Bannon au secours du FN, pardon du Rassemblement National !

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Quelle rénovation ! Il va falloir s’y faire, le FN devient le RN. Les mêmes qui l’avaient adoré ont fini par le rejeter, dans la douleur. Ils ont mis 40 ans et n’ont pas attendu la mort du fondateur -qui fait un tabac avec la publication de ses mémoires- pour se persuader qu’il était devenu encombrant et freinait l’ascension des idées qui les ont rassemblées et qu’ils portent toujours. D’autant qu’il leur faut trouver des alliances.

Marine Le Pen répétait encore dans Le Monde du 26 janvier 2018 « qu’il n’y avait pas de changement de ligne au FN. »Elle l’a confirmé dans son discours de clôture.

Ils veulent juste se séparer du nom attaché au père, surtout pas de la flamme tricolore, inspirée par le sigle du MSI italien, parti d’extrême-droite crée en 1946 par Georges Almirante et par d’anciens fascistes, sigle adopté par le FN dès 1972. Le RN le garde.

Ils ne veulent plus avoir à se justifier des scories et déclarations-culte du père qui les marquent trop à l’extrême-droite dans l’opinion. Ces « réformateurs » de surface voudraient nous convaincre qu’ils sont de doux agneaux inoffensifs ne visant qu’à défendre la nation contre la mondialisation.

Ils ne sont pas contre le capitalisme et ses tares congénitales. Pas du tout. D’ailleurs le mot est tabou. Ils dénoncent le mondialisme et lui préfèrent le protectionnisme dans son sens le plus étroit « les Français d’abord », « chacun chez soi », »l’immigration ça suffit », « pas de migrants »…qu’on les empêche de fuir les bombes et la destruction de leurs maisons, ça c’est leur « humanisme » !

Et pour le prouver -en même temps que redorer leur blason terni- ils ont invité…Steve Bannon, le banni de Trump après avoir été son directeur de campagne et son conseiller spécial. Il a fait l’éloge des dernières mesures protectionnistes « du meilleur chef d’Etat que l’Amérique ait connu »…il n’est pas rancunier, juste fidèle à ses idées « nationalistes et populistes », c’est ainsi qu’il les nomme. Son message : « l’histoire est de notre côté…Le président américian a enfin montré la porte aux mondialistes, c’était pas trop tôt » a-t-il fait acclamer à Lille !

Un petit couplet sur « le clivage gauche-droite c’est fini, c’est une invention de l’establishment et des médias… » copié-collé des discours du père et de la fille. Il se trouve que Macron dit exactement la même chose et que les partis, c’est du passé dépassé.

Le FN ripoliné s’efforce donc de créer, lui aussi, l’illusion que la forme parti n’est plus adaptée et qu’il va se métamorphoser en papillon, voletant de fleur en fleur après sa période chrysalide. Il est dans le vent, c’est le cas de le dire et n’en reste pas moins un danger pour la démocratie qui lui sert de paravent.

À noter que si le père, devenu persona non gratta dans le parti d’extrême-droite qu’il a crée et qu’il revendique comme tel, a été volontairement absent du congrès, il n’en admire pas moins et Bannon et Trump, comme les congressistes, très partagés sur le changement de nom. Collard, lui, se serait passé de la présence du représentant de l’aile la plus dure des conservateurs américains. Entendez très marquée à l’extrême-droite.

Eh oui ! c’est justement ce qu’ils veulent faire oublier à travers leur « dédiabolisation ». Mais comment, en faisant de Trump, milliardaire ultra-conservateur, nationaliste et xénophobe, leur modèle, peuvent-ils s’imager séduire une majorité de Français ??

C’est que, par delà les postures de ses dirigeants, ça tangue fort au sein de la famille frontiste même rebaptisée. La grande prêtresse en disgrâce, sa nièce, absente, le père répudié, Philippot parti tenter sa chance… Ne parlons pas de Claudine Kauffmann, la sénatrice varoise quittant le navire avec fracas le jour du congrès, des élus nombreux à faire sécession, même des maires comme à Cogolin, et des fidèles déboussolés par la perte de crédibilité d’un parti divisé. Sa progression, malgré son échec à la présidentielle et aux législatives, avait de quoi inquiéter, bien que sans allié, hormis « Debout la France ».

Cela dit, les idées qu’il a semées persistent. Elles prennent leur source dans les politiques d’austérité en France et en Europe, dans le ralliement de gouvernements socialistes à la gestion du libéralisme à l’oeuvre dans le monde entier, politiques qui écrasent les peuples et font exploser les profits d’une très petite minorité d’actionnaires qu’on est invité à admirer pour leurs performances spéculatives et leurs détournements fiscaux !!!

En l’absence de perspective progressiste, ces idées, engendrées par la colère, l’écoeurement, le sentiment d’abandon des couches populaires, continueront de prospérer tant que les mêmes politiques, au service du capital et au détriment du travail, ne seront pas mises en échec par le rassemblement de toutes les victimes des régressions sociales imposées aux peuples. Jusqu’à créer les conditions d’une véritable alternative au libéralisme en marche et en crise profonde.

Et pour cela, il ne faut pas davantage compter sur la nouvelle vitrine du parti d’extrême-droite. Car il faudra s’attaquer à la légitimité des profits, des dettes, de la spéculation, des paradis fiscaux, de la propriété des grands monopoles, du pouvoir des actionnaires et des banques, bref au système capitaliste lui-même.

Et c’est aussi une question de survie si l’on veut sauver la planète !

René Fredon

PS : En marge du congrès, Davy Rodriguez, n°2 du Front national de la Jeunesse a été suspendu à titre conservatoire pour propos racistes tenus dans un bar de Lille, vidéo à l’appui. Chassez le naturel…

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