Pierrefeu : les migrants arrivent…et ce n’est pas le chaos !

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14 migrants sont arrivés au CHS (centre hospitalier spécialisé) de Pierrefeu depuis la fin de la semaine dernière, avant le début de l’évacuation de la « jungle » de Calais.

Huit enfants et six adultes (deux couples et deux femmes seules) immédiatement pris en charge et installés dans un bâtiment permettant un accueil de 30 personnes.

Le maire qui avait pris la tête d’une manifestation de protestation avait été informé le matin même de l’arrivée de ce premier contingent dont il se serait bien passé, mettant en avant « la forme », le manque de concertation, plus que le fond avait-il déclaré, comme pour se démarquer de ceux, à droite et à l’extrême-droite dont le mot d’ordre c’est « pas de migrants dans ma commune ! »

Positionnement repris à l’échelle de plusieurs régions comme Rhône-Alpes-Auvergne dont le président LR Laurent Wauqiez, proche de Sarkozy, affirme son hostilité à l’accueil des migrants en appelant les maires à la fronde et à ne pas recevoir les 1784 prévus dans « sa » région. Ce qui ne fait jamais que 1 pour 4347 habitants.

Quitte à mettre sa mère dans l’embarras à Chambon-sur-Lignon, en Haute-Loire, petite commune dont elle est maire et qui a accueilli et sauvé des milliers de juifs persécutés pendant la seconde guerre.

Madame le maire veut bien accueillir 5 migrants mais discrètement, sans faire de l’ombre à son fils ! Ce qui est diversement apprécié dans ce haut-lieu de mémoire symbôle de l’action des Justes devant les Nations.

Laurent Wauquiez devrait méditer ces paroles du pasteur André Trocmé qui fut, avec son épouse, l’ardent animateur de ce réseau de résistance. Il fut arrêté en 1943 par la gestapo et refusa de signer un papier d’allégeance à Pétain. Au préfet qui était venu lui signifier  qu’il allait procéder au recensement des juifs, il répondit : « Nous ignorons ce qu’est un juif, nous ne connaissons que des hommes. »

Le contexte historique a peut-être changé mais les hommes qui, aujourd’hui, fuient les guerres, la persécution, les dictatures…ce sont toujours des hommes, des femmes et des enfants qui attendent de nous des gestes élémentaires d’humanité.

Quelle honte, quelle lâcheté que de voir en chacun d’eux de possibles délinquants aux intentions suspectes, sinon criminelles qui menaceraient notre sécurité et que le plus sûr serait de refuser tout le monde !

Un tel raisonnement, un tel calcul politicien, comme l’a encore montré Sarkozy à Toulon, ne voulant pas être en reste avec le FN sur le terrain identitaire et sécuritaire, ne peuvent pas l’emporter dans un pays comme le nôtre.

D’ailleurs cette exploitation indigne d’un drame humain -dont il faut s’interroger sur les origines- est démentie par un homme qui fut ministre de Jacques Chirac et sous François Mitterrand dans le gouvernement Balladur, Jacques Toubon, aujourd’hui défenseur des Droits qui s’est expliqué sur les conditions à réunir pour que l’évacuation de Calais ne fragilise pas davantage les personnes déplacées.

Il considère que « l’afflux de migrants en Europe doit être relativisé…que les pays accueillant le plus grand nombre de réfugiés sont ceux qui sont limitrophes des zones de conflits…que la France a moins accueilli que d’autres pays européens (plus d’un tiers en Allemagne)… qu’elle arrive en 6è position après la Hongrie et la Suède… »

Il invite à un autre regard : « la Suède a connu, fin 2015, un taux de croissance de 4,5% qui n’était pas prévu par les économistes. Ces données pourraient être liées, en partie, à une dynamique des migrants ». Voilà qui change un peu des propos volontairement alarmistes, voire xénophobes.

Il souligne que « beaucoup d’outils juridiques existent pour permettre à des personnes qui fuient la guerre ou la dictature de venir demander l’asile en Europe sans risquer de se noyer ou d’être exploités par des passeurs. » Considérant par ailleurs que la « sécurisation » des frontières n’est en rien dissuasif. Ces fermetures augmentent le prix des passeurs qui, eux, parviennent toujours à emprunter des voies toujours plus risquées…pour les exilés les plus démunis, les femmes et surtout les enfants. »(1)

Voilà qui casse sérieusement le fonds de commerce des frères ennemis à droite et de la candidate unique à l’extrême-droite. Et qui légitime le combat et la solidarité qui s’expriment à gauche mais pas uniquement, plus globalement par toutes les sensibilités religieuses ou non qui ont à coeur de partager la même planète pour y faire régner la paix et la fraternité avant toute chose. Le travail ne manque pas.

René Fredon

(1) Interview réalisée par Joelle Deviras, VM 21/10/2016

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