Droit d’asile : la galère d’un jeune nigérien

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Zach, comme on l’appelle, est un jeune homme de 26 ans, vivant à Toulon et qui vient d’obtenir le droit d’asile, donc le statut de réfugié. Il avait quitté son pays, le Niger, fin 2013.

Près de 6 ans de galère. Il a été chaudement applaudi vendredi 20 juin sur la place de la Liberté, après avoir conclu le cercle du silence par une déclaration émouvante et tellement pertinente qui résume son état d’esprit et ses attentes aujourd’hui. C’était à l’occasion de la journée mondiale des réfugiés. Nous l’avons rencontré.

Qu’est-ce qui vous a poussé à quitter votre terre natale ?
 » Je risquais beaucoup d’ennuis si je restais dans mon pays. Un groupe religieux cherchait à me supprimer parce que je ne suivais pas le même chemin que lui et que nous n’avons pas un État qui garantit les droits de l’homme, le droit de penser, de circuler librement…Je n’avais que cette solution, j’étais poussé hors de mon pays par les islamistes pour sauver ma vie, comme tant d’autres. On ne part pas de son plein gré…

Quel a été votre parcours ?
« J’ai séjourné presque deux ans en Lybie à partir de la fin 2013. Un pays lui aussi très instable, très peu sûr. J’étais toujours sur le qui-vive et ne pouvais avoir aucun projet d’avenir. J’ai travaillé tant bien que mal pour survivre. Puis j’ai rejoint l’Italie où j’ai vécu durant l’année 2016. Je me débrouille un peu en Italien mais pas comme en Français…

En effet, on a pu s’en rendre compte vendredi dernier…
« Au Niger, la langue française est la langue administrative commune héritée du colonialisme. On y parle aussi de nombreuses langues maternelles comme « haoussa », la plus répandue et même enseignée dans des universités françaises et européennes.

Je sais lire le Coran, je parle un peu l’arabe littéraire. Je suis musulman mais pas du tout islamiste : mon chemin ce n’est pas le terrorisme et la dictature violente pour imposer une religion. Comme je l’ai dit dans ma déclaration : « Les guerres, les terrorismes, les violences, la déshumanisation de l’homme envers l’homme sont les causes qui font que des millions de pauvres innocents, victimes de toute ces barbaries humaines, sont contraints de quitter leur maison, de quitter leurs proches, leurs villages, leurs villes et enfin, leur pays de naissance, pour migrer dans l’incertitude, dans le doute, dans la recherche d’une forte stabilité, de paix et perdent souvent leur identité. » (1)

J’ai toujours pensé que c’est en France que je m’intégrerais le plus facilement car, compte tenu de l’instabilité qui règne dans de plus en plus de pays et pas seulement en Afrique, dans le monde entier, je ne peux sérieusement envisager un retour à court terme.

Comment vivez-vous au quotidien, quels sont vos projets ?
« A mon arrivée à Paris, le 1er juin 2017 nous avons été rassemblés dans un camp, porte de la Chapelle géré par l’OFII (office français immigration-intégration) puis répartis dans des hôtels provisoires en attente d’une régularisation. Au bout de 6 mois, 21 d’entre nous ont été dirigés sur Avignon (11) et Toulon (10) où nous avons été hébergés par l’ADOMA à la Loubière le 14 novembre 2017.

On nous donnait 200 euros par mois pour notre nourriture et notre entretien. Loin de ce que disent  certains…

Après plusieurs entretiens, on m’a délivré un certificat provisoire de 9 mois puis j’ai dû attendre jusqu’au 18/2/19 pour obtenir le statut de réfugié. Je n’avais pas attendu pour chercher à me perfectionner. Je voudrais remercier l’association « L’autre c’est nous » qui m’a aidé auprès du proviseur du lycée Dumont d’Urville pour que je sois admis comme auditeur aux cours qui m’intéressaient. Je remercie aussi le proviseur.

J’aimerais préparer et passer le bac, l’année prochaine, si j’en ai les moyens. Pour le moment j’ai un contrat de saisonnier de 6 mois, jusqu’aux vendanges. Après je devrai chercher un autre travail, il faut bien vivre. Mais ce n’est pas acquis. Avec mon statut de réfugié, valable 10 ans, je suis plus à l’aise pour en chercher…

Avez-vous d’autres activités ?
« Oui, je suis resté en contact avec l’association, je fais de la boxe et de l’aïkido dans un club toulonnais et je m’intéresse aux initiatives qui sont prises en faveur de tous les migrants, victimes de situations humaines qui les mettent dans le désarroi, ce que je ne souhaite à personne de connaître.

Je m’intègre très bien au sein de la société française et je me sens très en sécurité. Mon rêve, ce que j’aimerais : me sentir français administrativement reconnu, un jour. S’il y a un mot que j’aimerais dire de la France c’est « Merci grande France ».

Propos recueillis par René Fredon

(1)file:///C:/Users/Ren%C3%A9/Downloads/Discours%20de%20Zak%2020%2006%202019%20(1).pdf 

 

 

 

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