La société masquée !

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Mais au fait, Pourquoi « mettre un masque » ?
Attention, ils sont partout ! Ils épient, ils observent, ils se moquent, ils méditent, ils se méfient… Parfois effrayants, drôles ou énigmatiques, les masques intriguent depuis toujours. Le masque, destiné à dissimuler, représenter ou imiter un visage, assure de nombreuses fonctions, variables selon les lieux et les époques. Simple divertissement ou associé à un rite, œuvre d’art ou produit normalisé, il se retrouve sur tous les continents. Il est tantôt associé à des festivités (Halloween, Mardi gras), tantôt à une fonction (protection, chamanisme, relique funéraire). Il peut aussi représenter des animaux des monstres ou tout simplement se protéger d’un risque de contagion et devenir un sujet de polémique. En avoir ou pas ! Bas les masques !

Des conséquences sociologiques
En somme se masquer c’est toujours faire le choix d’un isolement visible aux conséquences sociologiques importantes comme disait Foucault. Obliger une population à porter des masques modifie le rapport aux autres. Le masque pose une distance entre les hommes. Les personnes  deviennent des cellules indépendantes, moins communicantes, plus égoïstes. Or c’est justement le rapport aux autres, la communication rapprochée, l’empathie, la proximité sociale et non la distanciation  qui construisent la nature sociale des hommes.

Des motivations diverses
Le masque de théâtre dans la tragédie grecque ou romaine permettait d’amplifier le son de la voix. Le masque de combat favorisait la bravoure des guerriers. Le masque à gaz de la guerre de 14 protégeait (mal) de l’ypérite. Le masque de carnaval à Venise pouvait pour quelques jours inverser l’ordre social. L’avènement de la Commédia Dell’arte, cet art du masque italien, a été d’une importance capitale dans l’histoire du Théâtre. Elle a inspiré de nombreux auteurs et en particulier Molière. Les masques techniques sont spécifiques à un métier.

Le masque contre les épidémies a lui aussi évolué au cours de l’Histoire selon les  grandes pandémies. La Peste en 1348 a vu fleurir des masques fantaisistes  en forme de becs comme à l’époque du choléra en Provence. Notons qu’il n’était porté que par les médecins ou les personnels  des fonctions funéraires. Tout cela a été bien décrit par la littérature. Giono en  particulier dans le Hussard sur le toit. Ce qui l’est moins  c’est l’influence sur les hommes du port généralisé du masque dans l’espace social.

Les conséquences du port des masques
Sous le masque le sourire disparaît. À travers le masque toute la société dans sa dimension cosmique se met en scène. Il représente la personnification d’une force naturelle, d’un héros mythique collectif, d’un esprit  englobant,  d’une entité sécuritaire obsessionnelle. C’est l’injonction sanitaire absolue. Même si l’on peut en comprendre l’utilité immédiate, sa généralisation (qui se  profile à l’horizon du déconfinement) aura des conséquences durables selon les sociologues. Jeux de pouvoir et de travestissement, expérimentations du non-regard de l’autre, transfigurations symboliques, relations avec l’inquiétude de la mort : cette immense  mascarade de l’angoisse et du soupçon assurera la pérennité du savoir scientifique dominant tout.

Au final on peut craindre  que le masque préventif  accompagne désormais  les  étapes de notre  vie future et préside  à ses transformations successives. Ainsi  le masque entrera pleinement dans l’organisation des sociétés nouvelles européennes, post coronariennes. En creusant les différences il fera des contagieux des marginaux, comme le héros isolé Gregor Samsa de la Métamorphose de Kafka.

Jean François Principiano

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