Paradis fiscaux : ça suit son cours

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Comme tout le monde je peste après ma banque qui me ponctionne de plus en plus chaque mois de petites sommes pour des opérations qui ont tendance à se multiplier.

Un prélèvement mensuel modeste de quelques dizaines d’euros, voilà 1,5 euros qui me sont débités chaque mois et qui s’ajoutent à mon prélèvement (+3%) et au prélèvement trimestriel. De fil en aiguille, ça peut varier d’une banque à l’autre, nous voilà ponctionnés pour ne pas dire rackettés par une banque où atterrit d’office notre salaire, tout ou partie de nos revenus, argent géré à leur gré qui nous est certes garanti mais qui ne nous rapporte pratiquement rien. La banque, elle, peut aller au jour le jour sur les marchés financiers.

Nous la masse des clients, « sociétaires » dans le meilleur des cas, nous n’y pensons même pas. En revanche, l’accès au crédit nous est chichement compté : mieux vaut être aisé, pas trop vieux et en bonne santé ! Les jeunes aussi sont triés sur le volet.

A moins d’avoir de solides réserves et de prendre quelques risques ce qui existe mais qui n’est pas le lot du citoyen-lambda qui n’a guère le loisir de s’égarer dans la jungle de la finance toujours prête à jouer avec l’argent des autres et à y trouver son compte… Jusqu’à ce que la situation se complique et que les banques se retrouvent à nouveau, non pas sur la paille, mais devant des difficultés dues au ralentissement de l’activité économique à force d’imposer l’austérité aux peuples pour maintenir le profit servi aux actionnaires qui en exigent toujours plus.

Plusieurs indices tendent à montrer que nous sommes à nouveau dans une zone de fortes turbulences, si tant est que nous l’ayons quittée.

Le secteur bancaire -en France- justifie ces ponctions sur nos comptes par le rétrécissement de leurs marges depuis la baisse des taux d’intérêt, phénomène qui marque la nécessité d’inciter les institutions, les entreprises, les particuliers à emprunter puisque les taux ont baissé. Preuve que la demande de crédits se ralentit sinon les taux remonteraient. Ce qui reflète une confiance en perte de vitesse concernant l’avenir à court terme.

Un sentiment directement connecté avec le malaise social, les bas revenus, les inégalités, le chômage qui s’accroissent et, pour ceux qui ont une capacité financière meilleure, l’hésitation à profiter des taux bas dont on ne sait pas combien de temps ça va durer. Cette incertitude du lendemain gagne tous les pays, toutes les couches sociales, le nôtre n’y échappe pas.

Ce secteur de la banque prévoit la suppression de 20 000 emplois en France dans les mois à venir ! Qui s’ajoutent à ceux du secteur industriel et à notre agriculture très mal en point.

Pourtant les banques françaises reçoivent chaque mois de la BCE 60 à 80 mds d’euros à taux pratiquement nul, voire négatif. Argent qu’elles prêtent à un taux bas mais supérieur à celui de leur emprunt, cela va de soi. Elles peuvent même continuer d’en dissimuler une partie dans les paradis fiscaux où elles réalisent le tiers de leurs bénéfices pour ce qui concerne les 5 plus grandes : BNP, Société générale, Crédit Agricole, BPCE, Crédit Mutuel…(1)

Comme quoi, après les révélations des Panama Papers sur l’ampleur de la fraude fiscale à travers les paradis fiscaux, non seulement du système bancaire mais des multinationales et très grosses entreprises et très riches patrimoines individuels, si des avancées ont été obtenues par la mobilisation de la société civile et de certains groupes parlementaires très à gauche(2), comme l’obligation faite aux banques de publier les profits réalisés dans chaque pays ainsi que l’activité de leurs filiales à l’étranger, on est loin d’avoir assaini ce secteur et encore plus loin d’y avoir inclus les multinationales qui font de l’opacité, au nom du secret des affaires, un principe inviolable et non négociable.

D’où l’extrême danger des négociations en cours avec les E-U et le Canada comme des réglementations concernant notre sécurité alimentaire et sanitaire.

Les auteurs du rapport, cités en référence, estiment le manque à gagner fiscal, en France chaque année, entre 40 et 60 milliards d’euros. Ce sont des sujets tabou dans les primaires qui envahissent nos écrans. Mieux, il en est qui nous promettent « le courage » d’aller encore plus loin dans les réductions des dépenses publiques, donc des emplois publics, des prestations sociales et des exonérations fiscales…des grandes entreprises et des très riches, histoire de réduire la fracture sociale !

« Prendre le pouvoir sur la finance… vous n’y pensez pas ! Soyons sérieux… » nous disent ces candidats et leurs experts patentés au service de ce système qui nous écrase et ne survit qu’en divisant ses victimes.

Autre indice de la fragilité du système bancaire assis sur les pratiques spéculatives à hauts risques, les ennuis très sérieux de la Deutche Bank dont l’action vient de chuter de 50%, à 10 euros !

Au point que la chancelière allemande a menacé de ne pas lui porter secours. Personne n’y croit. En attendant, la BCE s’en charge. C’est que si le sort de Lehman Brothers lui était réservé, c’est l’euro système qui serait atteint dans ses profondeurs. Il l’est déjà mais il ne peut donner l’impression que ça craque dans tous les coins. Il ne tient que par l’illusion qui l’emporte encore selon laquelle il n’y a pas d’alternative au libéralisme débridé.

Ce sont ses conséquences désastreuses, humaines et environnementales, qui sont au coeur des choix devant lesquels tous les pays sont placés, le nôtre à brève échéance. Encore faut-il s’attaquer aux causes : les dérives endogènes de la finance mondialisée qui nous envahissent.

René Fredon

(1) http://ccfd-terresolidaire.org/IMG/pdf/rapport-banques.pdf

(2) http://groupe-crc.org/activite-des-senateurs/les-communiques-de-presse/article/il-est-temps-d-ouvrir-la-porte-a-la-transparence-fiscale

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