’amour et du hasard.

Et d’abord rendons à César ce qui est à César. La volonté de créer un théâtre de Ville est à porter à l’actif du maire de Toulon. Sans doute le voit-on peu au concert, à l’opéra ou au théâtre. Qu’importe. C’est lui qui a permis de doter cette ville d’un outil incomparable au cœur du peuple citoyen. Je ne méprise pas le sport bien sûr qui fait partie de la culture et qui apporte, lui aussi, ses valeurs d’engagement et de dépassement de soi, mais « une ville sans théâtre est un être sans cœur » disait Molière. Dont acte !

Ensuite il y a les choix et les responsabilités de toute une équipe. En programmant cette production du Théâtre de la Porte Saint-Martin, le Liberté a fait une bonne pioche. La mise en scène de Catherine Hiegel est classique et alerte ; les comédiens de haut lignage sont bien dirigés ; Laure Calamy, Vincent Dedienne, Clotilde Hesme, Emmanuel Noblet, Alain Pralon et Cyrille Thouvenin ont offert trois heures de bonheur partagé.

Et puis surtout il y a eu le public sans qui rien ne se peut faire. Une salle archi-comble, toutes générations confondues, beaucoup de jeunesse, une grande qualité d’écoute explosant en ovation prolongée à la fin.  Les spectateurs sont sortis heureux, sans doute transformés par cette thérapie du bonheur qui devrait être remboursée par la Sécurité sociale (branche culturelle) !

Tous ces ingrédients réunis ont donc constitués un moment rare qui n’en doutons pas sera recueilli ! Car tout est recueilli. Pour une ville, c’est-à-dire pour une communauté de citoyens, ces soirées réussies sont les signes d’un changement espéré, voulu et accompli. Instants mystérieux et magiques ou une population se retrouve autour d’une valeur patrimoniale inestimable : la beauté de la langue classique française. Merci Pierre Carlet de Chamblain dit Marivaux !

Jean-François Principiano

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