Vinci : tout va bien pour les actionnaires !

0

Ne vous attendez pas à ce que je dénigre le n°1 mondial du BTP et des concessions en tous genres (autoroutes, aéroports, ferroviaire, parkings, stades, énergie, immobilier…), le « partenaire privé d’utilité publique » comme il aime à se présenter.

Vinci est très présent à Toulon, depuis des décennies et même omni-présent. Récemment il a obtenu la concession de l’aéroport de Hyères-Toulon jusqu’en 2040, celle d’Escota prolongée jusqu’en 2032, pour service rendu dans le cadre de l’achèvement du tunnel comme constructeur mais aussi comme financeur, il réalisera l’élargissement de l’A57, à la sortie Est de Toulon ainsi que le péage de Sanary, ainsi les automobilistes passeront plus tôt à la caisse en quittant Toulon.

La réussite d’une grande entreprise française de taille mondiale ne peut nous laisser indifférents ? Ce géant est tellement puissant qu’il sert même de banque aux collectivités locales que l’Etat asphyxie et endette pour le bonheur des banques privées ou de gros prestataires de services comme Vinci pour qui ce pré-financement n’est pas un acte philantropique.

Les poules aux oeufs d’or
Pour réduire leur dette les collectivités ont recours à une astuce purement comptable : les partenariats public-privé (PPP), comme pour le stade Riviéra de Nice, les collèges du Var, du gros équipement hospitalier.. qui leur reviennent plusieurs fois plus chers et dont les prêteurs restent propriétaires jusqu’au dernier loyer. On y a de plus en plus recours dans le Var et ailleurs.

Cette technique astucieuse et légale permet à un emprunt de changer de nom pour devenir un loyer et de ne plus figurer dans les investissements mais dans le fonctionnement des budgets des collectivités publiques, contrairement aux emprunts classiques. Les intérêts font partie du loyer, ils sont plus chers mais ils n’alourdissent pas, en apparence, la dette, les dépenses, oui.  Le tour est joué. Les budgets supportent, de fait, beaucoup plus d’intérêts que pour un emprunt classique. C’est le contribuable qui paie !

Devinez qui s’y retrouve ? Le prêteur pardi qui, plus il est gros, plus il a le crédit facile parce qu’il a des fonds propres qui le garantissent. Pas les petites et moyennes entreprises. La société tout entière est organisée autour des multinationales de plus en plus…transnationales. L’argent n’a ni odeur, ni patrie…on peut même en gagner rien qu’en spéculant. Faut-il encore en avoir ?

Le moins qu’on puisse dire c’est que la gestion d e tels mastodontes ne présente pas toutes les garanties de transparence et de respect des règles fiscales, environnementales, sociales…sans parler des hauts salaires de leurs cadres dirigeants et des privilèges attachés à leurs fonctions, véritable scandale permanent qui continue de s’étaler à la face des salariés et des chômeurs, des petits revenus et retraités qui galèrent à longueur d’année.

Et ce n’est pas parce qu’il y a pire ailleurs qu’on doit s’extasier devant le creusement des inégalités en France et dans tous les pays dits « riches » quand autant d’argent s’accumule à un pôle de la société. A quel prix pour la planète et pour les humains qui manquent de tout ?

La bonne nouvelle
Ayons une pensée pour ceux du haut de la pyramide, les actionnaires de Vinci ont appris la très bonne nouvelle : le cours de l’action a fait un bond significatif. Elle est cotée  non plus à 59,84 euros par action comme en février dernier mais à 68,92 euros. En général on ne les achète pas au détail. Voyez ce qui peut tomber dans l’escarcelle.

« C’est le moment d’acheter » leur disent les professionnels de la finance qui veulent au passage participer au festin. Vinci très satisfait et confiant dans l’avenir du groupe, vient d’envoyer « un signal fort aux actionnaires » : une hausse de 14,1% du dividende, à 2,10 par action va leur être proposée. Il ne devrait pas y avoir de récalcitrant.

Et encore sachez que c’est grâce à la « très bonne dynamique des concessions » que le groupe a pu compenser de moindres résultats dans d’autres secteurs. Rien ne vaut les concessions, surtout celles à perpétuité.

Qu’est-ce qui vous empêche de prendre quelques actions de Vinci ? Prenez des risques, voyons ! Pourquoi cultiver ce pessimisme ? Tout ne va pas si mal dans nos sociétés libérales. Il y en a qui s’en sortent bien. Très bien même. Ils trouvent que vous dépensez encore trop, que vous êtes trop protégés, trop assistés. Que vous coûtez trop cher à l’entreprise quand vous travaillez. Et beaucoup trop cher à l’Etat quand vous ne travaillez pas !

Attention, en période électorale les mêmes vous promettront de mieux payer le travail…vous n’êtes pas obligés de les croire.

Les actionnaires eux, ne travaillent pas ou alors ils ne sont pas obligés, sauf s’ils veulent gagner plus comme disait Sarkozy. Lui, il a une bonne retraite, du patrimoine, non ? Il s’ennuie déjà, il a trouvé facilement un job à 60 000 euros, pour dix réunions par an, comme administrateur d’Accor. Ses conférences ne lui suffisent pas. Mais quand est-ce qu’il le dépense tout cet argent ?

Et que dire de ces emplois présumés fictifs ou détournés qu’on découvre, financés par l’argent public, à l’initiatives de candidats -et non des moindres- à la Présidence de la République, qui aussitôt crient au complot, n’est-ce pas Mr. Fillon, n’est-ce pas Mme Le Pen ? De quoi troubler une opinion passablement incrédule et même très en colère.

Ce qui n’est pas le cas des actionnaires de Vinci qui doivent s’attendre à un avenir proche assez florissant, bien qu’on nous serine  qu’il faut avoir « la lucidité et le courage d’alléger la fiscalité écrasante qui entrave nos entreprises, si l’Etat ne baisse pas nos dépenses sociales et sa masse salariale ».

C’est une obsession et c’est justement ce qui explique le désarroi des peuples des pays les plus riches aussi. Pourquoi le Brexit, l’élection de Trump, le malaise profond en Europe, le rejet de la mondialisation pilotée par les maîtres de l’économie et de la finance ?

Qui sont les adeptes de la libéralisation sans entrave ? Ils se succèdent au pouvoir avec les mêmes recettes : de la privatisation à la dérégulation, au fétichisme du marché, à l’anonymat des paradis fiscaux… corollaire de la stagnation des petits revenus, de l’augmentation du chômage et des inégalités, de l’insécurité d’abord sociale, de l’instabilité du monde où se développent et s’éternisent des conflits sans issue militaire…

C’est encore moins sur l’extrême-droite alignée sur Trump qu’il faut compter pour maîtriser la finance et le crédit ni pour reconnaître des droits aux salariés des banques et des entreprises, encore moins pour nationaliser celles en position de monopole.

Il ne s’agit pas de se méfier des entreprises mais de définir de nouveaux critères de gestion, une tout autre finalité que la seule rentabilité pour les propriétaires de capitaux.  On voit à quelles inégalités, à quelles fractures sociales  mène le libéralisme qui, par définition ne veut aucune contrainte à l’exploitation des hommes et des richesses..

Le plein emploi, le pouvoir d’achat de tous, ainsi que la protection de notre environnement ne sont pas des options mais des impératifs !

Il y a du pain sur la planche. C’est le moment d’ y réfléchir et de donner du pouvoir au peuple, dans les actes…dans le sens du progrès social et écologique, de l’Humain d’abord.

Comme l’a écrit si justement Serge Halimi, directeur du Monde Diplomatique : « Seul un vote qui vous propose de reprendre à la finance le pouvoir qu’elle détient, mérite l’intérêt de tous ceux qui aspirent à la justice sociale et à l’égalité des chances. Les autres « oublient » de vous parler de l’essentiel. »

René Fredon

LEAVE A REPLY

Please enter your comment!
Please enter your name here

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.