La petite reine est de retour.

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La crise que nous vivons aura fait au moins une heureuse, la bicyclette.  En deux mois les ventes de vélos et vélos électriques en France  ont augmenté de 34% un record.

Il y avait bien une reprise lente, un  training économique positif depuis cinq ans, mais l’épisode du coronavirus a sérieusement stimulé la vente des  deux roues. Les français se sont hardiment équipés rattrapant une partie de leur retard sur les pays européens (5°pays équipé en Europe)

Étrange destin que celui de la petite reine
C’est  à l’Allemand Karl Drais que l’on doit la toute première « bicyclette », un vélocipède aussi appelé draisienne : il a en effet déposé son brevet d’invention en 1818. Véhicule en bois à deux roues alignées, on peut le faire avancer en poussant sur le sol avec ses pieds et on le dirige à l’aide d’un levier qui permet d’orienter la roue avant. À partir de 1818, les améliorations se succèdent. Alors qu’il réparait une draisienne, Pierre Michaux en 1861  eut l’idée d’installer une manivelle sur la roue avant. La pédale était née.

Le Grand Bi, muni d’une gigantesque roue avant et d’une roue arrière minuscule et sur lequel on pouvait accéder uniquement à l’aide d’un marchepied, est apparu au début des années 1860. Le diamètre des roues a diminué au fil des ans, grâce à l’ajout des engrenages à chaine, d’un pédalier, de sorte que le cycliste puisse avancer plus facilement, sans devoir faire un effort musculaire herculéen. C’est autour des années 1890 qu’on a vu apparaître le modèle qui allait devenir le vélo moderne avec l’invention du  pneu en caoutchouc la chambre à air et le dérailleur.

Mais au fait pourquoi « petite reine ? Cette expression remonte au XIXe siècle et tire son origine dans l’histoire des Pays-Bas, au temps du règne de Wilhelmine.  En 1890, à la mort du roi  Guillaume III, la  jeune héritière est  âgée de 10 ans à peine. Elle adore découvrir son royaume à bicyclette. C’est ainsi que l’expression «la petite reine à bicyclette » fut reprise par de nombreux journaux français et l’expression « la petite reine » fut adoptée pour désigner la bicyclette.

En lien avec les évolutions de la société.
Les différentes inventions liées au vélo sont en effet en rapport avec les grandes évolutions de la société : le vélo pliant inventé en 1892 le fut, à l’origine, à des fins militaires. En 1914, des bataillons de chasseurs cyclistes furent ainsi déployés sur le front. En 1936, alors que les congés payés venaient d’être mis en place c’est le tandem qui devient à la mode. Quant au vélo électrique, qui fait fureur de nos jours, il ne date pas d’hier : le premier prototype a en effet été mis au point en 1910 ! Quant  aux femmes elles lui doivent un air de liberté avant l’émancipation légale de 1946.

Le déclin
Pourtant à partir des années 1950 le vélo fut  détrôné progressivement par le vélomoteur, le solex, la moto, la vespa. Sans doute plus dangereux ils correspondent à des idéaux de liberté plus conformes à la modernité. En Italie la Vespa est considérée comme un symbole du miracle économique. Le monde entrait dans l’ère de la vitesse. Les publicités des fabricants de cyclomoteurs ciblaient particulièrement les adolescents. Elles inondaient la presse jeune qui tirait à l’époque à des millions d’exemplaires (Salut les copains, Podium, OK…). Elles exaltent l’autonomie et l’évasion qui permettent de rompre avec la vie quotidienne et le carcan familial. Les cyclomoteurs sont autorisés  en France dès l’âge de 14 ans. Résultat : dans les années 70, la France est le seul pays d’Europe à avoir un peu plus de deux-roues motorisés que de cyclistes.

Le renouveau écologique
Vers 1970, après le choc pétrolier, les mouvements écologiques prônèrent le retour au vélo. La lente remontée commençait. Le vélo est le seul mode de transport mécanisé vraiment écologique. Il ne consomme pas d’énergie (si ce n’est l’énergie métabolique supplémentaire du cycliste) et n’émet pas de CO2 (si ce n’est au cours de sa fabrication). Il est parfaitement silencieux. Il utilise 100 fois moins de matériaux qu’une voiture et de plus des matériaux plus facilement recyclables.

L’architecture urbaine  fut un accélérateur  pour ce renouveau par la construction des pistes cyclables urbaines et leur développement dans les années 80 en Allemagne, Italie, Pays bas, pays scandinaves, Etats Unis et  Canada. La France, par contre, prend du retard à cette époque. Par exemple, par rapport à la région PACA, la Lombardie utilise 5 fois plus de vélos et les Pays Bas 13 fois plus.

Le coronavirus et le vélo.
Brutalement, depuis 3 mois, les français redécouvrent les espaces urbains, sans voiture ni pollution. Cette image de cités vouées au silence et à la propreté renvoie à l’utilisation du vélo, dans un espace plus sécurisé. Les municipalités sortantes en font un argument électoral, d’autant plus que  les  fameux experts font le lien entre la propagation du virus  et la pollution de l’air.

En deux mois les ventes augmentent, même pendant la période du confinement, comme si le besoin de liberté s’appuyait sur la ballade en vélo, d’abord virtuelle puis concrétisée lors du déconfinement. Nombreuses sont les manifestations citoyennes réclamant :

Des pistes cyclables, raccordées entre elles, reliant les points d’intérêt touristiques de la ville et  en campagne des pistes cyclables dans un environnement agréable (coulées vertes, chemin le long d’une rivière ;…).

Une signalétique dédiée : panneaux de direction et de kilométrage spécifiques  aux vélos, pistes cyclables facilement identifiables, feux tricolores pour vélos…

Des services adaptés : parkings à vélo…

La nouvelle image sociologique du vélo.

Tous ces changements ont été multipliés par les injonctions médicales. Le vélo respecte la distanciation sociale,  il stimule le système respiratoire. Il permet une baisse de l’hypertension et tonifie le système immunitaire. Son image dans le public est devenue positive. Il ne pollue pas et préserve la nature et l’environnement. Il développe des pensées positives, lutte contre stress et le sentiment de dolorisme. Il rend heureux et favorise l’épanouissement des idées positives. En pédalant on voit le monde  différemment. L’environnement le plus banal devient une fête à chaque coup de pédale. Ni trop lent comme la marche, ni trop rapide comme le bus, le vélo propose une vitesse adaptée qui permet de voir beaucoup de choses et de les voir bien. De plus, il laisse au cycliste la possibilité de s’arrêter où il le souhaite, quand il le souhaite. Que du bonheur !

C’est le retour triomphant de la petite reine !

Jean-François Principiano

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