Le club des mécontents

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Lors de la prise de la Bastille le 14 juillet 1789, le journaliste Camille Desmoulins était sur place. Au moment de l’assaut il se tourne vers le boucher Desplaut qui tenait une pique à la main et lui demande  « De quel club venez-vous ? Et le boucher de répondre « Du Club des mécontents parisiens ». « Vous êtes nombreux ? Pire monsieur, nous sommes éternels ! »

Jean Jaurès dans son admirable Histoire sociale de la Révolution française, commente cette anecdote en écrivant page 432 « Lorsque le mécontentement s’installe dans une population, même dans un petit nombre, la révolte ne peut que s’autoalimenter par ce sentiment diffus de malaise général. Elle est faite pour durer. »

Qu’est-ce que le mécontentement ? C’est le  sentiment pénible provoqué par l’impression, justifiée ou non, d’être frustré dans ses exigences par la conduite d’autres personnes à son égard. Un sentiment collectif d’insatisfaction procuré par l’action d’un gouvernement, par l’application d’une politique.

Le carburant de la révolte
On pensait qu’après 8 semaines, le mouvement des Gilets jaunes allait s’affaiblir. C’est le contraire qui s’est passé samedi dernier. Nourri par le mécontentement il ne peut que perdurer grâce à cette source intarissable. Car au fond, c’est le carburant de toute révolte.

On a longtemps pensé, dans nos sociétés occidentales de régime capitaliste libéral, que vivre à crédit (pour le plus grand profit des banques) permettrait de « calmer » les populations en les anesthésiant.  Il n’en est rien aujourd’hui. Même à crédit les fins de mois sont dures ! Les Gilets jaunes, c’est le plus grand des partis, celui du mécontentement ! Ils  sont là pour longtemps.

Car les Gilets jaunes s’inscrivent  dans cette lignée de mouvements interclassistes,  qui s’élèvent contre une situation de vie chère vécue comme injuste, contre l’impôt  et les taxes, contre les inégalités, contre une démocratie des oligarques qui les a oubliés.

Dans toute l’histoire  la révolte des mécontents  s’est heurtée au discours de mépris social des élites.  En France on utilisa le terme de « jacqueries des gueux» pour les déconsidérer.

Les dominants refusent de reconnaître la capacité de politisation des acteurs révoltés. Du Moyen Âge féodal à la Révolution française bourgeoise, de la République libérale à la République des banques, c’est le propre du pouvoir que de nier la question sociale… Qui finit par s’imposer par la force, faute d’être entendue.

Jean François Principiano

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