Le Messie de Haendel Alléluia !

0
G F Haendel

Pour le moindre dictionnaire de la musique Haendel 1685-1759 est avant tout l’auteur du Messie. Malgré tout son succès discographique  cette œuvre sacrée semble bien oubliée dans la programmation, sans doute à cause de la difficulté de la présenter correctement en concert tant la pratique chorale en France souffre d’un amateurisme bien établi dans son autocongratulation. Aucun Lycée, aucune Université en France ne sont en mesure de présenter un concert choral de qualité. En revanche nos amis anglais, allemands, tchèques ou suédois ont, eux, une longue tradition d’enseignement choral. Misère de l’apprentissage du chant choral en France. Mais trêve d’amertume, revenons en ces jours d’approche de Noël, à notre Messie !

Œuvre  européenne révolutionnaire
Sans tomber dans le traditionnel parallèle Bach-Haendel, il faut souligner ce qui sépare les Passions, récits essentiellement dramatique-du Messie, dont la conception est tout autre, à la fois moins complexe et plus vaste, puisqu’elle  vise à une sorte de synthèse de la foi chrétienne, protestante, luthérienne, catholique, renonçant à suivre les détails et les personnages d’une « action » pour méditer sur l’ensemble des événements spirituels qui préparèrent, annoncèrent, accomplirent la Rédemption. Elle  puise à des sources musicales  stylistiques italiennes, françaises, allemandes. Une œuvre profondément européenne.

Rendre les hommes meilleurs
Le Librettiste du Messie Charles Jennens dont les vers avaient déjà, pour le compte de Haendel, voisinés  témérairement avec ceux de Milton, écrivit un récit symbolique et sacrée d’un clarté évangélique. L’équilibre entre les récitatifs, peu nombreux, les arias et les chœurs contribue au soutien de l’action dramatique ; l’intensité est entretenue, comme cela est souvent le cas chez Haendel, avec une grande sobriété de moyens dans l’écriture en vertu d’une orchestration au cordeau. Une orientation éthique accompagne la vision esthétique du compositeur : « Je suis désolé d’avoir seulement diverti le public. Ce que je désirais, c’était le rendre meilleur », devait-il déclarer plus tard. Même s’il reprend certains thèmes tirés de ses partition antérieures, Haendel les remanie de façon totalement nouvelle.

L’influence du prophète Isaïe
L’exégèse chrétienne qui lit la version grecque de la Bible hébraïque (la Septante) voit dans certains passages d’Isaïe une pré-Annonciation de la naissance du Christ.

En lisant les vers de Jennens Haendel rencontra une citation du second Isaïe qui le bouleversa : « Il sera le juge des nations, L’arbitre d’un grand nombre de peuples. De leurs glaives ils forgeront des charrues, Et de leurs lances des serpes : Une nation ne tirera plus l’épée contre une autre, Et l’on n’apprendra plus la guerre. » Il écrivit cette œuvre en 24 jours ! Dans la joie et l’exaltation quasi mystique.

Succès en Irlande cabale en Angleterre.
La partition fut en effet écrite comme une action de grâce en un moment difficile de la vie de Haendel, après sa première attaque, entre le 22 août et le 14 septembre 1740, soit en trois semaines seulement. Il fallut toutefois attendre qu’il se rende en Irlande pour que la première pût enfin avoir lieu, le 13 avril 1742 au Neal’s Hall de Dublin. Le succès fut retentissant : la demande de billets était telle qu’on avait sommé les messieurs de « renoncer à porter leur épée » et les dames de venir « sans robe à paniers » afin de ménager de la place à davantage d’auditeurs, et augmenter ainsi la recette « destinée aux œuvres charitables ».

Les  Anglais n’adoptèrent pas d’emblée le Messie dont le syncrétisme théologique  suscita une  cabale des dévots et il fallut le succès de Judas Macchabée en 1746 pour faire de Haendel le grand musicien britannique (son style correspond bien, historiquement à la montée en puissance de l’Angleterre en Europe) et lui promettre un tombeau à Westminster, puis cette gloire un peu trop pompeusement emperruquée dont on a  quelque mal à le délivrer.

Debout pour le chœur
Parmi les grands moments de la partition, citons l’air de ténor « Ev’ry valley shall be exalted » et ses vocalises imagées, ou l’air de la basse « The trumpet shall sound » avec ses fanfares du Jugement dernier, Haendel confiant le cœur émotionnel de l’ouvrage à l’alto (ou contre-ténor) avec « He was despised », d’une bouleversante grandeur tragique. Lors du chœur célèbre il est de tradition en Angleterre de se lever. En hébreu classique Alléluia voulant dire à l’espérance ! puis Louez l’éternel.

Chers amis de TV83, dans  cette période de Noël  2021 levons notre verre à  l’espérance !

Alléluia !

Jean-François Principiano

LEAVE A REPLY

Please enter your comment!
Please enter your name here

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.