Santé : les hôpitaux publics de plus en plus saturés

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mesure de la pression artérielle

Ce ne sont pas les vacances qui engorgent les urgences et réduisent leurs moyens pour laisser le secteur privé s’emparer « de la clientèle ». C’est Macron et son gouvernement qui s’emploient à réduire les dépenses publiques et à laisser à vau-l’eau nos établissements publics de santé. Leur objectif : moins dix milliards d’euros, ça vient de sortir ! Mais +413 mds pour la défense pour les 7 ans à venir. L’Assemblée a voté très majoritairement.

Comble de cynisme on nous dit qu’en cas d’urgence le meilleur moyen c’est de faire le 15 … précisant qu’il est en cours de transformation pour devenir « un service d’accès aux soins » ? C’est le 15 qui décidera si vous irez aux urgences ! On comprend mieux la déshumanisation en cours : si le 15 n’est pas allé assez vite pour vous donner le feu-vert en cas d’accident quelconque, les secours ne pourront pas vous conduire directement aux urgences ?! Bientôt l’accès sera interdit aux blessés et très malades venus en auto avec leurs proches.

Comme si l’immense majorité de ceux qui les fréquentent allaient se faire changer un pansement au doigt ou réclamer une ordonnance contre la toux ? Toujours l’idée prégnante que le bas peuple abuse des urgences. Quand son enfant fait, en pleine nuit, une fièvre qui n’a cessé de monter et qu’aucun médecin ne répond, que reste-t-il à faire à une famille responsable ? D’autant que vous pouvez attendre des heures chez vous le passage d’un médecin surchargé que le 15 vous a promis trois ou quatre heures plus tôt.

Comme c’est arrivé, il y a quelques mois, à mon voisin, dont l’épouse hurlait de douleurs après une chute. Il appelle le 15. L’ambulance arrive assez vite vers 21 h, mais l’équipe attendait le feu-vert du docteur. À 23 h passées, ils l’ont eu, la malade toujours aussi souffrante souhaitait aller au plus près de chez elle, à Sainte-Anne. Ils l’ont dissuadée car, ont-ils dit, « vous risqueriez de passer des heures dans les couloirs sans être prise en charge !! » Elle a renoncé préférant souffrir chez elle ? Quel choix !

Ce nouveau service d’accès aux soins (SAS) est une téléconsultation pour vous délivrer, éventuellement, une ordonnance ou/et l’adresse d’un médecin, ce qui fait beaucoup réfléchir les praticiens qui devront se partager les gardes de nuit et du week-end avec des rémunérations qu’ils trouvent insuffisantes. Une initiative qui n’a rien à voir avec les urgences des hôpitaux que n’assurent pas la quasi-totalité des cliniques et hôpitaux privés en plein essor.

Dans ces dernières qui ne font pas le tiers-payant, l’avance des consultations, vous devez payer d’éventuels dépassements d’honoraires, la chaise ou le fauteuil (30 ou 90 euros, si vous voulez être seul) qui vous recevra après une intervention ambulatoire, le parking et autres prestations dissuasives à des patients aux ressources modestes !

L’air du temps
Coïncidence, dans le même temps le groupe privé Ramsay qui gère 130 cliniques et hôpitaux français fait, pour les déserts médicaux, une offre de téléconsultation moyennant 11,90 euros par mois. Elle donne accès à un praticien qui, à distance, répond à une question de santé 7 jours sur 7 et 24 h sur 24, dans la limite de 20 questions par an ! L’ordre des médecins y voit « une remise en cause du modèle français fondé sur la solidarité et la gratuité des soins » tandis que la présidente du syndicat MGFrance des généralistes considère qu' »il n’y a pas de suivi, pas de coordination, pas de consultations physiques, c’est le pire de ce qu’on peut voir comme offre de soins ». Le pouvoir, lui, s’en réjouit.

Le covid avait déjà révélé les limites des hôpitaux publics imposées aux personnels, alors applaudis chaque soir pour leur abnégation, mais aujourd’hui tous les hôpitaux sont toujours en manque de personnels faute de moyens financiers pour recruter et mieux faire face aux besoins sanitaires, de l’accueil aux soins de qualité que délivrent nos hôpitaux quand ils ne sont pas surchargés et en manque flagrant de personnels. Autrement dit : tout s’est dégradé !

En janvier dernier les urgences de Fréjus avaient dû fermer faute d’urgentistes, l’été était encore loin, comme à l’hôpital de Draguignan qui avait dû fermer les urgences la nuit pendant 17 mois ! La mobilisation d’un collectif à l’initiative de la CGT a permis récemment de modifier la situation, passée de 6,5 médecins à temps plein, à la fermeture la nuit, à 11 médecins temps plein obtenus récemment. À Gassin même pénurie ainsi que dans les autres hôpitaux du Var : Toulon, La Seyne, Hyères, Brignoles qui sont d’une grande discrétion.

La ligne libérale suivie par le gouvernement ne va pas dans le sens d’une modernisation et d’un développement des services publics qui ne sont pas des « marchandises » mais exactement l’inverse ! Le privé y voit une activité lucrative pour les investisseurs qui ont toujours rêvé de faire de la santé un marché comme un autre…à plusieurs vitesses.

Leur argument : « l’État y gagne » disent-ils, par les « économies de dépenses publiques » ? Non, ils les feront au détriment des contribuables qui paieront de plus en plus cher l’accès aux soins, à la protection sociale, c’est déjà en route, la sécurité sociale glissant vers les pratiques d’une assurance privée, allégeant ses remboursements, comme pour la gestion des retraites. Les mutuelles étant sommées de compenser ce que la sécu ne prend plus en charge !

Évidemment ils ne le disent pas mais ils le font avec toute l’hypocrisie dont ils sont capables alors que leur finalité c’est d’effacer tous les conquis sociaux pour en faire des « produits marchands ». Jusqu’où ira-t-on ?

De plus, il y a un lien très étroit entre le sanitaire et le social : la situation des personnes âgées en perte d’autonomie, de celles en situation de handicaps, d’enfants, de jeunes, de délinquants en danger, de personnes en exclusion sociale ou/et professionnelle, de celles dépendant de l’alcool, des drogues, de celles aux prises avec les violences de toute nature… toute une série de secteurs qui manquent de moyens comme la santé publique directement concernée par les conséquences de la dégradation sociale que nous vivons et qui s’aggrave.

L’urgence immédiate c’est de compenser la baisse des revenus d’autant plus sensible qu’ils sont faibles, voire inexistants ou presque, elle concerne aussi les couches moyennes dont les revenus régressent au point d’entraîner des privations significatives à cause de l’inflation et du décalage du salaire avec le coût de la vie. Comment ne vient-il pas à l’esprit de Macron d’indexer les salaires, pensions et retraites sur l’évolution du coût de la vie ? Tout nous invite à l’exiger.

Et si nous sortions des logiques de rentabilité ? Non pour endetter le pays de manière irresponsable mais pour être efficace et mieux répondre aux attentes sociales. Pensons aux tas d’or sur lesquels est assise l’élite des accumulateurs de lingots qui se partagent les ressources de la terre entière. Quand s’en passera-t-on ? Il y a aussi des médecins salariés dans des centres de santé pluri-professionnels, d’autres favorables à exercer dans un désert médical, si on leur offre des conditions de travail attractives et des rémunérations raisonnables à leurs yeux. Leur mode d’exercice évolue. Il n’y a pas que des assoiffés d’or et d’argent !

Étant entendu que la question du financement suppose qu’il faudra une autre majorité, enfin réceptive à l’idée d’avoir la maîtrise sur la haute finance et une vision très progressiste de l’avenir… même si on n’a pas l’impression que le pays est dans la bonne direction.

Ce n’est pas une raison pour y renoncer d’autant que les raisons d’agir foisonnent.

René Fredon

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