L’assassinat politique : seulement le « poison russe » ?

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Ce 13 mars en ouvrant la télé, je tombe sur l’émission « C dans l’air » où quatre spécialistes débattaient sur les soupçons qui pesaient sur la Russie de Poutine concernant la mort par empoisonnement d’un ex-espion russe réfugié à Londres.

Thérésa May y voyant la « très probable main de Moscou », forcément et une occasion de faire oublier son isolement politique. En vertu de quoi elle vient de suspendre les contacts avec la Russie, tenue pour responsable, d’expulser 23 diplomates russes (sur 59), annonçant que les membres du gouvernement et de la famille royale ne se rendront pas à Moscou à l’occasion de la coupe du monde de football cet été. Ca, c’est de la justice expéditive !
Loin de nous l’idée d’écarter cette hypothèse et de voler au secours de l’hôte du Kremlin en passe de devenir, lui aussi, président à vie de la Russie et d’y faire régner un parfum d’empire avec tous les abus de pouvoirs que cela entraîne, on n’a que trop d’exemples sur tous les continents, même là où on se gargarise de « démocratie » et de « République » et où l’on brade le patrimoine public -même stratégique et qui rapporte à l’Etat- à des sociétés privées qui le gèrent au seul profit de leurs actionnaires et au détriment des contribuables.

Ce que démontrait magnifiquement l’émission du soir d’Elise Lucet sur la gestion de l’eau et les scandales des délégations de service public à des multinationales (Véolia, Suez et SAUR) qui se partagent l’essentiel du marché dans la plupart des grandes villes sans véritable contrôle et souvent sans scrupules. Il en ressortait que les privatisations c’est le contraire de l’efficacité !

« Le poison russe », sur la 5, donnait l’impression que l’on ciblait une puissance européenne qui existe et qui veut être reconnue mais dont cette Union (?) européenne ne veut pas, associée à l’OTAN alors que la Russie n’a pas les mêmes alliés, notamment au Moyen-Orient où la guerre fait rage. Ni les mêmes intérêts. Le monde est devenu multipolaire. Il faudra s’y faire et coopérer, c’est mieux que de montrer son arsenal nucléaire.

D’où le malaise parmi les intervenants sur cette diabolisation à sens unique voulue par la chaîne publique où ils exprimaint l’idée que de telles méthodes étaient assez répandues en occident comme ailleurs et qu’entre services secrets on essayait le plus souvent de trouver une sortie discrète et consensuelle. Surtout quand on n’est pas pris la main dans le sac.

Thérésa May n’a pas fait trop parler d’elle lorsque fin février, en Slovaquie, membre de l’UE, un journaliste et sa femme étaient assassinés par balles à leur domicile. Il enquêtait sur la corruption et la fraude fiscale…

Aux États-Unis Trump vient de limoger son secrétaire d’État aux affaires étrangères et a nommé, pour le remplacer, le directeur de la CIA, Mike Pompéo. Tout un symbole, un ultraconservateur sans état d’âme. A ce poste c’est utile. D’autant que, dans la foulée, c’est une femme d’expérience qui lui succédera à la tête de la célèbre agence de…renseignements, euphémisme s’il en est.

La directrice-adjointe, Gina Haspel monte en grade et sera la première femme à la tête de la CIA. Le Monde n’hésite pas à la présenter comme « la mémoire sombre de la CIA » (1) vu « sa participation au programme de prisons secrètes et de torture, adopté par la CIA après le 11 septembre.

Voilà qui ne saurait déplaire à Trump pour qui « la torture ça marche » !

Il ne fait que renforcer ce que disait un de ces assassins financiers repentis, John Perkins dans son ouvrage « Les confessions d’un assassin financier…révélations sur la manipulation des économies du monde par les États-Unis », sorti en 2004.(2)

De très nombreux ouvrages existent -sans parler des milliers de films- qui nous vantent les aventures de ces espions patriotes quand ils sont de l’Ouest et barbares quand ils n’en sont pas ! Car, c’est bien connu nous sommes le « monde libre » même si nous avons colonisé et pillé la planète entière jusqu’à la moitié du 20è siècle, au nom de « nos valeurs civilisatrices ». En toute humilité.

Malheureusement tous les services services secrets des grandes puissances -et des moins grandes- ont à leur actif des pratiques qu’elles cherchent à dissimuler, par définition mais dont nous ne pouvons douter qu’elles font appel à des procédés sophistiqués pour, le cas échéant, éliminer physiquement, les individus jugés suffisamment dangereux par les pouvoirs en place.

Alors donner des leçons et braquer le projecteur sur une seule puissance en triant dans l’actualité sans se poser de questions sur tous les actes que nous avons pu commettre relève d’une volonté de manipulation de l’opinion. Des intervenants ont tenté de s’en démarquer.

Depuis le scandale du Rainbow Warrior commandité par un ministre d’État, Charles Hernu, en 1985, ne se serait-il rien passé dans le silence des officines ? Pour ne prendre que ces exemples : le génocide des Tutsis au Rwanda en avril 1994 et le rôle de nos forces militaires, en a-t-on fini avec la vérité ? Et le procès de Tarnac, 11 ans après des condamnations arbitraires pour terrorisme ?? Et l’emprisonnement de l’avocat franco-palestinien Salah Hamouri dans les geôles israeliennes depuis 200 jours ? Et la criminalisation de l’action syndicale ?…

Les faux rapports, les mensonges d’État, les non déclassifications de documents, le secret-défense etc…tout cela devrait inciter les chaînes publiques à un peu plus de hauteur, à un peu moins de suivisme de la parole présidentielle…Macron volant au secours de May…

Comme si elle était parole d’évangile.

René Fredon
(1) http://www.lemonde.fr/international/article/2018/03/13/gina-haspel-la-memoire-sombre-de-la-cia_5270369_3210.html

(2)http://openyoureyes.over-blog.ch/article-perkins-john-les-confessions-d-un-assassin-financier-pdf-116914181.html

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