Deux maires PS, Castaner-Vuillemot, deux caps opposés

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L’un, Christophe Castaner, député-maire de Forcalquier n’a pas attendu la primaire socialiste pour bifurquer du côté de Macron. Il était un fidèle de l’attelage Hollande-Valls et n’avait pas hésité à appeler au désistement en faveur d’Estrosi en décembre 2015, quitte à ce qu’il ne reste plus aucun élu de gauche au conseil régional.

Il est « en marche » et va s’immerger le temps de la campagne dans son département en soignant sa communication : 10 étapes où il est sensé s’initier à 10 métiers traditionnels, « pour approcher les conditions de vie de ses concitoyens ». Un coup médiatique ? « Pas du tout, voyons ! »

La victoire de Benoit Hamon n’était pas la sienne, il avait déjà changé son fusil d’épaule, sentant que la couleur « rose » était encore trop voyante, trop difficile à porter. Il n’a pas l’impression de trahir son idéal, il a des convictions très modulables mais nettement plus libérales que socialistes. Il lui a suffi d’anticiper et de sauter sur ce qu’il pensait être le bon cheval, celui qui a le vent en poupe comme Pégase le cheval ailé qui se met au service de Zeus et qui peut vous permettre de conserver un siège de député, le cas échéant.

Il faut savoir prendre de la hauteur : le clivage gauche-droite, c’est ringard, n’être ni de gauche, ni de droite, c’est le comble de la modernité ! Au FN aussi ils ne sont ni de droite ni de gauche  mais si on gratte un tout petit peu, on trouve vite qu’ils ne touchent pas aux fondamentaux du système, ils s’en prennent à la mondialisation, pas au libéralisme. Aux migrants qui fuient « nos » bombes et Daech, le chaos, pas aux monarques assis sur le gaz et le pétrole. Comme Trump, leur modèle !

Se mettre au service des ambitions d’un banquier d’affaires, même jeune et sémillant, ce n’est guère faire acte révolutionnaire, ça prêterait même à sourire.

Comme cette découverte dévoilée à sa conférence de presse de lancement de campagne : « les 40 milliards du CICE…on s’est plantés ! » Il a tout voté à l’Assemblée nationale et, une fois le ministre de l’économie parti vers d’autres cieux, Hollande dissuadé de se représenter, Valls, battu à la primaire, C. Castaner reprend les critiques de ceux qui les portaient, dans l’hémicycle et dans la rue tandis qu’il vilipendait les frondeurs de son camp parce qu’il ne fallait pas affaiblir la majorité socialiste.

En marchant, il a également découvert que « la première préoccupation n’est pas l’insécurité, mais le pouvoir d’achat…Je n’avais pas pris conscience de ce qu’était une société qui ne paie pas le travail. » Non ? Vous vous rendez compte, un membre de la commission des finances ! Il en a mis du temps ! Macron l’a promu porte-parole.

Castaner s’entiche d’un ministre, chaud partisan de l’ubérisation, ces auto-entrepreneurs qui travaillent 60-70 heures pour des clopinettes, parce qu’ils n’ont pas le choix. C’est ça, Macron, il a de l’imagination. Il est même allé à Las Vegas inviter de jeunes Français « à avoir envie d’être milliardaires. » Déformation professionnelle. Il a du Guizot, cet homme-là

Dans ses pérégrinations, C. Castaner verra-t-il les ravages du chômage, de la précarité, du creusement des inégalités, du mal-logement, de la désertification des terres agricoles…? Rien n’est moins sûr.

Aura-t-il seulement le tact de se présenter sous une autre étiquette politique. On ose croire qu’il n’aura pas la même investiture, même si cela ne nous regarde pas.

De Forcalquier à La Seyne

Autre exemple de la diversité des parcours, celui du maire PS de La Seyne, Marc Vuillemot, à la tête de la deuxième ville du Var, seule ville de gauche de toute l’agglomération (TPM) et même au-delà, où toutes les sensibilités politiques -ou presque- sont représentées.

Il a soutenu et voté pour Benoit Hamon. Le résultat comble ses voeux. il reprend espoir, écrit-il aux maires de gauche et de l’écologie de toute la France. Pour leur dire que le message de ce vote c’était « que le PS revienne aux fondamentaux de la République sociale de Jaurès… » que son parti entende ce message et se rapproche de tous les courants de pensée qui se réclament de cet héritage.

Pour qu’ils retrouvent un langage commun. « il nous faut dépasser les postures, penser à aujourd’hui pour les Français plus qu’à après-demain pour nos appareils, confronter nos projets pour en mesurer les différences et surtout les convergences afin d’avancer vers un horizon partagé…C’est en étant unie et fidèle à ses valeurs que la gauche gagne la confiance du peuple.

Car la majorité de celui-ci est faite de salariés, de chômeurs, de petits et moyens entrepreneurs et, plus largement, par tous ceux qui se reconnaissent dans les idéaux portés dans « les jours heureux »,le programme du Conseil national de la Résistance. Cette majorité de citoyens qui n’en peut plus de devoir choisir entre droite et extrême-droite… »

Ce qui fait, à mon sens, l’originalité de cet appel, c’est que ce maire, militant socialiste ne dit pas : « tous derrière Benoit Hamon » mais que toute la gauche, celles des valeurs portées par Jean Jaurès, se rassemble et trouve les chemins de son unité pour proposer une véritable alternative sociale et écologique à vocation majoritaire. Qui, du même coup éloignera le danger de l’ultra-conservatisme et de l’aventure nationaliste du rejet de l’autre.

On ne sait pas si le maire de Forcalquier sera sensible à cet appel. On a des doutes.

Hamon aura-t-il la volonté et le pouvoir de tenir son cap, encadré par un PS loin d’être à l’unisson ?
Les deux maires illustrent le grand écart qui les sépare et qui traverse ses hautes sphères.

René Fredon

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