Triomphe du marivaudage au Liberté les vendredi 26 et samedi 27 avril à 20h30
Le Liberté offre à son public une des plus belles pièces du théâtre classique français mis en scène par Catherine Hiegel. Un joyau d’analyse des sentiments amoureux traité au scalpel par la prose de Pierre Marivaux. Un chef-d’œuvre à ne pas laisser passer ! Pour petits, grands et surtout pour adolescents amoureux !
Le théâtre des sentiments et des tourments
L’histoire est éternelle. Est-ce que tu m’aimes ? Peut-être ! Moi non plus ! Le sujet est en soi universel. Peu encline à se marier, Silvia obtient de rencontrer l’homme qu’on lui destine en se faisant passer pour sa servante, Lisette, à qui elle laisse le soin de jouer son propre rôle. Ainsi grimée, elle aura tout loisir d’étudier le caractère et le comportement de son promis. Mais elle n’imagine pas que le jeune homme aura recours au même stratagème. Pièce allègre, licencieuse et moderne, Le Jeu de l’amour et du hasard use de la mascarade et du travestissement pour battre en brèche les préjugés liés à la classe, au genre et aux apparences qui marquent son époque.
Une mise en scène respectueuse.
Clotilde Hesme, Vincent Dedienne et Laure Calamy sont splendides de vérité et d’émotions. La mise en scène de Catherine Hiegel est classique sans être passéiste ni poussiéreuse et s’autorise de légers décalages. On n’oubliera pas ainsi qu’on est au théâtre, que le stratagème inventé par les deux jeunes gens – troquer leurs habits de maîtres contre ceux des domestiques pour se connaître sans être reconnus-est une ode à la comédie et à ses artifices. Sans forcer le trait, avec distanciation, Catherine Hiegel met en relief les conflits de classes, la cruauté et l’absurdité des conventions – renforcés par l’orgueil et la vanité de nos jeunes amants.
Le poids des conventions sociales.
Le Jeu de l’amour et du hasard est la pièce de Marivaux la plus célèbre et la plus représentée, tant en France qu’à l’étranger. Dans cette comédie aux dialogues étincelants sur les relations amoureuses, Marivaux, tout en respectant les codes de bienséance de son temps, questionne l’ordre établi et les préjugés sociaux en inversant les rapports maîtres-valets. Le double jeu de masques engendre complications et quiproquos hilarants. Face à ce jeu de hasard où les troubles bousculent les convenances, les protagonistes répondent en faussant la donne et jouent la comédie jusqu’à se perdre. Les nobles sont moins nobles que les domestiques…Marivaux valorise la thématique du mérite qui lui est chère contre les privilèges de la naissance. Le Marivaudage et le jeu de l’amour et du hasard ont pour unique but de chercher le véritable amour au-delà des contraintes sociales. Chez Marivaux l’amour doit se conquérir. En accord avec les valeurs du Siècle des lumières, le couple de valets, Lisette et Arlequin sont des personnages émancipés à mi-chemin entre le registre comique et le registre sérieux. Au-delà de l’origine sociale, ces valets sont les égaux de leur maître dans la mesure où ils éprouvent comme eux la vérité des sentiments.
Catherine Hiegel a choisi de montrer sous l’apparente légèreté, une critique subtile des inégalités sociales. On se souvient de la célèbre réplique « Un mari porte un masque avec le monde, et une grimace avec sa femme. » Voilà donc une belle opportunité de retrouver la beauté de la langue classique française.
Théâtre Liberté 26 et 27 avril 20h30 « Le jeu de l’amour et du hasard » de Marivaux Avec Laure Calamy, Vincent Dedienne, Clotilde Hesme, Emmanuel Noblet, Alain Pralon, Cyrille Thouvenin et les musiciennes Camille Gueirard et Vérène Westphal (en alternance) Ajoutons que Laure Calamy a obtenu le Molière de la meilleure comédienne du théâtre privé. Production Théâtre de la Porte Saint-Martin Coproduction Atelier Théâtre Actuel et Canal 33.
Jean-François Principiano
