Draguignan prête au Louvre la perle de son patrimoine : L’Armure de François de Montmorency.
L’armure de François de Montmorency est l’une des pièces majeures du futur musée des Beaux-arts de Draguignan. Façonnée au XVIe siècle, elle a fait l’objet d’une étude approfondie et d’une restauration financée par la ville, avec le soutien de la Direction régionale des affaires culturelles Provence-Alpes-Côte d’Azur (Drac Paca).
Elle a été exposée depuis le 24 juillet au musée du Louvre et a été admirée par les nombreux visiteurs. Elle sera restituée à Draguignan et définitivement installée dans un espace dédié du futur musée des Beaux-arts.
Mais qui était le grand capitaine qui l’a porta comme dans ce portrait d’époque ? (voir photo) Sa personnalité attachante mérite un petit hommage historique. Cet effort de la ville est tout à son honneur.
Un jeune humaniste
François de Montmorency, duc de Montmorency est né à Chantilly, près de Senlis le 17 juillet 1530. C’est le parfait exemple du noble humaniste et militaire français de la Renaissance. Grand officier de la couronne et partisan de la tolérance et de la liberté de conscience il était à la fois piémontais par sa mère et français par son père. François était le fils aîné d’Anne de Montmorency, pair et connétable de France et de Madeleine de Savoie né à Tende dans le duché de Piémont-Savoie. Une enfance provençale et une éducation parisienne. Il voulait écrire mais son père lui imposa une carrière militaire. Après quelques campagnes ou son courage fut remarqué il devient maréchal de France et gouverneur de Paris et d’Ile de France. Il épousa Diane de France, fille du roi Henri II.
Un exemple de tolérance religieuse.
Pendant les guerres de religion, il se range du côté des catholiques libéraux favorables à l’application d’une politique de tolérance civile à l’égard des protestants. Il est lui-même très proche de ses cousins Châtillon passés à la Réforme protestante. Il assista en 1560 aux États Généraux tenus à Orléans. Il participa au sein de l’armée royale à la bataille de Dreux le 19 décembre 1562, et à la prise du Havre. Il participa également le 10 novembre 1567 à la bataille de Saint-Denis où mourut son père. Nommé Gouverneur en 1570, il a la tâche très difficile de faire respecter à Paris la Paix de Saint-Germain-en-Laye. Une paix de tolérance et pour la première fois accordant la liberté de conscience en France. En 1572, il est envoyé auprès de la reine Élisabeth Ire d’Angleterre pour faire signer le traité d’alliance avec la France. C’est à cette occasion qu’il reçoit l’Ordre de la Jarretière.
La Saint Barthélémy.
De retour en France, François est plus que jamais détesté par les catholiques-ultras qui veulent en découdre avec les protestants. Ne pouvant maîtriser ces factions extrémistes, futurs massacreurs de la Saint Barthélémy il abandonne finalement son poste de gouverneur de la ville. Il quitte Paris quelques jours avant la Saint-Barthélemy, laissant ainsi le champ libre au Guise et aux massacreurs. On dit que François faisait lui-même partie de la liste des chefs à exécuter durant le massacre. C’est lui qui fit faire discrètement décrocher le cadavre du protestant Coligny, son cousin, du gibet de Montfaucon où il était suspendu. « Ce fut grande honte pour la France ! »
Une fin tragique
En 1574, Charles IX bien qu’ultra catholique le laisse revenir à la cour, mais un incident impliquant le duc de Guise le contraint de quitter à nouveau la cour. François de Montmorency adhère alors au « Tiers parti de la Paix » du duc d’Alençon voulant appliquer l’édit de tolérance de Saint Germain. Arrêté enfermé, torturé à la Bastille avec le maréchal de Cossé, François de Montmorency n’est libéré qu’en octobre 1575. Le roi reconnaît son innocence par lettres patentes enregistrées au Parlement. Mais François meurt des suites de sa captivité au château d’Écouen le 6 mai 1579. Il a le temps d’écrire ses Mémoires (en partie détruites) dans lesquelles il prône la tolérance religieuse.
C’est une des riches et nobles figures de l’humanisme français malheureusement bien oubliée. Pourtant c’est en souvenir de lui que ce château fut offert par Napoléon à la Chancellerie de la Légion d’honneur, à condition d’honorer la mémoire de ce précurseur de la liberté d’expression et de conscience. La République en fit un des plus beaux musée de la Renaissance. Et la ville de Draguignan s’est honorée en finançant la restauration de cet extraordinaire objet que les hasards de l’histoire ont déposé dans ses murs et dont l’écrin sera le nouveau musée des beaux-arts.
Jean François Principiano
