L’Air du Temps entre en Festival

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Voilà une bonne nouvelle pour la musique dans le Var. Dans moins d’un mois le Festival L’Air du Temps proposera sa première édition au Thoronet. De l’abbaye à la place du village, du XIVème au XXIème siècle, on pourra découvrir  des musiques  de la Corse à l’Angleterre en passant par l’Espagne ou l’Italie. Tout cela grâce à la dynamique et riche  personnalité de son directeur Maxime Vagner de Prodig’Art.

Il dit :
« La France compte 36 000 et quelques communes toutes dépositaires d’une histoire, de traditions et d’une lignée singulière. Vouloir participer à l’émergence d’une dynamique culturelle d’un territoire implique de s’inspirer de la genèse de ses reliefs et de ce qui a pu façonner les générations d’hommes et de femmes qui le constitue. L’écueil pourrait être, dans le cas contraire, de créer une animation hors-sol reçue à juste titre avec indifférence.

Expérience et compétence
C’est fort de 6 années passées à travailler sur le territoire du Cœur du Var en tant qu’administrateur des Rencontres Internationales du Thoronet que j’ai pu mesurer l’étendue des attentes et des besoins d’une population dont l’accès à la culture doit devenir une évidence et un réflexe. Or l’offre culturelle sur ce territoire y est rare et le danger de voir s’y implanter une culture de masse médiocre très présent. Plus problématique encore, l’accès à la pratique artistique collective ou individuelle n’est pas facilité en raison d’un très faible nombre d’équipements dédiés.

Retour au territoire
 L’animation culturelle de ce territoire est indispensable. Deux événements y ont contribué : Les Rencontres internationales du Thoronet et les Nuits blanches. Deux festivals aux esthétiques diamétralement opposées qui s’adressent à un public très différent. Deux logiques d’implantation contraires, avec l’un qui se déploie au cœur du village et l’autre à l’Abbaye, et qui ont inconsciemment éclairé la scission entre un village et son patrimoine culturel, l’Abbaye du Thoronet.

Mettre en valeur le cœur du Var
C’est à cet endroit que ce nouveau projet de festival souhaite travailler : réconcilier un territoire et son histoire en créant des passerelles entre le village et l’Abbaye du Thoronet, entre musiques savantes et populaires, anciennes et modernes ; animer le chemin qui les relie en favorisant la mobilité des publics. Au départ concentrée sur le Thoronet, cette démarche rayonnera ensuite sur tout le Cœur du Var.

Pour y parvenir, la pratique artistique sera, dès septembre 2021, notre « fer de lance » afin d’amener tout un chacun à découvrir le chant, base commune de toute pratique collective ne nécessitant pas de moyens importants et d’infrastructures particulières.

C’est pourquoi, chaque année, un projet de création sera déployé sur tout le territoire afin d’y impliquer enfants, jeunes, moins jeunes, séniors. Il sera proposé en ouverture du festival.

Croisement des sensibilités et des goûts
La programmation sera éclectique afin de croiser le plus possible les publics, sans élitisme ni démagogie. Elle s’attachera à être en adéquation avec les lieux qu’elle investira. Elle cheminera à travers les musiques anciennes, de création, de tradition populaire aux musiques classiques dans un grand écart assumé prétexte au croisement des publics.

Ce festival reflétera l’envie profonde et sincère de proposer d’authentiques moments de découverte et de partage dans l’ambiance festive et conviviale d’une programmation internationale au cœur de l’été. » Maxime Vagner

Un riche programme ouvert sur le monde
Ensemble Napulitanata
Mercredi 30 juin à 20h30
Place du village du Thoronet

L’Ensemble Napulitanata est né de la rencontre de cinq amoureux de la musique Napolitaine.

Forts de leur passion commune, ils font revivre l’Art de la mandoline virtuose forgé dans les rues d’une Naples à la fois joyeuse et nostalgique. Napoli…quelle vie, quel bouillonnement !

N’ayant jamais cessé de s’ouvrir au monde, cette cité multimillénaire inspire l’Ensemble Napulitanata qui redonne un nouveau souffle à la musique populaire napolitaine, en préservant toute son authenticité. Le répertoire comprend des « tarantelle », des pièces instrumentales traditionnelles et des  chansons classiques napolitaines, de 1600 jusqu’à nos jours !

Compagnie Rassegna
Jeudi 1 juillet à 20h30
Place du village du Thoronet
Avec « Il Sole non si muove », la Compagnie Rassegna se penche sur la circulation des chansons profanes à la fin du XVIème siècle. A cette occasion, flute kaval, luth arabe, basse, guitare baroque ou électrique invitent la viole de gambe à accompagner les chanteurs de la compagnie.

Au programme, des pièces issues des répertoires de chansons italiennes (frottole), espagnoles ou portugaises, des chants issus du « Hawzi » (genre né au XVIème siècle dans la ville algérienne de Tlemcen), ainsi que des airs turcs et arméniens caractéristiques de cette époque. En parallèle de ce répertoire méditerranéen, un autre se dessine : venus de l’Angleterre élisabéthaine, des Ayres de Dowland et de Hume, ou des extraits des « cris de Londres », ponctuent le déroulé du concert. Ils rappellent que cette époque fut celle des flux et des échanges autant que celle des territoires et que, européen avant l’heure, le musicien de la Renaissance circulait en permanence, croisant déjà̀ les influences et les sonorités, pleinement acteur d’un monde en mouvement.

Voilà̀ vingt ans que la Compagnie Rassegna croise les musiques populaires de Méditerranée. Croiser, ce n’est ni fusionner, ni séparer. Ni assimiler, ni exclure. C’est mettre en tension. C’est interroger les singularités autant que les ressemblances, et relier des éléments a priori distants, prétendument étrangers, pour en dégager des analogies fécondes. C’est douter des oppositions, trop souvent évoquées – en musique comme ailleurs – réduisant l’infini au binaire, et des cloisonnements qui en découlent. C’est, pour finir, questionner les manques, les creux, les intervalles, qui souvent nous définissent plus justement que les trop-pleins, les bosses ou les frontières.

« Il Sole non si muove ». Un titre qui ne devait être que provisoire, mais qui a su prendre sa place, patiemment. Celui d’une création et d’un moment dans l’histoire de la compagnie, consacres à l’étude des musiques nées durant le XVI siècle en Méditerranée et en Angleterre, ainsi qu’à leur circulation dans l’espace et le temps.

Un projet qui joue des anachronismes, s’amuse des concordances, et nous permet de fréquenter, à cinq siècles d’écart, des compositeurs et des poètes nés au cœur d’une époque faite d’entre-deux, d’interstices et de clairs-obscurs. Un programme, enfin, qui nous confie les espoirs, les peurs, les joies et les larmes d’hommes troublés de sentir leur monde sur le point de faire la culbute. Et qui nous ressemblent comme des frères.

Vendredi 2 juillet à 20h30
Musica Nova
Abbaye du Thoronet
Messe de Nostre Dame  de Guillaume de Machaut
Musica Nova, riche de son expérience dans l’interprétation des ballades et motets de Guillaume de Machaut, propose de remettre sur le métier la plus emblématique des œuvres de ce compositeur : la célèbre messe dite Nostre Dame.
Sa construction très élaborée et ses étranges et subtiles harmonies forcent toujours l’admiration. Musica Nova en propose une version issue de recherches approfondies sur la musica ficta au XIVe siècle, menées avec l’aide précieuse du musicologue Gerard Geay. Il en ressort une œuvre aux sonorités inouïes, inédites à ce jour.
Pour interpréter pleinement cette musique, les chanteurs ont dû travailler sur les différentes sources existantes en utilisant les techniques de lecture de l’époque, afin de retrouver un phrasé et un geste vocal plus proches des volutes des manuscrits originaux.
Apparentée avec les nouvelles formes musicales de l’Ars Nova, cette œuvre sera précédée d’un florilège de motets isorythmiques d’auteurs célèbres comme Philippe de Vitry, mais aussi de simples anonymes et bien sur le chanoine de Reims, Guillaume de Machaut.

L’interprétation originale que propose Musica Nova de cette partition fondatrice des messes cycliques des siècles suivants, entend donc bien célébrer l’immense génie du plus grand compositeur et poète de son temps, tout en continuant à percer les secrets de son chef-d’œuvre inégalé.

Abbaye du Thoronet
A Filetta
Samedi 3 juillet à 20h30
Abbaye du Thoronet
La musique d’A Filetta est une traversée… On pourrait dire qu’il s’agit d’une proposition vocale polyphonique contemporaine exigeante, audacieuse, issue d’une puissante tradition orale.
C’est en 1978 que de très jeunes gens – parfois adolescents, mus par une volonté́ farouche de contribuer à la sauvegarde d’un patrimoine oral en plein déclin – se sont mis en route… et leur route aura été́ longue, parfois sinueuse mais jalonnée de découvertes et de rencontres exceptionnelles. Les chanteurs avouent d’ailleurs volontiers que « la rencontre » est inscrite dans leur ADN musical. C’est ce qui explique probablement qu’ils n’aient pas voulu circonscrire leur voyage au périmètre de leurs racines : pousses par les rivages d’une tradition reçue en héritage, ils se sont très vite ouverts à d’autres : autres territoires, autres disciplines, autres artistes (interprètes, compositeurs, metteurs en scène, chorégraphes).

Le répertoire aujourd’hui produit par ce sextuor vocal, est un fidèle reflet de ce qu’est, depuis le début des années 80, sa marche en avant : une trajectoire esquissant un mouvement initié dans une oralité́ séculaire et s’affirmant dans les méandres d’une écriture décomplexée et affranchie de toute obligation filiale ; s’y côtoient des chants sacrés ou profanes aux influences diverses, des musiques de film de Bruno Coulais, des compositions pour des chorégraphies de Sidi Larbi Cherkaoui, des extraits du chœur d’une tragédie antique ou encore des pièces issues d’un requiem commandé par le festival de Saint-Denis.

Une musique au service d’une vision du monde rejetant sans ambigüité́, tout repli identitaire et dont la philosophie pourrait se résumer à ce bel aphorisme de René Char : « Les plus pures récoltes sont semées dans un sol qui n’existe pas ; elles éliminent la gratitude et ne doivent qu’au printemps ».

Infos et réservations : contact@festivalairdutemps.com

Jean-François Principiano

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