Un non-sens qui fragilise toute l’Université

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A la suite d’une Assemblée Générale, il a été décidé par les participants de se rendre en groupe voir le Président, M. Eric Boutin. Celui-ci a reçu la délégation en compagnie de Mme Odile Berthier, vice-présidente de la Commission de la Formation et de la Vie Etudiante. Cette réunion improvisée n’a pas permis de répondre aux diverses questions et inquiétudes des personnes présentes.

Fermeture annoncée de la Licence LLCE espagnol à l’Université de Toulon : Un non-sens qui fragilise toute l’Université
Profitant du projet d’établissement qui doit être présenté au ministère de l’Éducation Nationale et de la Recherche afin d’obtenir l’accréditation des diplômes dispensés à l’Université de Toulon, la gouvernance envisage de fermer purement et simplement la Licence « Langue, Littérature et Civilisation Étrangère » (LLCE) d’espagnol. Cette fermeture réduirait de façon importante la présence de l’espagnol à l’université qui ne serait dès lors plus enseigné de façon intensive qu’en « Langue Étrangère Appliquée » (LEA). La licence LLCE et la licence LEA sont des formations complémentaires. La première est orientée vers les métiers de l’enseignement et basée sur un approfondissement linguistique ainsi que sur une bonne connaissance de la culture et de la littérature hispaniques. La seconde vise les métiers du tourisme, de la vente et de l’import-export sur la base d’un système bilingue (anglais-espagnol).

Une telle mesure représente à nos yeux une faute de gouvernance et aura des effets néfastes sur la faculté de Lettres et Sciences Humaines et sur l’Université de Toulon (UTLN).

Le seul argument décisif présenté par la gouvernance est celui des faibles effectifs de la formation. Outre que ces effectifs sont en augmentation et qu’ils peuvent varier en fonction de paramètres autres que strictement universitaires, nous jugeons que le rôle joué par l’hispanisme dans le rayonnement de l’UTLN – dans le Var et au-delà du Var – représente un atout qui ne doit pas être mesuré uniquement à l’aune du coût d’une formation à effectifs modestes.

La Licence LLCE espagnol est encadrée par des Professeurs d’Université et des Maitres de Conférences engagés auprès de leurs étudiants et actifs dans le domaine de la recherche :
En 2010, lors de la phase précédente d’habilitation des diplômes par le ministère, l’AERES (Agence d’Évaluation de la Recherche et de l’Enseignement) a évalué très positivement le projet de licence LLCE en lui attribuant la note A – note accordée avec parcimonie –, reconnaissant ainsi l’investissement et le dynamisme de l’équipe pédagogique.

Très actifs au sein du laboratoire Babel de l’UTLN, les enseignants chercheurs hispanistes participent au rayonnement scientifique de l’établissement. À titre d’exemple, on peut lire en ligne les cinq numéros de la revue Babel consacrés à des thématiques hispanistes. Cette revue, très consultée au niveau international, est subventionnée par le Conseil Régional.

Il existe une demande des lycéens varois pour cette filière :
La consultation des étudiants déjà inscrits en LLCE démontre leur intérêt pour cette formation spécifique, conduisant prioritairement à l’enseignement de l’espagnol. Ils ne considèrent intéressante aucune autre formation et ne souhaitent pas être réorientés.

Bien qu’ils soient dans l’ensemble moins nombreux à s’orienter vers la licence LLCE que vers la licence LEA, un nombre conséquent de lycéens, rencontrés lors des salons consacrés aux formations post-bac, souhaitent aborder les langues par le biais des matières littéraires, ce que permet la LLCE, et non par l’économie ou le droit, enseignements propres à la licence LEA. Et ils ne peuvent envisager de le faire, pour des raisons financières, qu’à Toulon.

L’Université ayant retiré de l’application Post-bac (application où les futurs bacheliers déposent leurs vœux de poursuite d’études dans le supérieur) la LLCE espagnol – et cela avant même que les conseils de l’université ne se soient prononcés sur l’avenir de la formation –, nous recevons de nombreuses protestations de lycéens inquiets de ne pas pouvoir choisir cette licence. Cela atteste de sa viabilité du point de vue des effectifs.

À ce propos, la fermeture de la LLCE représente une réduction de l’offre de formation et donc un affaiblissement du rayonnement de l’agglomération. Il est certain que tous les bacheliers varois qui envisagent de poursuivre des études dans cette filière n’auront pas la possibilité de partir ailleurs, pas même à Nice ou à Aix-en-Provence où l’offre de logements étudiants du CROUS est assez restreinte alors que le locatif privé affiche des prix exorbitants.

La gouvernance de l’Université mène une politique qui manque de cohérence :
Annoncer la fermeture de la Licence aujourd’hui n’est qu’une étape supplémentaire dans un cheminement quelque peu erratique. En effet, depuis cinq ans, la présidence de l’UTLN, sous M. Saillard d’abord et sous M. Boutin aujourd’hui (membre de l’équipe sortante), ne cesse de prendre des décisions contradictoires. Après avoir fait perdre de nombreux postes à l’hispanisme au point de compromettre la capacité de l’équipe pédagogique à assumer sa mission – pourtant en augmentation avec l’ouverture du Master des Métiers de l’Enseignement et de la Formation (MEEF) –, la politique plus récente semblait avoir pris la mesure des besoins avec le recrutement de deux Maîtres de Conférences et d’un Professeur agrégé (PRAG). Dès lors, faire une nouvelle volte-face en décidant de fermer la licence LLCE risque de poser de graves problèmes car le nombre d’heures restant ne suffira pas à combler statutairement les services de l’ensemble des enseignants et ne leur permettra pas d’intervenir dans la spécialité pour laquelle ils ont pourtant été recrutés par l’Université.

Rappelons aussi que l’UTLN forme au Master MEEF d’espagnol. Cette formation est une cohabilitation qui intègre plusieurs partenaires : l’UTLN, le rectorat de Nice, l’Université de Nice et l’Ecole Supérieure de l’Éducation et de l’Enseignement (ESPE). La fermeture de la licence LLCE qui constitue l’étape nécessaire et préalable au Master MEEF n’est pas cohérente avec le maintien, confirmé par les partenaires, de ce diplôme supérieur.

Il a été coupé court à une volonté affichée par les enseignants hispanistes d’améliorer encore la formation :
Malgré la qualité de la licence attestée par l’évaluation de l’AERES, les enseignants hispanistes se sont engagés dans une refonte des enseignements afin de répondre au mieux aux besoins des étudiants ainsi qu’aux diverses évolutions intervenues ces dernières années. Dans un souci de ne pas proposer un nouveau projet coûteux, ils ont réfléchi aux possibilités d’établir des parcours communs avec d’autres licences tout en proposant des volets complémentaires à la formation en espagnol, particulièrement attractifs pour des étudiants qui voudraient diversifier de façon rationnelle leur formation. L’équipe envisageait ainsi de mettre en place une formation d’enseignement du Français Langue Étrangère, une série d’options pouvant préparer à divers concours de la fonction publique, dont le professorat des écoles, ainsi qu’une préparation aux certificats internationaux de langue. Aucun de ces efforts n’a été pris en considération et il a été coupé court à ces projets d’avenir.

La fermeture de la LLCE espagnol aura des conséquences sur le rayonnement international de l’UTLN :
En fermant l’espagnol, on condamne une équipe dynamique impliquée dans de nombreux échanges internationaux. Cette fermeture aura donc pour effet de réduire le rayonnement de l’UTLN à l’étranger et en particulier vers l’Espagne et l’Amérique latine, vaste ensemble qui constitue, après le domaine anglo-saxon, le deuxième domaine dans le monde par son extension et son système supérieur. Sont ainsi menacées certaines destinations Erasmus en Espagne de même que des projets d’échange, en particulier avec les Etats-Unis où l’enseignement de l’espagnol représente un élément stratégique de grande importance (voir projet de convention avec l’Université de Kansas-Missouri). D’autres projets, en particulier avec le Maroc et l’Université de Tétouan, seront considérablement réduits si le volet hispaniste devait disparaître.

Enfin, fermer la seule formation où est enseignée à part entière une langue méditerranéenne autre que le français représente un non-sens dans un établissement qui affiche, au centre de sa politique de recherche, un axe euro-méditerranéen.

Conclusion :
Pour toutes ces raisons, nous considérons que la fermeture de la Licence LLCE espagnol serait une mauvaise décision pour l’UFR Lettres et Sciences Humaines, pour l’Université de Toulon, pour l’agglomération et enfin pour le département du Var. Uniquement inspiré par des arguments comptables immédiats, ce projet entre en contradiction avec l’effort de développement universitaire des collectivités locales et ne prend pas en compte les effets positifs que l’hispanisme produit sur le long terme, tant au niveau local qu’international, dans la recherche et dans l’enseignement, en particulier en participant à la diversité de l’offre varoise.

L’Assemblée Générale de l’Université, réunie le 1er mars 2016, à l’unanimité

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