G20, « libre-échange » : on ne nous dit pas tout !

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Après le TAFTA, avec les États-Unis, le CETA, avec le Canada, un autre accord avec le Japon, le JETA fait son apparition dans l’actualité, au moment du G20. On en entend parler une fois les accords passés au niveau de la commission européenne. Comme si c’était fait, que les peuples n’avaient pas besoin de s’en faire, les parlements nationaux ne pouvaient que confirmer les choix des autorités non élues de Bruxelles !

À Hambourg, on y a vu Justin Trudeau, le premier ministre canadien, tout sourire, s’entretenir avec J-C Junker au sujet de la mise en oeuvre du CETA qui ne saurait attendre, puisque l’Europe est d’accord ! Il a aussi affiché sa proximité avec E. Macron dont il ne doute pas de la bonne volonté à cet égard.

Le G20 est l’occasion d’une mise en scène de chefs d’États détendus, souriants, tous très heureux de se retrouver là pour faire le point sur les grands sujets qui embrasent la planète. On aura droit à des commentaires sur leurs apparences, la fermeté de leurs poignées de mains, les tapes dans le dos, la bonne humeur qui règne.

Une fois les lampions éteints, chacun se réjouira de l’atmosphère très conviviale puis, devant son opinion publique, tentera d’expliquer qu’il a été ferme sur les désaccords avec un tel ou un tel mais qu’on a avancé dans la volonté d’organiser le monde dans le bon sens. Et tout continuera comme avant.

Il y aura bien un communiqué pour acter ce qui peut l’être, l’unité des 19 contre Trump réaffirmant leurs engagements sur le climat à Paris, c’est du très long terme. Il ne manque plus que les moyens.

Trump poursuivra son numéro de champion du protectionnisme « patriotique », se retirant de la conférence de Paris sur le climat, rompant les relations commerciales avec le Japon, tout en montrant sa puissance militaire sur tous les continents. Il sera tout de même l’invité d’honneur de la France le 14 juillet. Poutine après avoir désamorçé les leçons de morale gardera le contrôle dans sa sphère d’influence.

Tandis qu’au Moyen-Orient les grandes puissances font mine de ne pas être concernées par la tentative de l’Arabie saoudite d’isoler l’Iran, la Turquie et le Qatar jugées pas très « démocratiques », ce qui n’est pas faux mais où sont les vraies démocraties dans le secteur ? On n’en est pas sorti !

Tous se proclament « unis contre le terrorisme » qui se déplace dans les pays occidentaux, après avoir semé la terreur parmi les populations qui fuient les guerres dévastant leurs pays et les précipitent aux frontières de l’Europe en vagues de plus en plus nombreuses où elles sont très diversement accueillies…quand elles y arrivent ! Heureusement il y a des solidarités qui pallient les carences institutionnelles. Comment peut-on s’en prendre aux aidants ?

Les États européens se montrent incapables de faire face à cet exode perçu par certains sous un angle particulièrement abject, du fait de la religion des réfugiés suspectés d’être proches des djihadistes alors qu’ils en sont les premières et principales victimes. La France est une terre d’accueil.

Nos chefs d’États européens continueront à se montrer optimistes et déterminés à mettre de l’ordre dans tout ce bazar et à organiser le business pour leurs entreprises, particulièrement les grandes dont le capital est devenu internationalisé. Il n’y a plus qu’à expliquer aux peuples qu’il y va de leurs intérêts. Ce qui devient de plus en plus difficile à rendre crédible.

La démocratie se réduirait-elle aux intérêts des multinationales ?
Qu’ils nous expliquent alors pourquoi ces traités dits de « libre échange » ne peuvent faire l’objet d’un débat public, en amont ? Qu’est-ce qui les inquiètent, le contenu ? Quelles garanties ? Seraient-ils préjudiciables à nos intérêts nationaux, à nos règles de droit, social et environnemental, ne respecteraient-ils pas les dispositions qu’on a tant de mal à faire adopter ou même à conserver ? (C’est tout l’enjeu de la réforme du droit du travail…par ordonnance, vive la démocratie !)

De tels accords ne sauraient en effet les aggraver et, en cas de conflits, ce doit être la justice de nos pays qui tranche. Et pas « un tribunal arbitral » désigné par les mis en cause.

C’est pourtant ce qui est prévu dans ces accords : une multinationale investissant à l’étranger peut porter plainte contre un Etat qui adopterait une politique publique contraire à ses intérêts…et elle pourrait demander des dédommagements auprès d’un tel tribunal arbitral !

Ce qui explique l’opacité qui entoure ces accords discrètement élaborés pendant des années, pour ne pas que l’opinion, les citoyens s’en mêlent. En même temps, cela renforce la suspicion des peuples qui voient qu’ils ne sont ni consultés, ni considérés et que cette Europe-là persiste et s’enfonce dans l’austérité dont ils font seuls les frais tandis que les profits des « gros » (pas de toutes les entreprises) progressent et font le bonheur…de leurs actionnaires.

Ils sont tellement pressés qu’ils veulent que ces accords soient mis très rapidement en application…à titre provisoire, en attendant la ratification par les parlements nationaux !! Tellement ils veulent mettre les peuples devant le fait accompli sans lui permettre de s’intéresser au contenu qui va donner au « libre échange » qui surfe sur la liberté totale de la finance de circuler au gré de ses intérêts à elle .

Celui avec le Canada, le Ceta, s’appliquerait dès le 21 septembre 2017, selon le journal Libération.
Ils pilonnent en se montrant certains de la confirmation des parlements nationaux, tous acquis au libéralisme économique, à la libre circulation des marchandises et des capitaux, beaucoup plus sélectivement que celle des hommes…

Illustration de la « démocratie » : le parlement européen n’a jamais été informé de l’existence d’un tel accord avec le Japon. Patrick Le Hyaric député européen PCF-Front de gauche est intervenu à la tribune du parlement européen pour dénoncer cet état de fait.

« Nous ne connaissons même pas le mandat de négociation alors que la Commission européenne fait le forcing pour que ce projet soit annoncé demain, juste avant le sommet du G20 de Hambourg. A-t-on informé notamment les travailleurs européens de l’automobile des possibles conséquences d’un tel accord sur leur industrie et sur l’emploi ? Évidemment non. Ce projet comporte, comme ses récents prédécesseurs, un tribunal pour investisseurs, qui permet à ceux-ci d’attaquer une loi ou une mesure décidée souverainement si elle porte atteinte à leurs profits présents et futurs. L’année dernière, c’était l’un des éléments déclencheurs de la résistance de la Wallonie contre le traité de libre-échange avec le Canada, qui a fait plier la Commission »…

Combien de temps faudra-t-il pour sortir de ces « messes entre-soi » au cours desquelles les élites politiques libérales se révèlent plus soucieuses de préserver leurs privilèges et leurs pouvoirs que de prendre en compte les réalités sociales et environnementales, l’intérêt général qui n’est pas le même que celui des maîtres de l’économie et de la finance dont ils font partie ou qu’ils servent sans doute par conviction mais pas par désintéressement.

Ceux qui possèdent et accumulent les richesses -le système capitaliste qu’ils nous imposent- aggravent toutes les inégalités et meurtrissent la planète. Combien de temps encore serons-nous dirigés par les fondés de pouvoirs des milieux financiers et des affaires ?

Il nous reste le nombre et la conscience que l’on ne va pas regarder balayer nos conquêtes sociales, ni renoncer à changer de cap et de rythme pour passer à la transition écologique, sans résister.

Faisons-nous entendre, collectivement.

René Fredon

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