Les Puritains à Marseille un triomphe vocal et musical.

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Soirée d’exception pour l’Opéra de Bellini, « I Puritani di Scozia »  sous la direction de Giuliano Carella à l’Opéra de Marseille.

Une soirée mémorable
La soirée de mardi dernier a été un moment exceptionnel pour l’Opéra de Marseille archicomble qui accueillait cette partition difficile de Vincenzo Bellini. L’œuvre datant de 1835 raconte les amours contrariées d’Elvira et Arturo personnages de la Révolution anglaise qui porta au pouvoir  Olivier Cromwell en 1649. Hyper romantique, déployant des sentiments exacerbés poussés à l’extrême (amour, trahison, passion, jalousie, honneur, patrie  et finalement pardon généralisé) cet opéra  nécessite un plateau vocal hors norme ce qui fut le cas avec une distribution internationale de haut lignage-(Jessica Pratt, Yjie Shi, Jean-François Lapointe, Nicolas Courjal, Julie Pasturaud, Éric Martin-Bonnet, Christophe Berry) – et une bonne direction d’orchestre.

Un grand chef

crédit photo www.opera-online

Dès le chœur d’entrée, la cause était entendue, le maestro Giuliano Carella, prenant les choses en main,  insuffla à la partition bellinienne  un élan irrésistible. Sa direction vigilante,  souple tout en étant dynamique fut vécue de l’intérieur, libérant la substance de cette musique romantique, caressante qui plaisait tant au public du XIX° siècle et notamment à Chopin.

L’avantage de la version de concert est de pouvoir se débarrasser des références pseudo historiques pour atteindre l’essentiel, en quelque sorte de libérer la musique de son environnement théâtral. Le spectacle était malgré tout sur scène  avec un orchestre de Marseille au meilleur de sa forme (des cuivres qui sonnent juste sans « cogner », des cors qui jouent juste sans « canarder), des cordes de qualité, capables de nuances sans approximations. Les chœurs bien préparés par Emmanuel Trenque ont su répondre à la gestique précise du chef qui a été pour beaucoup dans  ce succès musical d’ensemble.

Mais au-delà des aspects techniques, ce que le public a pu apprécier c’est  surtout l’engagement musical et esthétique de Carella, fruit d’une longue imprégnation de cette musique italienne.

De grandes voix
Son travail fut grandement facilité par la qualité des  interprètes. La  soprano britannique Jessica Pratt est une grande dame du chant bellinien. Elle n’a pas eu besoin de la partition pour « entrer » dans l’œuvre. Souriante, heureuse et belle, elle a rendu sa  dimension tragique au personnage  d’Elvira et son air de la folie « Rendetemi la speme » a été un moment d’intensité largement partagé par l’orchestre et le public. Autre  belle prestation celle du ténor Yijie Shi qui, dans une articulation parfaite de l’Italien, a su franchir cet Himalaya du chant bellinien (Sublime « A te O cara », splendide « duo » avec Elvira et magnifique « Credéasi ».

Doit-on regretter l’asymptotique contre fa dans « Ella tremante ella spirante » ? Il a joué la prudence devant cette note qui nécessite un changement de registre vocal périlleux (impossible en voce di petto elle est souvent donnée par quelques ténors en falsetto appuyé) et c’est sans doute ce que faisait le créateur du rôle Rubini à l’époque. Il a préféré la cohérence musicale à l’hypothétique faisabilité. Par ailleurs il a hautement magnifié la partition par son art du bel canto.

Superbe Jean-François Lapointe à l’incomparable maîtrise de la ligne de chant et Nicolas Courjal touchant et impeccable vocalement. Prestation justement applaudie de Julie Pasturaud, Christophe Berry et Éric Martin-Bonnet.

Visiblement le succès était au rendez- vous, plus exactement l’enthousiasme, car si l’amour sortait vainqueur de cette soirée lyrique, la musique aussi.

On le voit et on l’entend, à Marseille il n’y a pas que l’OM, il y a aussi une tradition  culturelle latine du public, un orchestre et des chœurs de qualité et une maison lyrique aux choix judicieux qui honorent le beau chant et la belle musique.

Jean-François Principiano

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