Conférence : Les Francs-maçons en Provence

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La présence importante des obédiences maçonnes  en Provence (1/5 du territoire national) a toujours étonné les observateurs et les francs-maçons  eux-mêmes suscitant une ample littérature d’érudits. Reprenant cette ample bibliographie, Jean François Principiano en collaboration avec l’UTD de Hyères présentera lundi 20 mai à 14h 30 au Park Hôtel de Hyères une approche culturelle et historique de ce phénomène sociologique.

L’Origine de la Franc Maçonnerie provençale
Selon le grand historien Maurice Agulhon elle remonte au début du XVIIIème siècle mais en plongeant ses racines dans un terreau mystique datant de la fin du Moyen-Age. La Provence n’ayant été touchée que très marginalement par la Renaissance artistique, elle a par contre était fortement influencée par la Réforme Protestante. Autour de Nîmes, Arles, Marseille ou Toulon des foyers de dissidence mystique ont permis de vasculariser des idées nouvelles concernant  « le but de la vie et le sens de notre présence ».

Dans ce livre, devenu un classique, sur les pénitents noirs et les francs-maçons, complétés depuis par de nombreuses thèses monographiques, on constate l’importance des ports de Marseille et Toulon dans l’apparition de la franc maçonnerie Anglo- Écossaise dès les années 1730.

Les élites de Provence relayent le mouvement.
L’amplification du phénomène de « contamination » est dû à l’adhésion des élites locales, notamment le Parlement de Provence à Aix on l’on retrouve les premières loges spéculatives des 1745.La visite en Provence de grands noms divulgateurs comme le Comte de Saint Germain dont la Très sainte Trisonophie fut publiée en Arles en franco-provençal, actuellement conservée à la bibliothèque de Troyes atteste de cette implantation.

L’importance des ports
La conférence soulignera l’importance des ports et notamment de la Marine, la Royale dans cette situation si particulière. En même temps le phénomène s’enflamme sur toute la Provence par mode d’imitation parfois éphémère. En Provence, la franc-maçonnerie se développe vers 1735, à Aix, à Marseille et en Avignon. Toulon subit l’influence de ces trois villes. La maçonnerie y apparaît implantée, sans doute, aux alentours des années 1742-1744. En 1750, deux loges sont clairement identifiées, même si elles tombent en sommeil assez rapidement, au début des années 1760: la loge Saint-Jean, fille de Clermont, attestée dès 1749, et l’atelier Saint-Jean, fille de Saint-Ferréol, d’origine marseillaise. Elles sont toutes les deux déistes.

Leur disparition est rapidement compensée par l’«allumage» de six nouveaux ateliers entre 1761 et 1766. Seuls trois d’entre eux sont encore en activité en 1769: la Parfaite Harmonie, Saint-Jean (de Jérusalem) Métropole et l’Ecossaise d’Hérédon. Entre 1750 et 1789, 18 loges se créent. Mais certaines sont éphémères et on n’en compte plus que neuf en 1789.

La Provence sous l’acacia
Avec Napoléon le phénomène s’emballe ce qui inquiète le clergé local qui multiplie les libelles antimaçonnique y voyant la main du diable. Pourtant et c’est une des caractéristiques des loges provençales, elles restent profondément déistes. Mais pour l’Église « c’est une concurrence déloyale » En 1830 l’évêque de Fréjus (lui-même jadis initié dans sa jeunesse au séminaire), dénonce « la mode des  enfants de la veuve* »

Progressivement la franc-maçonnerie provençale gagne en nombre et audience sous  la Monarchie de Juillet par la protection spéciale de Louis Philippe, puis, surtout, lors de la Révolution de 1848, sous le Second Empire et la  République naissante. Elle se  confond alors avec  l’essor généralisé qui porte au pouvoir une élite réformatrice bien répertoriée par les historiens, de Jules Ferry au Front populaire. Elle participe à l’élan spécifique qui apportera des réformes durables (constitutions, droit de vote, droit à l’enseignement, laïcité, liberté de la presse, séparation des églises et de l’État, divorce, droit du travail, réforme de la justice etc. Malgré la discrétion de mise dans cette nébuleuse, nombreux sont les compagnons de route prestigieux, Voltaire, Montesquieu, Lamartine, Victor Hugo, Jules Vallès, Gambetta, Alphonse Daudet, Claude Farrère, Jean Aicard, Henri Barbusse, Romain Rolland, Frédéric Mistral lui-même qui dédiera un fameux sonnet au maire de Marseille le vénérable Antoine Ignace d’Anthoine « bèl estrambord qu’as empura ma vido ».

Des persécutions à la renaissance
En troisième partie la conférence soulignera l’acharnement politique et social de l’anti-maçonnisme   qui se déchaina de 1900 à 1944 (une génération !) contre la franc-maçonnerie provençale, accusée de tous les maux. Largement relayée par la presse de droite réactionnaire, le clergé (alors que ces obédiences étaient déistes, sans anticléricalisme et en majorité formée de classes sociales élevées), ce phénomène aboutit à la surveillance, au fichage,  à la dénonciation et à la déportation sous le régime de Vichy. Comme partout en France, les francs-maçons en Provence  ont été persécutés à la fois par Vichy, dès 1940, puis par les autorités allemandes après l’occupation de la zone libre.

En 1944, il ne reste plus qu’un dixième des effectifs de 1938-1939 et 839 francs-maçons de ont été déportés en Allemagne et en Pologne.

Il est vrai que la maçonnerie varoise est particulièrement active dans la Résistance. Des tenues clandestines sont même organisées à Toulon, Draguignan, Brignoles et Hyères. Des maçons participent à divers réseaux et mouvements de résistance. Le comité départemental de la Libération du Var, organisme chargé de coordonner les mouvements de résistance, est dirigé et représenté par trois  frères maçons. Après la Victoire le général de Gaulle rétablit la liberté de réunion des Francs-Maçons par un décret signé à Toulon le 23 avril 1944 qui commence en ces termes « La République dans ses droits retrouvés s’honore en rétablissant les  plein droits la  liberté de pensée de toutes les obédiences progressistes persécutées et notamment, Le Grand Orient de France, la Fédération française du Droit humain, la Grande Loge de France, la Grande Loge nationale française… » En 1945 sera fondée la Grande Loge féminine de  France (GLFF).

Conférence : « La Franc-maçonnerie en Provence des origines à nos jours » La Provence sous l’acacia par Jean François Principiano en collaboration avec l’UTD de Hyères et Opéravenir. Lundi 20 mai 14h 30.Entrée libre.

*Enfants de la veuve, les francs-maçons sont  tous les descendants symboliques d’Hiram l’architecte du Temple de Salomon fils de la veuve de la tribu de Nephtali. (Livre des Chroniques).

Renseignements : Elya Weismann Opéravenir  04 94 48 62 75 et 06 11 81 54 73

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