« 4900 lits encore fermés en 2023 et la folie qui continue ! »

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@afp
Docteur Vincent Carret

L’hiver arrive avec ses demandes de soins et d’hospitalisations pour tous et surtout pour nos plus fragiles, nos Ainés et notre Pédiatrie, la hantise de toutes nos équipes !

Pour se défausser en responsabilité les vieux plans COM et logiciels usés qui ne trompent plus personne sont ressortis. « On ferme des lits parce qu’il n’y a plus assez de personnels soignants et pour favoriser l’ambulatoire » tout en oubliant de préciser que « les stratégies de Starve the Beast* inconnus du grand public sont passées par là ».

On revient encore sur ce « Starve the Beast » et tout le mal fait au sein de nos hôpitaux et secteurs de soins : « Si l’on veut anéantir un système , il suffit de lui couper les fonds » !

La technique du « Starve the Beast » est bien connue, imaginée par les conseillers de Ronald Reagan dans les années 1980, en réduisant progressivement les budgets d’une institution, on accroît ses dysfonctionnements et les tensions, ce qui rend légitime de réduire davantage encore les budgets car ça ne fonctionne pas puis de s’attaquer aux hommes et aux effectifs pour diminuer les effectifs et ne pas susciter l’émotion publique.

« Ou comment tenir les individus pour responsables d’échecs orchestrés par l’institution et inverser le poids et le sens de la charge de la preuve ».

La mécanique est implacable : À force de réduction de moyens l’institution ne peut plus faire face aux besoins, les conflits internes se multiplient, les solidarités et la solidité des équipes volent en éclat, les soignants se rejettent la faute en interne les uns sur les autres. Submergés par la pression des chiffres et des preuves les agents publics se découragent et s’épuisent et deviennent les parfaits alibis des fermetures et des restructurations. Alibi idéal pour s’attaquer aux statuts et privilèges et remplacer par des contractuels plus dociles et malléables …

Vient alors le moment de porter le coup fatal. Face à l’accumulation des dysfonctionnements et à l’explosion des coûts on peut enfin décréter le service public en état de mort clinique et le supprimer en privatisant de plus en plus.

Le quotidien en période de tension devenue permanente et vécu par nos malades et familles qui ne comprennent plus que leurs soignants s’épuisent à essayer de bien soigner et à trouver des lits que l’on continue à fermer, est devenu de plus en plus violent selon le terme hélas souvent prononcé.

4900 lits ont encore été fermés en 2023 selon la DREES (Direction Recherche Étude et Évaluation Statistique) publiée le 31 octobre 2024 soit depuis 2013, 43 500 lits fermés, qui mettent les équipes encore plus sous pression et accentuent les tensions dans les services d’Urgences alors que l’ex-ministre de la Santé Aurélien ROUSSEAU à l’automne 2023 s’était engagé devant la Nation à « rouvrir plusieurs milliers de lits d’ici la fin de l’année »,promesse non tenue et encore trahie .

Cette dynamique de fermeture des lits s’est accélérée et a été plus rapide ces quatre dernières années qu’avant la crise sanitaire d’après la DREES, où comment mettre la crédibilité de la parole présidentielle et les leçons non retenues des 170 000 morts du Covid-19 en doute devant la nation !

Ils ferment des lits pour favoriser l’Ambulatoire qui ne correspond pas à la demande d’une population vieillissante aux pathologies lourdes et complexes que soignent nos hôpitaux et qui en contexte de désertification médicale s’aggravent et arrivent dans nos filières de soins avec retard. Ils mentent au regard de ce principe de réalité que nous vivons tous.

Ces chiffres inquiétants de la DREES sont publiés en plein débat parlementaire sur le budget 2025 de la Sécurité Sociale dont le gouvernement veut contenir le déficit à 16 milliards d’euros là ou depuis sept ans 1000 milliards ont participé au creusement de la dette en dépit et au plus profond mépris des priorités, là où 600 milliards ont été débloqués pour sauver l’économie et plus de 400 milliards pour le plan de programmation militaire 2023-2030. « Quand on veut, on peut, quand on ne veut pas, on ne peut pas ». La Santé est et sera cette priorité première encore sacrifiée.

Cette folie du désengagement et de l’irresponsabilité de nos élites continue, elle est le quotidien de tous les services d’Urgences de France et de celles et ceux qui ne cessent d’alerter à l’image d’un Procureur de la République de Marseille, Nicolas BESSONNE qui interpellait ses tutelles sur la perte du combat contre le « Narcotrafic » et dont la parole devait être tue.

Toutes ces folies que l’on voudrait à tout prix faire taire ont un coût humain et sont à l’origine de drames annoncés et connus de tous. Ces folies et ces silences imposés finissent toujours mal

La fermeture des lits correspond au quotidien à ce que nos populations vont vivre pour la période qui arrive et de manière amplifiée par rapport à un quotidien déjà à la rupture et qui tient par miracle par la prouesse des équipes de terrain.

La fermeture des lits d’hospitalisations complète va correspondre à l’amplification des mises en attente aux Urgences, l’attente sur des brancards couloirs ou dans les ambulances sur le parking, au tri ou de la réorientation vers « l’ailleurs », au retour à domicile sur des états « limites » engageants la responsabilité des soignants qui en d’autres temps auraient réussi à hospitaliser leurs patients, au refus de patients qui ne peuvent être admis, aux demandes de transferts vers le secteur privé en capacité limité pour le profil de patients lourds et complexes, au déclenchement de plans blanc pour ultime recours par défaut d’autres solutions et au final à la perte de sens et à la souffrance des soignants qui ne comprennent plus des élites et gouvernants à ce point déconnectés du réel et de leurs vies, de la vraie vie.

Alors que toutes et tous par éthique et professionnalisme se doivent d’assumer et de pallier aux conséquences de ces politiques qui continuent à se cacher derrière nous, il nous vient à espérer et à demander que ces élites rendent des comptes et soient responsables un jour de leurs choix et décisions pour la Santé.

Tous les Syndicats et associations de malades sont vent debout en cette veille d’hiver 2024 et en cette période de budget pour notre Santé.

Puisse la CJR (Cours de Justice de la République) mise sous silence et saisie par nos équipes et nos familles de médecins et soignants décédés et confrontés aux drames du Covid, retrouver le chemin de ce devoir de réponses et de responsabilités de nos gouvernants.

Dr Vincent CARRET
AMUF

 

* Affamer la bête

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