« François Halard. Fragments divins » à l’abbaye du Thoronet

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Le Centre des monuments nationaux présente l’installation de François Halard « Fragments divins » du 24 juin au 17 septembre à l’abbaye du Throronet. L’artiste y présente trois installations distinctes de polaroïds agrandis et retravaillés sous le commissariat de Thomas Fougeirol.

À l’invitation du Centre des Monuments Nationaux, l’abbaye du Thoronet a demandé à l’artiste François Halard de mettre en résonance son Œuvre avec cette architecture cistercienne emblématique par sa simplicité, sa pureté et son dépouillement.
Dans le champ de la photographie, François Halard a une place singulière, celle d’un très grand photographe d’architecture intérieure nourrit par la passion des fragments antiques et archéologiques, des décors du dix-huitième siècle, des peintures abstraites et radicales de la modernité et des photographies expérimentales et documentaires des années Vingt. Il a une manière d’habiter la photographie qui a l’élégance des grands peintres. Comment dire et capturer ce que l’on a devant soi, cet indicible qui est l’épreuve irrésoluble du photographe, François Halard s’y confronte comme un peintre le fait, par la facture, le flou, l’éclairage low-key et les prises de vues successives, comme pour mieux donner une texture et une peau à tout ce qu’il capture. Il vit entouré des fragments magiques récoltés et collectionnés au cours de ses voyages, qu’il n’a de cesse de mélanger, de surimposer et de faire dialoguer à travers le temps. Mais c’est dans le changement d’échelle de ses polaroids, certains altérés par une chimie instable, qu’il a su s’adonner à son tachisme minimal et extatique pour mieux brouiller le punctum. Tout processus créatif implique la chance et de temps à autres la grâce et il y a probablement une éthique dans l’usage du hasard, comme si le résultat pouvait nous apporter une nouvelle connaissance.

Pour cette exposition, François Halard présente trois assemblages distincts et la plupart des œuvres ont été conçues spécialement pour le projet. Le premier ensemble se trouve dans le dortoir des moines, ce sont dix-huit polaroids agrandis couchés sur le sol formant un grand Haïku visuel, plusieurs typologies d’images s’y croisent, fragments de sculptures antiques et vues d’atelier d’artistes, certaines photos sont imbibées de coulures de cire, d’autres chimiquement altérées. La photographie est, la plupart du temps, manipulée horizontalement, sur des tables, ce rébus en damier permet de ne pas imposer une image mais de laisser les spectateurs découvrir, au fur et à mesure de leur avancée, l’apparition des œuvres. Ce dispositif a aussi une dimension sculpturale dans sa manière de dialoguer avec la verticalité des lieux. Dans la salle capitulaire ou salle du chapitre dans laquelle se réunissaient les moines pour résoudre les problèmes de la communauté, cinq grandes photos sont posées sur les gradins, ce sont des fragments d’architecture du mexicain Luis Barragan. François Halard, par l’utilisation des gros plans, nous plonge dans ce que l’artiste et théoricien russe Vladimir Markov appelait La «Faktura», que l’on peut traduire par facture ou texture, un élément essentiel de la qualité sculpturale des constructions de Luis Barragan, qui fait écho aux artistes constructivistes et aux moines constructeurs de l’abbaye. C’est aussi une immersion dans la façon dont l’architecte sculptait ses constructions avec la lumière.

Deux petits espaces autour de la salle capitulaire accueillent également chacun une œuvre, dans l’armarium ou ancienne bibliothèque une photo d’architecture de Luis Barragan et dans l’annexe du parloir une photo de la cheminée de la maison de François Halard.
Le dernier assemblage est composé des dix grands polaroids agrandis et retravaillés à la cire. Les têtes des «kosmètes» (Le Kosmète était, dans l’Athènes antique chargé d’assurer la discipline parmi les éphèbes) sont alignées comme des colonnes grecques le long de la galerie du prieuré. La répétition et le rythme des photos accompagne la qualité cinématique de ce couloir.

Thomas Fougeirol, commissaire de l’exposition, Mai 2023

 

 

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