Retraites : réponse à Macron

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Paris Opera dancers perform in front of the Palais Garnier against the French government's plan to overhaul the country's retirement system, in Paris, on December 24, 2019. (Photo by STEPHANE DE SAKUTIN / AFP)

« Nous ne serons pas la génération qui aura sacrifié les suivantes »

Pour tenter de diviser le mouvement social puissant qui refuse le projet du gouvernement, celui-ci proposait aux danseurs.es du ballet de l’Opéra de Paris, de ne faire appliquer la réforme des retraites que pour les générations futures, la « clause du grand-père ». Comme il tente de le faire auprès d’autres corporations.

Réponse cinglante et quasi-unanime des artistes concernés : « il nous est proposé d’échapper personnellement aux  mesures, pour ne les voir appliquées qu’aux prochaines générations. Nous ne pouvons pas être celle qui aura sacrifiée les suivantes ! » peut-on lire dans le communiqué adopté le 24 décembre. De plus en plus de Français.es se posent la même question.

S’en sont suivies deux représentations en soutien à la grève : l’une le 24 décembre à 15 h, devant l’Opéra de Paris, avec un extrait du Lac des Cygnes, avec la présence de 110 danseurs (sur 154).  L’autre le 31 décembre à 15 h sur le parvis de la Bastille avec un concert donné par les musiciens, chaudement vêtus, de l’orchestre national de l’opéra devant des milliers de spectateurs remplissant la place. Un chèque de 40 000 euros a été remis aux salariés grévistes de l’Opéra.

Salariés.es des 70 professions de la grande scène nationale qui sont en grève contre la réforme des retraites et des régimes spéciaux, depuis le 5 décembre, musiciens.nes, chanteurs.es, danseurs;es, techniciens.es…mouvement qui a d’ores et déjà conduit à l’annulation de 55 représentations. Ce ne sont pas que les retraites qui sont menacées mais l’avenir des grandes institutions de la culture, avec les réductions de crédits et de postes annoncées…au nom du progrès social, sans doute ?

Le pouvoir a beau faire donner ses caisses de résonance que sont les médias publics et privés pour accréditer l’idée que le mouvement se délite, il n’a pu obtenir la trêve de Noël et du jour de l’an ni la cassure entre les grévistes qu’il espérait, aidé par le patron de la CFDT, pas suivi par ses troupes de la SNCF, de la RATP et d’ailleurs…

Une belle réponse aux voeux de 20h00 du président Macron s’adressant aux Français en plein conflit sur les retraites, comme l’an dernier en plein conflit des gilets jaunes. Décidément sa conception de la « rénovation de notre modèle social » fait se lever en masse toutes les catégories sociales (sauf les très riches) et plus particulièrement les plus précarisées !

Son appel à l’apaisement tombera à plat comme son renoncement à l’une de ses retraites du conseil constitutionnel ! Il ne nous fera pas avaler, même un soir de réveillon, que travailler et cotiser plus longtemps pour une retraite calculée sur la totalité du temps travaillé, donc moindre, relève du progrès social ! Et il faudrait travailler jusqu’à 64 ans pour toucher une retraite « pleine », sans décote ! De qui se moque-t-on ? L’enfumage ne passe pas.

Ce n’est pas la prestation de Macron mardi soir, lors de ses voeux, qui donnera de l’enthousiasme à ses troupes. Défensif, livrant les formules habituelles comme son « engagement à transformer notre pays pour qu’il soit plus fort, plus juste… » ou qualifiant sa réforme des retraites de « projet de justice et de progrès social…« , prétendant « garantir l’équilibre de notre système par répartition » pendant qu’il répond aux souhaits des fonds de pension qui ne doutent pas de l’évolution rapide vers la capitalisation !

Aucune annonce de nature à débloquer une situation sociale provoquée par la volonté gouvernementale d’imposer ses réformes tout en fermant la porte à tout dialogue réel sur le fond du projet. Plutôt un pied de nez aux grévistes qui ne faiblissent pas malgré les efforts du pouvoir pour les diviser.

« Je ne céderai rien au pessimisme ou à l’immobilisme« …il demande au gouvernement « de trouver la voie d’un compromis rapide »…tout en ne rien cédant !

Il n’a fait que s’auto-féliciter de la mise en oeuvre de son programme, « du nouvel élan de la France en matière de création d’emplois et d’entreprises » ?? Répétant qu’il voulait « valoriser le travail et le mérite…et mieux partager la richesse« , ce qui a dû faire sourire dans les chaumières et susciter de la colère chez les millions de pauvres et de salariés.es précaires qui n’arrivent pas à survivre.

Encore un discours sur les mêmes schémas que les précédents qui ne laisse que très peu de place au « dialogue » annoncé le 7 janvier avec les syndicats. Ils n’auront trouvé aucune raison de baisser la garde, n’ayant strictement rien obtenu et voyant se durcir le discours présidentiel et les actes d’un gouvernement qui n’ont jamais suscité une telle désapprobation, une telle résistance, une telle mobilisation, une telle défiance !

Comment se contenter, pour ne prendre que cet exemple, d’un minimum de 1 000 euros de pension alors que le seuil de pauvreté est de 1 041 euros ? Sous prétexte que des retraités percevaient encore moins, non pas à cause du système par répartition mais à cause de leurs revenus insuffisants.

Et puis, ce montant de 1000 euros (85% du SMIC si carrière pleine) figurait déjà dans la réforme-Fillon de 2003, sous le gouvernement Raffarin, avec un SMIC à 1321 euros au 1er janvier2008. Aujourd’hui le SMIC est passé à 1539 euros (+18 euros par mois ?) et l’on nous propose la même pension plancher qu’en 2008…Quel progrès social ??? D’autant que la réforme-Fillon n’avait rien de progressiste ! (Lire en PJ les articles de Maxime Combes, économiste, porte parole d’ATTAC(1) et Sophie Chapelle de Bastamag(2)).

Macron a conclu en évoquant, comme d’habitude, l’unité nationale qu’il est en train de malmener encore plus rapidement que ses prédécesseurs à ce poste de locataire de l’Élysée.  Comme s’il vivait dans un autre monde auquel il n’avait pas accès parce qu’il n’y avait jamais vécu. Il semble incapable de comprendre l’angoisse du lendemain qui y règne et qui gagne des catégories sociales qui, hier, se croyaient à l’abri et voient s’assombrir leur avenir celui de leurs enfants.

Jupiter est au-dessus de la condition commune des vivants.

René Fredon

https://blogs.mediapart.fr/maxime-combes/blog/111219/retraite-minimale-de-1000-par-mois-cest-deja-inscrit-dans-la-loi-de-2003

https://www.bastamag.net/Delevoye-reforme-retraite-greve-pension-1000-euros-minimum-agriculteurs

crédit photo : https://www.lesechos.fr/industrie-services/services-conseils/greve-a-lopera-de-paris-contre-la-reforme-des-retraites-pas-de-lever-de-rideau-en-vue-1159003

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