Première ligne privée concédée à…Vinci

0

François Hollande aura terminé son quinquennat en beauté : il a inauguré le 28-2-17 la première ligne de chemins de fer privée qui n’est plus exploitée par la SNCF. Tout un symbôle !

La plus ancienne entreprise du secteur public avait été nationalisée le 1er janvier 1938 au moment du Front populaire. Elle fut un élément déterminant du développement de la France à partir de l’essor d’un réseau ferré et d’une industrie ferroviaire que nous envie le monde entier. Cela depuis 80 ans. Le réseau ferré date du premier quart du 19è siècle d’abord dans les régions houillères.

D’autres nationalisations suivirent à la Libération, concrétisant le programme du Conseil National de la Résistance puis en 1981 au retour de la gauche au pouvoir. Elles furent de courte durée.

Dès 1983, avant même le retour de la droite, les privatisations des services et entreprises publics n’ont cessé de s’accélérer à mesure que nos capacités industrielles déclinaient et que les politiques mondiales (FMI) et européennes (UE) asphyxiaient les peuples et s’imposaient aux Etats avec leur assentiment, des libéraux aux sociaux-démocrates convertis au libéralisme économique au service de l’oligarchie financière.

En 1982, le secteur public représentait 23% du PIB et comptait 3 000 entreprises employant 1,9 millions de salariés 9% de la population active.

Fin 2015, l’Etat ne contrôlait plus directement que 1625 sociétés employant 790 000 salariés. Soit 1,1 millions  de moins en 33 ans ! Et la droite veut encore accélérer le mouvement (Fillon 500 000 en 5 ans) pour répondre aux objectifs du MEDEF d’effacer toute trace du programme du CNR mis en oeuvre par …le Gl de Gaulle sous la pression, il est vrai, d’un puissant parti communiste.

Dans ce contexte, la droite de retour en 2002-2007, sous  Chirac-Villepin, précipita la nationalisation des autoroutes dont celles du Sud à Vinci (Escota) qui s’avéra une catastrophe financière, si l’on en croit un quotidien peu suspect de « radicalisme-gauchiste » la Tribune qui écrivait , le 22-12-2014 que l’Etat avait emprunté à des taux prohibitifs pour des travaux dont l’utilité n’était pas évidente et qui s’en était servi de prétexte pour les concéder aux géants du BTP.

Lesquels se sont empressés d’augmenter les tarifs des péages dans des proportions bien supérieures à l’inflation, au point que la Cour des Comptes dans son rapport de juillet 2013,  constatait que :
 » …très clairement, outre que les bénéfices des sociétés concessionnaires d’autoroute (SCA) , ont doublé depuis 2004, que la politique de distribution des dividendes a radicalement changé après la privatisation. En effet, alors que les Sociétés d’Economie Mixte Concessionnaires d’Autoroutes (et COFIROUTE) distribuaient en moyenne 56 % de leurs bénéfices à leurs actionnaires entre 2003 et 2005, cette part a atteint 136 % en moyenne les huit années suivantes. »

Le gâchis continue avec la concession du rail : merci Hollande-Macron !
Il aura fallu que le président actuel illustre -s’il en était besoin- à quel point son tournant libéral relève de réalités bien consistantes, sa soumission aux intérêts de la finance pour être le premier président, non seulement à ne pas avoir re-nationalisé les autoroutes livrées au rackett des multinationales du BTP, mais à avoir ouvert la voie…ferrée à ces mêmes sociétés privées géantes.

On observera que tous les candidats de droite, Macron compris bien entendu, et d’extrême-droite ne se sont pas indignés  -et pour cause- à propos de cette inauguration qui est plus qu’un symbôle, un recul historisque, un coin enfoncé dans l’une des principales sociétés publiques qui a déjà subi bien des assauts, bien des reculs visant à susciter la critique des usagers pour justifier la pire des solutions, comme l’illustre la menace bien concrète d’Estrosi de privatiser la gestion des TER en PACA !!

A l’inverse, le groupe CRC (Communiste Républicain et Citoyen) n’a pas attendu le rapport de la CRC pour déposer, dès 2011, une proposition de loi de renationalisation des autoroutes que réclamaient 80% des usagers après la révélation de ce scandale, un de plus. Il a renouvelé  plusieurs fois cette proposition qu’une majorité de députés et de sénateurs devait à chaque fois repousser !

Quant à la LVG Tours-Bordeaux (300 km), son financement, par le fameux partenariat public privé, a fait appel à l’intervention d’un opérateur privé, la société Liséa, filiale de Vinci et la CDC (caisse des dépôts) pour 50% du coût total estimé à 9 milliards d’euros. Intervention qui, comme pour le tunnel de Toulon sera avantageusement compensée par la gestion qui laissera au concessionnaire toute latitude pour adapter les tarifs à ses exigences de rentabilité. On peut lui faire confiance, ça va tirer les prix des billets très à la hausse !

Déjà la SNCF qui contribue à hauteur de 2 milliards à l’investissement craint que les frais de gestion qui lui incomberont, ne seront pas couverts par la part de recettes qu’elle recevra. Vinci, choisi en 2011, a eu la concession pour 50 ans et n’a nulle intention de faire courir le moindre risque à ses actionnaires.

Quoique, sur une aussi longue distance, il peut s’en passer des évènements…Imaginez que la présidentielle de 2017 ne tourne pas à l’avantage d’un libéral ? Ce n’est tout de même pas de la politique-fiction.

Voilà donc un investissement de fonds publics à hauteur de 5 milliards, qui permet à Vinci, en finançant le reste, moins de 4 mds, de gérer l’ensemble pendant 50 ans en empochant les recettes voyageurs dont elle fixera le montant : les usagers paieront…plus cher la vitesse. C’est une société privée qui tient la caisse !
René Fredon

LEAVE A REPLY

Please enter your comment!
Please enter your name here

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.