Événement théâtral le mardi 26 février 20h30
À Draguignan Éric Ruf met en scène la Troupe de la Comédie- Française dans l’une des pièces les plus rarement jouées de Racine Bajazet métaphore des intrigues de la cour de Versailles, Cette tragédie en cinq actes mêle complot politique et amoureux dans l’univers confiné d’un sérail. Septième pièce de son auteur, elle est la première à s’inspirer d’un épisode historique contemporain, un fratricide ordonné en 1635 par le sultan ottoman Mourad IV. Une pièce en alexandrins par des comédiens exceptionnels !
Amour pouvoir et jalousie.
En partant de Byzance pour aller combattre les Persans, le sultan Amurat a remis tous ses pouvoirs à sa favorite Roxane, en lui recommandant de surveiller Bajazet, son frère, dont il suspecte les projets ambitieux. Du camp, il envoie à Roxane l’ordre de le mettre à mort, au moment même où celle-ci, qui s’est éprise d’amour pour Bajazet, a formé le projet de l’élever au trône, s’il consent à l’épouser. Mais le cœur de Bajazet n’est pas libre : il aime Atalide, sa jeune parente élevée avec lui dans l’intérieur du harem, et sur laquelle le grand vizir, l’ambitieux Acomat, a jeté les yeux comme sur l’instrument de son élévation.
Bajazet ne peut consentir aux projets de Roxane, et celle-ci le menace de sa vengeance. Atalide s’oublie elle-même, et supplie Bajazet de donner quelque espérance à sa rivale. Mais Roxane a surpris leur entente, et c’est dans le sang de Bajazet qu’elle lavera sa honte. Elle ne doit cependant pas jouir de sa vengeance : un messager d’Amurat arrive, porteur d’un ordre de mort pour la sultane infidèle. Roxane tombe sous son poignard. Acomat, qui a armé ses partisans pour soutenir Bajazet, arrive trop tard pour le sauver et Atalide se tue de désespoir.
Lorsque, en 1672, Racine fait jouer Bajazet sur la scène de l’Hôtel de Bourgogne où la pièce rencontre un succès immédiat, sa nouveauté tient sans doute à son sujet turc. Toute turquerie était alors à la mode. Amurat n’est autre que le personnage historique contemporain Mourad IV Le sérail est un admirable lieu d’affrontement de l’amour et du pouvoir L’intrigue se déploie savamment à travers la complexité des sentiments jusqu’ à son dénouement sanglant.
Une analyse subtile de l’âme humaine
Se sentant en disgrâce, le grand vizir Acomat conspire pour que Bajazet devienne sultan à la place de son frère Amurat. Il imagine une rencontre entre ce dernier et Roxane, la favorite d’Amurat, afin qu’elle tombe amoureuse et qu’il accède au titre.
Or, la princesse Atalide qui lui sert d’intermédiaire et Bajazet s’aiment en secret.
Bajazet est l’une des pièces les moins jouées de Racine. Pourtant s’entremêlent tous ses thèmes privilégiés, réunis et analysés au scalpel, deux forces extraordinairement imbriquées, plus que dans n’importe quelle autre de ses pièces. Celle du pouvoir qui, porté par un être absent dont le retour est incertain, s’en trouve décuplé et celle du sérail, lieu du fantasme le plus absolu dans la chaude tiédeur des pensées les plus intimes
Un texte mythique en alexandrins
Mais Racine transforme surtout la nature de la tragédie classique. Ses héros n’échappent ici ni aux compromissions ni à la culpabilité, et s’ils meurent amoureux, ils ne meurent plus d’amour, mais à cause de l’amour. Ce texte magnifique nous laisse songeur ; il offre une tragédie mythique avec intrigues politiques et amoureuses. Les passions se déchaînent, les complots et les manipulations se nouent, entraînant crimes, conspirations et tragédies. Il montre au-delà de la beauté formelle la permanence des passions et des sentiments. Racine toujours actuel !
Bajazet de Jean Racine Théâtre en Dracénie vendredi 26 février 20h30 Draguignan Mise en scène et scénographie de Éric Ruf administrateur général avec la troupe de la Comédie-Française. Costumes de Renato Bianchi. Lumières de Franck Thévenon. Son de Dominique Bataille. Maquillages et coiffures de Catherine Bloquère. Collaboration artistique de Claude Mathieu. Une Production de la Comédie-Française et du Théâtre du Vieux-Colombier. Théâtre de l’Esplanade Draguignan 04 94 50 59 59.
Jean François Principiano
