Toulon : Sei  À la recherche de Pirandello

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Soirée théâtrale italienne au Liberté autour du chef d’œuvre Sei personaggi in cerca d’autore du dramaturge sicilien Luigi Pirandello (1867-1836)

Les  maîtres d’œuvres de ce spectacle Spiro Scimone et Francesco Sframeli ont bien fait de préciser qu’il s’agit d’une adaptation libre. Péché avoué ….

Le spectacle en lui-même a remporté un vif succès d’écoute et d’estime. De nombreux profs d’Italien avec leurs élèves ont été invités à se joindre à l’événement qui redisons-le a plu dans l’ensemble grâce au sous-titrage et à la qualité intrinsèque des interprètes (Gianluca Cesale, Maria Silvia Greco, Francesco Natoli, Zoe Pernici, Bruno Ricci, Miriam Russo, Spiro Scimone, Francesco Sframeli, Giulia Weber et Michelangelo Maria Zanghì).

Pourtant  si l’on compare avec le texte original on  reste perplexe.

D’abord la réduction et la relecture. Créée en 1921 cette pièce a été une révolution dans l’Histoire du théâtre, développant les trois thèmes majeurs de l’œuvre pirandellienne (Prix Nobel de littérature en 1934) À savoir, l’incommunicabilité, l’illusion double du réel et de ses représentations et surtout la mise en abyme du théâtre. La pièce est longue avec de nombreuses  didascalies. Plusieurs fois remaniée par son auteur. Elle dure en tout 2h 15 dans les versions courtes et plus de 3h dans les versions longues. En réduisant le texte Scimone et Sframeli ont voulu sans doute  le rendre plus évident, ce qui est louable. Constatons cependant que depuis plusieurs décennies le public ne peut plus supporter des temps de spectacles au-delà de deux heures  trente. Il y a donc un présupposé chez les metteurs en scène de faire du Reader digest. On raccourcit voire on « tue » des personnages. On adapte pour un public nouveau qui recherche l’immédiateté. Et on prend pour alibi le nom de l’auteur.

Autre problème, la volonté didactique. Le génie du texte pirandellien est de donner à réfléchir sans  posture ni rhétorique. Comme chez Tchekhov ou Ibsen les « thèmes » naissent de la scénographie. La beauté du théâtre c’est de laisser penser et même à  travers les non-dits du texte. Sans rien imposer. Métalangage mystérieux.

Enfin le drame de l’incommunicabilité est un peu dissous dans cette relecture. Les deux illusions celle du théâtre et celle de la vie sont des idées imposées par la confrontation un peu statique des deux groupes sur scène. Le spectacle perd en magie et en poésie frôlant le boulevard.

En conclusion disons que la soirée avait le mérite de faire entendre une partie du texte de Pirandello en langue originale, une partie de sa dramaturgie si personnelle  et une  seule partie de sa poésie proche des mystères de la Grèce antique. Pirandello était fils spirituel de la Grande Grèce, la Sicile. C’est déjà pas mal et tout à l’honneur de la scène toulonnaise d’avoir entr’ouvert le voile de cet univers théâtral grandiose.

Jean-François Principiano

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