Droite et FN : Haro sur la justice !

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F. Fillon et M. Le Pen, impliqués dans des affaires similaires d’emplois fictifs rivalisent de mépris pour la justice qui ose mettre en cause des pratiques illégales destinées à alimenter les caisses de leurs partis respectifs (dans le « meilleur » des cas) à partir de fonds publics ainsi détournés.

Le premier est convoqué mercredi 15 mars pour une éventuelle mise en examen. La seconde bombant le torse, ne répondra pas à la convocation des juges. Elle refuse d’être entendue, estimant qu’elle est victime, comme le premier, d’un acharnement judiciaire commandité par le pouvoir. Un complot quoi !

F. Fillon est tellement remonté, après le rassemblement du Trocadéro, qu’il est reparti de plus belle, sans son équipe initiale de campagne qui avait jugé périlleuse sa candidature. Lui n’a rien changé à son programme déjà très contesté dans son propre camp. Il se proclame « le seul à pouvoir redresser la France… » mais il aura du mal à se faire passer pour le chevalier blanc qui ignorait tout de l’argent public et privé qui alimentait ses proches, avec ou sans contrepartie. C’est ce que la justice cherche à démêler à partir d’indices graves et concordants.

Derniers incidents : son fils et sa fille viennent de lui faire un chèque comme s’ils remboursaient une partie de l’argent qu’ils ont touché en tant qu’ assistants parlementaires de papa ! Pas du tout : ce serait, paraît-il, pour rembourser les frais de mariage avancés par leur père et, pour le fils les sommes avancées pour son loyer. Chacun appréciera, les juges aussi.

Le 12 mars le JDD -après Médiapart- révélait l’existence d’une caisse noire au Sénat pour le compte de l’UMP ouverte en 2002 sous Chirac, où l’on reversait le non perçu des sommes prévues pour les assistants parlementaires qui n’étaient pas perdues pour tout le monde, seulement pour le parti au pouvoir, notamment pour reprendre la majorité au Sénat.

Le président Larcher n’était pas au courant ! Faut-il le croire ? Falco avait fait partie de la distribution, cela permet des « aides » aux maires dont on attend la voix, comme un « retour sur investissement » lors des Sénatoriales. Ainsi va la vie sous la Vè République, en tous points exemplaire, comme on le découvre. Le clientélisme, ça existe…si, si.

Cerise sur le gâteau, voilà que notre candidat LR reçoit 48 000 euros pour s’acheter quelques costumes et plaide sa liberté d’avoir des amis « libres » de lui faire des cadeaux. Evidemment, surtout s’ils comptent sur lui pour s’occuper de la France…en tout désintéressement, bien entendu.

Quant à la figure de proue du FN, elle a recours aux mêmes méthodes pour payer les collaborateurs politiques de son parti tout aussi « exemplaire ». Elle sait très bien que l’organisme anti-fraude de l’UE qui instruit depuis janvier 2014 cette affaire, ne lui demande pas, sans raison, les 340 000 euros versés pour deux emplois fictifs et ses deux collaborateurs (son garde du corps et sa directrice de cabinet) qui n’ont jamais été « assistants parlementaires » au Parlement européen mais permanents du FN, n’ont pas été mis en garde à vue pour le bon plaisir des magistrats. »

L’enquête a été ouverte pour abus de confiance et recel, escroquerie en bande organisée, faux et usage de faux et travail dissimulé. Un peu lourd à porter, surtout quand la sanction financière a été prise, avec menace de prélèvements. Même quand on conteste une institution, ses orientations politiques, cela autoriserait-il à en abuser à des fins de financement occulte ?

Puis ensuite à crier au loup et  désigner les juges comme étant à « la botte du pouvoir politique » pour se victimiser et tenter de cultiver une virginité vis-à-vis de ceux qui veulent bien y croire ? Elle se permet d’ironiser sur les affaires de conflits d’intérêt chez Fillon et chez Macron !

Mme Le Pen accuse, ni plus ni  moins, le pouvoir judiciaire de vouloir lui nuire politiquement, ce serait donc une justice aux ordres du pouvoir ! Accusation d’une extrême gravité qui a motivé la communication du Conseil supérieur de la magistrature (1) datée du 7 mars.

Il rappelle notamment  que « s’attaquer à l’institution judiciaire, c’est miner la démocratie et l’État de droit, qui doit garantir à tous le respect effectif de la légalité. Notre Constitution et le statut des magistrats créent les conditions de l’indépendance des juridictions…et qu’il n’existe pas de démocratie sans respect de la légalité garantie par la Justice. Il n’existe pas de Justice sans indépendance garantie par la Constitution. Il n’existe pas d’indépendance sans exigences déontologiques.  »

Mais le FN n’a que faire de ce rappel. Il prospère sur le terrain de la contestation d’un « système » qu’il prétend combattre alors que rien de fondamental dans son programme ne le remet en question. Surtout pas le pouvoir de la finance. D’ailleurs n’est-il pas un inconditionnel du milliardaire Trump qui se débat, non pas pour une autre répartition de la richesse mais pour que les puissants le restent et avec eux le creusement des inégalités.

Un seul exemple : avez-vous lu ou entendu le FN s’indigner contre la remise en cause de « l’obamacare », cette protection sociale pour les plus pauvres, instaurée par Obama ? Eh bien Trump veut la supprimer ! 10 millions de personnes en seront privées et 24 millions à terme. Elles seront « libres » de s’assurer ou non selon la doctrine de ces ultraconservateurs, champions de l’ordre social existant et de la haine de l’étranger.

Et en France, à quelle hauteur le SMIC et les annuités pour la retraite, quel montant ? Quelle durée du travail ? Quelles protections sociales ? La parité hommes -femmes ? Le pouvoir sur la finance, les banques, comment ?  Le logement, la santé, l’éducation, les transports, la culture…Les inégalités, quelles mesures ? La fraude et l’évasion fiscales, quelles dispositions ? Et tant d’autres questions, l’Europe : des peuples ou de la finance ? le monde : la paix ou la guerre ? L’OTAN et la souveraineté nationale, l’ONU et le respect du droit international, le rôle de la France…

Ces questions très concrètes sont, hélas, inaudibles dans une campagne noyée par des révélations que les candidats concernés tentent de nier et de retourner en leur faveur en faisant douter de la justice, trop zélée quand elle se mêle de leurs affaires et pas assez quand il s’agit de la délinquance petite ou grande : la justice serait beaucoup trop laxiste disent les mêmes, alors qu’elle se voit refuser les moyens budgétaires d’un meilleur fonctionnement.

Que pense le peuple d’en bas d’un tel spectacle, quand il voit les gens d’en haut, ceux-là même qui briguent les plus hautes responsabilités, en prendre à leur aise avec les fonds publics, leur argent, alors qu’ils perçoivent pour vivre, des indemnités confortables plus des frais de représentation ? Ce n’est pas le cas de tous les candidats, heureusement, loin s’en faut. Pour la plupart, leur campagne leur coûtera beaucoup d’argent et ils n’auront pas tous de généreux donateurs.

Mais en l’occurence, la suspicion et les procédures portent sur des personnalités politiques de droite et d’extrême-droite, déjà aux plus hautes fonctions, au gouvernement, dans des assemblées élues et dans leurs partis.

Raison de plus pour exiger justice et transparence et ne pas céder à la démobilisation qui ne servira pas les intérêts populaires. Invitons-nous dans le débat sur les véritables enjeux.

René Fredon

(1) http://www.conseil-superieur-magistrature.fr/sites/default/files/atoms/files/2017-03-07_communication_du_csm.pdf

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