Into the woods à l’opéra de Toulon

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Promenons-nous dans les bois…quatre contes revisités par la psychanalyse et le monde actuel

…Une histoire à double fond…
Créé à Broadway en 1987, la comédie musicale Into the woods (que l’on pourrait traduire par Promenons-nous dans les bois) mêle l’intrigue de quatre contes de l’enfance (Cendrillon, Le Petit Chaperon rouge, Jack et le haricot magique et Raiponce) au destin d’un couple victime du mauvais sort d’une sorcière et dont le désir de fonder une famille va bouleverser le cours des événements.

Dans la forêt, « lieu commun à toutes ces histoires, symbole du monde obscur de notre inconscient pour le psychanalyste Bruno Bettelheim, » les personnages se perdent, se retrouvent, s’échappent pour mieux y retourner et tenter d’apprendre à vivre ensemble malgré leurs différences. La mise en scène d’Olivier Bénézech (Follies, 2013 et Sweeney Todd, 2014), pour qui Sondheim (né en 1930) élève le « Musical » à son plus haut niveau de perfection, porte un regard résolument moderne et décalé sur cette œuvre riche et exigeante dont le rythme, l’humour et l’efficacité scénique en font un pur moment de divertissement raffiné.

…Des contes pour le temps présent…

Olivier Benezech

Olivier Benezech précise sa pensée « L’idée de Stephen Sondheim et James Lapine, à partir de plusieurs contes classiques européens, a été d’écrire un Musical avec la forêt comme dénominateur commun à toutes ces histoires. Au milieu des sentiers parfois sombres des bois, on découvre deux Princes pas toujours «charmants», Raiponce proche de la folie à cause de sa mère abusive, Jack qui passe brutalement de l’adolescence à la maturité en assumant ses pulsions sexuelles et ses désirs de vengeance, le petit Chaperon Rouge n’est pas vraiment effrayée par le loup, et un couple pauvre de vendeurs de pain, victimes de la persécution d’une sorcière et de la difficulté à franchir les barrières sociales lorsque que l’on ne naît pas avec une cuillère en argent dans la bouche. »

Ces figures finissent toutes par se rencontrer, se connaître, se désirer et se haïr. Mais tout est bien qui finit bien et à la fin du premier acte, les conflits sont résolus et le spectacle pourrait s’arrêter là.

Cependant, au second acte, ce monde champêtre devient dangereux. Suite à la mort de son mari tué par Jack, une géante sème le désordre et la mort dans cet univers autrefois idyllique. Les personnages devront apprendre à vivre avec la terreur et s’entraider en face du danger. Mais la solidarité va se mettre en place et sauvera du désastre ceux qui ont survécu.

 …des forêts obscures…

IntoTheWoods©Frédéric_Iovino

« Into the Woods est une relecture déjantée des contes de fée classiques, écrit à l’ombre de l’essai sur la psychanalyse des contes de fées de Bruno Bettelheim, paru en 1976. » Considérant que l’ensemble de cette œuvre n’est autre qu’une longue séquence d’analyse, Bénézech démarre l’action dans un salon de psychanalyse. Le narrateur est celui qui confrontera les personnages à leurs rêves et pulsions, jusqu’au moment où, évidemment, ces derniers le tueront.

Créé au plus fort des années Sida (1987) Into the Woods a d’ailleurs été interprété comme une image de la solidarité nécessaire pour faire front en des temps difficiles. L’œuvre n’a donc rien perdu, malheureusement, de sa force, même si les combats des années 80 ne sont plus les mêmes aujourd’hui.

…À nos fantasmes.
Ainsi il s’agit d’une  mise en scène  qui revisite l’œuvre (on est loin du film édulcoré de Walt Disney). L’atmosphère  est bien différente, face à des événements que Sondheim n’avait pas forcément envie d’exprimer dans les années 80 : le terrorisme, les catastrophes écologiques, la violence homophobe, le Sida, la montée des inégalités et des exclusions. « Une ambiance de légende urbaine contemporaine où les peurs font partie intégrante du quotidien de millions d’humains. »

Opéra de Toulon « Into the woods » de Stephen Sondheim adaptation et mise en scène d’Olivier Benezech avec Samuel Sené, (direction)  Johan Nus, (chorégraphie), Dalia Constantin, Jasmine Roy, Charlotte Ruby, Alyssa Landry, Scott Emerson, Grégory Garell,  Jérôme Pardon et Sinan Bertrand. Orchestre de l’Opéra de Toulon.

Prix de 5 à 35€ infos 04 94 92 70 78

Samedi 9 nov. 20h et dimanche 10 nov. 14h30

Laurent Valiere Credit:SADAKA EDMOND/SIPA/1811280037

Une conférence, proposée conjointement par La Camerata et Opéravenir, de Laurent Valière producteur de l’émission 42emme Rue sur France Musique  sera donnée le mardi 5 novembre à 18h à l’Opéra. « Sondheim de West Side Story à Into the woods »   Entrée Libre.

Jean-François Principiano

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