Le triomphe de la couleur du temps
Importante exposition de Gil Duran peintre majeur et écrivain inspiré au joli Moulin des Arts de La Valette du Var. Une rétrospective de son travail et de l’évolution de son art. De l’éclatante lumière au bleu galicien, un itinéraire de réappropriation thématique ou se mêlent l’inquiétude et la sérénité reconquise.
Gil Duran le dit lui-même « j’ai connu l’angoisse et je l’ai apprivoisée par la peinture » Ce qui donne une période d’un bleu émouvant, hommage aux couleurs de la Galice éblouissantes d’azur.
Un maître de la symbolique.
Comme toujours, Gil Duran étonne ceux qui le suivent par sa maitrise technique sous-tendant une inspiration poétique que dissimule à peine son enjouement naturel. Volontiers prolixe, il sait très bien ou se situe son inspiration. S’inscrivant dans la lignée de Basquiat ou Penck, la culture aborigène est l’une des thématiques récurrentes et prépondérantes chez Duran. De culture ibérique, il puise dans ses origines pour insuffler à certaines de ses toiles un caractère souvent dénonciateur et radical. Il met ainsi en lumière des figures noires mystérieuses grimaçantes et légendaires, comme ce « crane masqué » qui a largement inspiré l’artiste au point d’en devenir un leitmotiv.
C’est ainsi que dans la première salle très bien éclairée il dépeint des personnages énigmatiques mythologiques invincibles qu’il arbore d’un trait noir pour les sanctifier, ce qui deviendra sans nul doute une de ses marques de fabrique. Pourtant ne cédant pas à la facilité répétitive, cet artiste attachant semble s’orienter vers une recherche d’une expression épurée, stylisée, moins lyrique mais plus universelle.
Au-delà du réel.
L’œuvre de Duran telle qu’elle s’exprime à travers cette riche expo témoigne donc d’une sortie de crise physique et morale qui le porte désormais à un niveau supérieur.
Le Deutero-Esaïe disait que la souffrance grandit l’homme, elle stimule aussi le génie de l’artiste. Dans la salle des poissons stylisés sur fond bleu on pourra sans doute y voir la métaphore aquatique d’une remontée vers la lumière. Une série de toiles de taille moyenne et de petits formats sur papiers toilés expriment parfaitement cette perception d’une renaissance. Et c’est justement en cela que ce travail si personnel arrive à nous toucher car nous pouvons nous identifier à cette conquête de chaque jour. Au-delà de sa réalité vécue Gil Duran exprime donc notre propre condition et l’espérance de nos attentes.
Tout se passe à la surface du tableau mais Sartre ne disait-il pas que la surface est parfois plus éclairante que la pseudo-profondeur et qu’il y a davantage de vérité exprimée dans un sourire et une caresse que dans tous les discours encyclopédiques. Au commencement était l’émotion*, à la fin aussi sans doute. Par sa charge émotionnelle l’art de Gil Duran nous dévoile une vérité au-delà des mots.
Il faut absolument voir ce travail pictural.
Jean-François Principiano
*« Dans les Écritures, il est écrit : “Au commencement était le Verbe. Non ! Au commencement était l’émotion. Le Verbe est venu ensuite pour remplacer l’émotion. » Louis-Ferdinand Céline 1957.
Exposition Gil Duran « Actes primitifs et Convalescence bleue » au Moulin des Arts 8 Avenue Aristide Briand, La Valette-du-Var 04 94 23 36 49 jusqu’au 6 mars.
Pour contacter l’artiste 06 40 71 12 23 gil.duran@orange.fr et le site gilduran.jimdo.com