Le Centre hospitalier intercommunal de Fréjus Saint-Raphaël et la Chambre régionale des Comptes

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Centre hospitalier intercommunal de Fréjus Saint-Raphaël (Var)

La chambre régionale des comptes Provence-Alpes-Côte d’Azur a contrôlé, à compter de 2013, la gestion du centre hospitalier intercommunal de Fréjus Saint-Raphaël (département du Var).

La chute brutale des recettes à compter de 2015, du fait d’une baisse de l’activité, et le niveau élevé des charges, ont fortement dégradé sa situation financière.

Les plans de redressement successifs et les aides conséquentes de l’agence régionale de santé n’ont pas permis de restaurer l’équilibre financier de l’établissement.

 

SYNTHÈSE

  1. Le centre hospitalier intercommunal de Fréjus Saint-Raphaël (Var), issu de la fusion, en 1972, des hôpitaux de ces deux communes, comptait fin 2018, 543 lits et places. L’établissement se trouve aujourd’hui dans une situation alarmante et « sous perfusion » permanente de l’État, sans lequel il ne serait plus en mesure de financer son activité.

Une activité en forte diminution …

  1. Depuis 2015, l’établissement accuse une baisse marquée de son activité. À fin 2018, l’hospitalisation complète et l’activité ambulatoire s’étaient réduites de – 20 %, – 13 % séances incluses. Malgré un nombre de lits et places réduit de 13 % en médecine, chirurgie et obstétrique, les taux d’occupation restent encore nettement inférieurs aux cibles nationales.
  2. L’activité de consultations externes, comme celle d’hospitalisation, est largement portée par les urgences, ce qui traduit la faible attractivité du centre hospitalier pour des actes programmés.

… qui a dégradé la situation financière malgré une succession de dispositifs de retour à l’équilibre

  1. La situation financière du centre hospitalier s’est fortement dégradée, sous l’effet d’une augmentation importante des charges, puis d’un effondrement des recettes à compter de 2015 en raison de la baisse d’activité.
  2. L’autofinancement est aujourd’hui très insuffisant. Il ne couvre plus l’annuité en capital de la dette depuis 2014 et ne participe donc plus au financement de nouveaux investissements. Ces derniers, réduits au minimum (principalement aux questions de sécurité), ont été financés par des aides de l’agence régionale de santé (ARS), quelques nouveaux emprunts (dans une tendance globale de désendettement) et des prélèvements importants sur le fonds de roulement, qui n’est désormais plus à même de soutenir la trésorerie.
  3. En conséquence, les délais de paiement des fournisseurs ont été fortement allongés et représentent plus du double des délais réglementaires. Les difficultés ont ainsi été déportées sur le tissu économique qui assure, de fait, la trésorerie de l’hôpital. Si les tensions sur les approvisionnements sont réelles, les conséquences financières sont en revanche résiduelles voire nulles selon les années, les intérêts moratoires réglementairement dus n’étant pas mandatés.
  4. Les aides conséquentes et croissantes de l’ARS (plus de 12 M€ entre 2016 et 2018) en font l’établissement le plus aidé de la région (hors centres hospitaliers universitaires), sans que cela ait permis le retour à l’équilibre, pas plus que les différents plans de redressement qui se sont succédés.
  5. Mi-2019, une nouvelle étape a été franchie avec la présentation d’un dossier de retour à l’équilibre devant le comité interministériel de la performance et de la modernisation de l’offre de soins hospitaliers (COPERMO). Contrairement à la doctrine habituelle de cette instance, le plan d’actions repose pour une très large part sur une progression des recettes. Hormis le fait que celles-ci impliquent des coûts supplémentaires, elles dépendent de la fréquentation de l’hôpital qui reste, pour partie, aléatoire. La fragilité du plan d’actions concerne également les économies à réaliser qui dépendent dans une mesure importante d’acteurs extérieurs à l’établissement (les gains sur les achats au travers du groupement hospitalier de territoire par exemple).
  6. Quand bien même l’ensemble des objectifs définis dans le plan d’actions serait atteint en 2023, l’autonomie financière de l’établissement ne serait pas pour autant restaurée.

Une restructuration très tardive d’un bloc opératoire vétuste

  1. Le bloc opératoire, secteur central des établissements de santé, a fait l’objet d’une restructuration entre 2016 et 2018. Alors que plusieurs documents faisaient état de non-conformités, de dysfonctionnements importants repérés de longue date, les travaux, programmés en 2014, n’ont été réalisés qu’à partir de 2016. L’état de vétusté a justifié une alerte de la Haute autorité de santé lors de sa visite de certification qualité début 2016.
  2. La rénovation a été prévue à l’identique sans intégrer la baisse d’activité alors constatée et la décision concomitante de fermer deux des salles d’opération.
  3. Alors que l’hôpital estimait initialement l’opération à un million d’euros, le coût s’est, au final, élevé à près de deux millions et demi d’euros, sans que ce dérapage, constaté au moment de la passation des marchés de travaux, n’ait été anticipé par l’établissement ou son maître d’œuvre.
  4. Compte tenu de sa situation financière dégradée, l’hôpital n’a pas été en mesure de supporter le coût de cette opération finalement financée dans son intégralité par l’ARS. Le retour sur investissement qui était attendu n’a, en outre, été atteint que pour moitié.
  5. Du fait de la diminution de l’activité, le bloc opératoire est aujourd’hui en surcapacité. Son organisation reste en outre à améliorer pour réduire les importants coûts de fonctionnement.

Une situation qui ne peut perdurer en l’état

  1. Dans l’immédiat, l’établissement ne peut continuer de fonctionner sans recours permanent à des aides régionales et nationales. Le plan d’actions COPERMO ne permettra pas de restaurer les équilibres financiers de l’établissement en 2023. Aux actions actuelles devra donc succéder une nouvelle période d’efforts, probablement plus structurels pensés à l’échelle du territoire.
  2. Dans ce laps de temps, le centre hospitalier ne pourra assurer le financement de ses investissements lourds. Ceux-ci seront soit financés par l’ARS, soit mis en attente au risque d’une vétusté accrue alourdissant d’autant leur coût.

Des atteintes fortes à la concurrence dans la commande publique

  1. Des irrégularités récurrentes et persistantes ont été constatées en matière de
    commande publique.
  2. Ainsi, alors que la compétence « achats » a été transférée au groupement hospitalier de territoire du Var depuis le 1er janvier 2018, le centre hospitalier, en attendant la passation de marchés groupés par l’établissement support, a prolongé de nombreux marchés par voie d’avenants et, pour certaines fournitures, passe commande à ses fournisseurs sans aucun support juridique. Ces pratiques irrégulières, contraires aux règles d’accès à la commande publique et qui exposent leurs auteurs aux sanctions prévues dans ce domaine, doivent cesser immédiatement.
  3. Jusqu’en 2017, le recours aux agences d’intérim médical, était réalisé sans marché, ni mise en concurrence organisée comme cela aurait dû être le cas.
  4. De même, s’agissant de l’utilisation du domaine public, l’hôpital a autorisé en décembre 2018 l’installation d’une centrale photovoltaïque par un fournisseur, sur un de ses parkings, sans mise en concurrence alors que celle-ci est obligatoire depuis avril 2017.

RECOMMANDATIONS

La chambre formule trois recommandations :

Recommandation n° 1 : Élaborer et signer les contrats de pôles.

Recommandation n° 2 : Renforcer les relations avec la médecine de ville afin d’améliorer les filières d’adressage.

Recommandation n° 3 : Calculer les tarifs journaliers de prestations conformément à la réglementation.

 

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