Un ouvrage, six auteurs et un point commun : l’intérêt partagé pour la ville de Toulon, son histoire, ses histoires, un passé qui n’occulte pas l’avenir. Coordonné par Marc Bayle, « Toulon. Portraits d’une ville » (Capit Muscas éditions), publié en septembre 2023, est l’œuvre de « plumes » originales, aux sensibilités diverses, mais avec un accord initial : la connaissance personnelle d’une cité que l’on aime, et que l’on peut critiquer en toute liberté. Et c’est ainsi que ce sont retrouvés autour de Marc Bayle, préfet honoraire, ancien commissaire de la Marine, et conseiller général de Toulon, de 1994 à 2001, LEA, ancienne journaliste de Var Matin, spécialiste des quartiers, Cyriaque Bayle, haut-fonctionnaire et réalisateurs de court-métrages, Pierre Brousse, aujourd’hui président du Fonds de dotation Brousse dell’Aquila, André Fourès, ancien directeur du Commissariat de la Marine, membre de l’Institut français de La Mer, José Lenzini, ancien journaliste de Var Matin, et correspondant de médias nationaux, et Patrick Lorenzini, ancien journaliste de Var Matin/Nice-Matin, auteur de nombreux ouvrages.
Chacun son style, chacun ses choix, d’où la richesse d’un livre aux entrées multiples.
Nicole Fau : On pensait que tout – ou presque – avait été dit sur Toulon. Quels sont les faits qui vous ont poussé à vous lancer dans cette aventure ?
Marc Bayle – « Tout est dit, et l’on vient trop tard depuis plus de sept mille ans qu’il y a des hommes qui pensent ».
Non, au risque de démentir La Bruyère, tout est encore à écrire, si l’on veut bien admettre que l’histoire n’est pas une passion antiquaire pour les choses mortes, obsolètes ou disparues. Proust l’avait bien dit : « Le passé n’est pas seulement fugace, il reste sur place ». Je ne méconnais pas ici ou là des travaux sectoriels de qualité, mais la dernière histoire globale de Toulon menée par Maurice Agulhon date de 1970. Un nouveau travail d’histoire sur Toulon, conduite par des historiens professionnels et enrichie des recherches entreprises dans l’intervalle, serait le bienvenu.
Avec cet ouvrage j’ai eu envie de brosser les portraits du Toulon contemporain, de quelques personnages, des belles personnes, qui marquèrent l’histoire locale à leur façon. Bien sûr, Raimu, dont parle Cyriaque Bayle, ce Raimu tellement plus Toulonnais que Marseillais. On y retrouve, également, l’épopée des Mousquemers (Cousteau Tailliez et Dumas), retracée par José Lenzini, ou les écrivains et artistes qui, dans l’entre-deux guerres, s’épanouissaient, dans ce « Saint-Germain-sur mer » festif et culturel, selon la formule de Patrick Lorenzini, un second « bateau-lavoir » : les Picasso, Django Reinhardt, Cocteau, Paul Morand, Bernanos, Francis Carco, Léon Vérane et d’autres.
À côté, il présente des personnages moins connus, et qui méritent d’être revisités : l’abbé Bouisson , cet « abbé Pierre Toulonnais », Esther Poggio cette jeune héroïne et martyre de la Résistance » dont parle LEA. Le commissaire général de la Marine (2S) Fourés évoque l’œuvre des refondateurs du port militaire de Toulon aux lendemains de la Libération, le préfet maritime Lambert et le directeur des travaux maritimes Monsenergue, récit qui offre une bel exemple de la pathologie de la décision publique.
Nicole Fau : Six auteurs, six visions, six personnalités…Avez-vous imposé des règles ou laissé toute liberté aux auteurs, dont les sensibilités politiques sont différentes ?
Marc Bayle : Le caractère pluriel de l’ouvrage est assumé. Avec des personnalités aux parcours dissemblables, des sensibilités politiques diverses et parfois pas de sensibilité du tout, des manières d’écrire et des tons disparates, qui ont travaillé, réfléchi sur Toulon. Parmi eux des journalistes-écrivains qui ont pu, mieux que personne, appréhender la vie locale, un jeune haut-fonctionnaire, Cyriaque Bayle, fou de cinéma, un officier général de la Marine André Fourès, qui exerça des responsabilités importantes à Toulon.
Pour ma part, j’ai écrit des textes sur des épisodes structurants de la vie politique locale, tels « l’escartefiguisme », matrice, à mes yeux, des mœurs politiques locales, l’ impact de la guerre d’Algérie sur la politique locale, le « moment Front national à Toulon »
Loin de prétendre à faire une monographie sur Toulon, encore moins un essai, leur projet a été de dresser, chacun librement, les portraits de quelques personnages marquants de Toulon au XXème siècle, tous décédés ; ce fut la règle, ainsi que le récit de quelques épisodes structurants de la vie publique locale.
L’unité de l’ouvrage tient aussi à ce que ses auteurs, intrigués ou passionnés par cette ville, sa puissance historique, son souffle littéraire ont parfois l’impression de vivre un film, tantôt glorieux, tantôt mauvais et répétitif.
Nicole Fau : Aujourd’hui, avec l’expérience et le recul, qu’aimeriez-vous changer dans cette ville ?
Marc Bayle : Préalablement, et ayant été successivement acteur puis observateur de Toulon, j’affirme que la ville rayonne davantage aujourd’hui, et ce pour quatre raisons au moins : l’importance de son secteur maritime, son virage métropolitain, l’émergence d’ un milieu innovateur et son regain d’attractivité.
La première marque du changement serait davantage d’ordre culturelle : plus d’estime de soi d’abord, moins de complexe envers ses grandes cités voisines, plus de congruence entre les Toulonnais, encore trop souvent repliés dans leurs petits milieux, et plus de détermination dans le projet de ville. »
Propos recueillis par Nicole Fau
On espère, la verite espère,qu’une ou plusieurs pages, seront consacrées à l’assassinat d’une députée , »fait divers » majeurissime dans l’histoire…de France, permettront aux lecteurs de Var Matin,théoriquement représentés par toutes ces éminentes plumes, seront, enfin, informés des tenants et aboutissants de ce condensé de la véritable histoire du Var. Trente après, les journalistes censés d’investigation, pourront très probablement donner à ceux qui l’attendent encore, la clef de l’énigme non?