A l’approche des phases finales de cette Coupe du Monde de Rugby 2015, il était impensable de ne pas faire le voyage à Menton. Non pas pour y cueillir des citrons, ce n’est pas encore la saison, mais pour rendre une petite visite amicale à ce petit bonhomme qui un jour au collège de Rugby à l’occasion d’un match de football, agacé qu’il était par ce jeu réservé aux pieds, a pris un ballon de foot sous le bras, a surpris tous ses collègues jusqu’à aller aplatir la gonfle dans le but, derrière la ligne en hurlant « Goal ».
Le jeu de Rugby était né. Chapeau William ! Cela se passait dans l’Angleterre industrielle du début du XIXè Siècle, à son apogée coloniale et le moins que l’on puisse dire, c’est que les originaux n’étaient pas légion.
Vous l’aurez compris ce petit bonhomme avec sa tête de premier de la classe, c’était William Webb Ellis. Il venait de faire naître ce qui s’appelle aujourd’hui le Football-Rugby, les fédérations portent encore ce nom.
Pour lui rendre visite il nous fallait attendre un jour … un jour pas comme les autres, un jour où on aurait pu se croire à Folkestone. Certes au bord de la mer, mais avec une pluie qui vous fait croire qu’avant la nuit vous allez mourir noyé. En cette journée du 2 Octobre 2015, c’était idéal. Il tombait des hallebardes, même le gardien du cimetière Patrick Gilli, n’osait pas sortir de sa cabane.
Quand il nous a vu arriver, le sémillant gardien du cimetière de Menton, nous a demandé « Vous n’avez pas de parapluie ? » Habitant Toulon où nous avons 432 jours de soleil par an, dites moi un peu à quoi pourrait nous servir un parapluie ? A vendre des cravates à la sauvette à l’arrêt du tramway ?
Non Moooonsieur, nous n’avons pas de parapluie, mais rien ne nous arrêtera ! Nous sommes venus rendre une visite à une vieille connaissance qui s’appelle William Webb Ellis.
Pensez donc si je le connais, j’ai joué au NUC ! N’allez pas comprendre, j’ai joué eunuque, non Patrick Gilli veut dire qu’il a joué au Nice Université Club et il avoue assez facilement que la tombe de William Webb Ellis … il la bichonne.
Patrick nous explique que William est dans le cimetière ancien, un peu plus bas. Redescendez de 500 mètres et vous verrez en face de vous il y aura un sculpture qui a été offerte par la ville de Rugby et l’International Rugby Board, il y a une dizaine d’années.
Sur le mur à côté, pour être sûr que vous êtes au bon endroit vous verrez une plaque de marbre, le 5 Octobre 2007 les 20 Capitaines des 20 nations participantes à la coupe du Monde organisée en France ont souhaité rendre hommage à William Webb Ellis. Le chemin était ainsi balisé, il nous restait à affronter les éléments et
une petite crainte persistait. Au cimetière du père Lachaise sur la tombe de Jim Morrison, on y trouve de drôles d’offrandes, des barrettes de shit, des pétards et même des seringues. Imaginez que des huluberlus aient fait le voyage pour laisser un fût de bière, un plat de pâtes, ou pis encore un 45 tours de Michel Etcheverry (ce qui expliquerait l’absence d’oiseaux rares vivants, à Menton).
Il n’en est rien, sur la tombe de William il n’y a que des marques de respect des 5 continents. Un maillot, un fanion, les couleurs d’un club, un ballon … ovale de grâce ! Patrick Gilli nous le confirme jamais rien de déplacé.
Les visiteurs viennent un peu plus nombreux au moment de la Coupe du Monde, au moment du Tournoi des 6 nations certes, mais ils viennent toute l’année du Japon, d’Australie, d’Afrique du Sud, Il y a trois jours « Y’en a même un qui venait du Zimbabwe », c’était juste avant qu’il se mette à pleuvoir.
Il restait donc une dernière question, pourquoi William Webb Ellis est enterré loin de sa terre mère, loin de l’Angleterre. Pourquoi a-t-il choisi la Côte d’Azur pour son dernier voyage ?
N’ayant trouvé aucune thèse universitaire sur le sujet, une réponse s’impose à nous : Pour y reposer en paix ! Ainsi soit il !