Europe, euro…en sortir ou pas ?

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« L’Europe ne fait plus rêver »…C’est le moins que l’on puisse dire. Juppé enfonce des portes ouvertes (Le Monde 8-5-16). Son économie va mal, ses institutions sont malades et ses nations divisées, résume-t-il !

Le constat est incontestable mais le diagnostic, les causes et les solutions…se situent aux antipodes de la vision que portent à l’expérience, les peuples, victimes de la construction d’une Europe qui s’est faite en dehors et contre eux, pour satisfaire les objectifs des tenants d’un système, le capitalisme, qui se veut éternel puisqu’il n’y a pas d’alternative selon Tatcher.

L’état de l’Union européenne est tel que, malgré les milliards déversés pour sauver les banques privées, la crise sociale, économique et politique s’y développe, le chômage, les inégalités s’accroissent et les pays les plus fragiles, les moins développés se trouvent encore plus instrumentalisés en réserves de main d’oeuvre à bas coûts pour le compte des multinationales, sans pouvoirs politiques confisqués par les institutions.

Le sentiment de n’avoir plus de prises sur leur propre destin a réactivé des exigences démocratiques légitimes de souveraineté ouverte aux coopérations mutuellement avantageuses, qui sont détournées par des replis nationalistes des plus dangereux car ne remettant pas en cause le système capitaliste lui-même et dressant les peuples les uns contre les autres. La gestion du problème des migrants est une illustration de son incapacité à faire face à la détresse humaine.

Cette question de l’Europe et de sa monnaie unique, de leur avenir, n’a rien d’évident, de simple à démontrer (On ne démontre pas l’avenir), on peut l’imaginer selon la conception que l’on a de l’évolution des sociétés, des rapports entre les hommes, en y intégrant les succès et les échecs, les erreurs, les drames de l’histoire, des expériences les plus récentes auxquelles on a crû.

Sans perdre de vue que ce sont les peuples qui font l’histoire en dernière analyse. Et qu’il n’y a aucune recette pré-écrite ni déterminisme historique qui nous prémuniraient contre de douleureux retours de bâton de l’histoire, comme l’illustre la montée des idéologies néofascistes au coeur de l’Europe.

Le PCF s’est toujours situé en fonction des intérêts de classe qui s’affrontent aujourd’hui. Il s’est opposé, dès l’origine, à la mise de l’Europe sous tutelle américaine, au réarmement de l’Allemage, à la création de l’Otan qui a précédé le traité de Varsovie. Puis en 1992, au traité de Maastricht, affrontant les idées majoritaires de droite et sociale-libérales selon lesquelles dire NON à Maastricht, c’était dire NON à la réconciliation franco-allemande, à la paix en Europe, au marché commun source de progrès économique et social..?

48,95% de NON, en 1992 sous F. Mitterrand, malgré lui, malgré le PS (moins une minorité autour de JP Chevènement), malgré la droite, (moins une minorité RPR autour de P Seguin). L’adhésion populaire n’y est déjà pas. Malgré une campagne de chantage inouïe : la crise financière et monétaire était pour demain ! Le NON c’était l’apocalypse.

Le traité de Lisbonne en 2005, même chantage. Cette fois le NON l’emporte sous Chirac 55% de NON. Sarkozy réunit le congrès en 2008 et ratifie le fameux traité comme si le OUI l’avait emporté ! Et l’on voudrait, dix ans après, au vu des résultats, que le peuple français, dont la droite a cyniquement piétiné la souveraineté, ne soit pas plus que sceptique sur les « bienfaits » de cette Europe-là ??

Oui, cette Europe-là a vécu et, par l’usage qui en est fait, sa monnaie aussi, au service de la domination allemande dans une Europe technocratique au bord de la rupture car au seul service des intérêts des puissants, des banques et des marchés financiers asphyxiant les peuples soumis aux dogmes de la finance mondialisée. La Grèce illustre les effets de cette dictature sur les peuples.

Et ils continuent à nous la vendre comme protectrice des intérêts continentaux face à la domination du dollar et des Etats-Unis, au moment même où ils négocient dans le dos des peuples l’accord de libre-échange Europe-Canada et Europe-Etats-Unis pour mieux nous faire avaler leurs poulets aux hormones lavés au chlore et leurs gaz de schiste déjà en route pour nos ports !

Alors que faire ?

Sortir de l’Europe et de l’euro ? C’est tentant mais comment ?.. Tant qu’on n’a pas, pour cela, de majorité, ne serait-ce que dans un pays, sans parler au niveau du parlement européen, cela renvoie à un horizon incertain. Renverser la table pour ne pas avoir à passer dessous ?
La réponse ne se résume pas par OUI ou NON

Ce débat existe à gauche, tant l’échec est patent des politiques d’alignement sur le moins-disant social, la baisse du coût du travail, des protections salariales, des services publics, les déréglementations, l' »optimisation » fiscale débouchant sur les scandales planétaires, avec des paradis fiscaux dans l’UE : ça ne peut plus continuer comme ça en France comme dans toute l’Europe !

Tout aussi difficile s’avère la refonte de l’intérieur, de l’Europe et des traités pour en changer le cours dans le sens des coopérations choisies et réversibles, des souverainetés respectées dans le cadre des rapports de forces actuels.

Car il s’agit, ni plus ni moins, de s’en prendre aux logiques capitalistes du libre-échange, à la maîtrise de la finance, du crédit, de la monnaie, au pouvoir de la BCE. Rien que ça ! Cela au nom des droits des peuples et à leur communauté d’intérêts dans un monde de biens communs et de sécurité collective, ouvrant la voie à de nouveaux modes de production écologiquement compatibles.

Le PCF, à la veille de son congrès, ouvre le débat. Il pense que l’on peut faire sauter le verrou et refonder en Europe une Union démocratique de nations et de peuples libres et souverains qui aient leur mot à dire sur les enjeux et dans le processus d’une construction à géométrie choisie, pour définir leur niveau d’intégration de manière démocratique.

Le niveau des luttes populaires et de conscience des enjeux pour y parvenir, s’en trouve d’autant plus exigeant et l’on n’y parviendra pas avec des « y a qu’à » et des raccourcis forcément réducteurs. Rester ou sortir de l’euro ne saurait être l’enjeu en lui-même décisif, ni même suffisant. Le PCF propose de lui assigner un tout autre rôle au service de l’emploi, des investissements, de la recherche, des services publics et non au service des marchés, de la spéculation et du sauvetage des banques privées sur le dos des peuples.

Il ne lutte pas contre l’Europe mais pour sa transformation profonde au service des peuples, de la démocratie et de la paix. L’exact opposé des populismes europhobes.

René Fredon

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